Malgré l'état d'urgence sanitaire, élèves et étudiants continuent de suivre leurs cours grâce aux initiatives privées et au dispositif à distance mis en place par le ministère de l'Enseignement, ce qui fait du Maroc un «pays 4.0». Faudra-t-il valoriser cet acquis après la crise sanitaire ? Depuis le début de l'état d'urgence sanitaire, et avec la fermeture des établissements scolaires et universités, le Maroc a misé sur l'enseignement à distance pour éviter aux élèves et étudiants une année blanche. Ces derniers continuent donc de suivre leurs cours grâce notamment au dispositif à distance mis en place par le ministère de l'Enseignement. Il s'agit, rappelons-le, d'une plateforme TelmidTice. Accessible depuis les liens telmidtice.men.gov.ma et soutiensco.men.gov.ma, et la chaîne TV Attakafiya (Arrabia), elle propose des cours filmés ou résumés en vidéos, avec ou sans professeur. Et c'est d'autant plus intéressant que, parallèlement à la plateforme ministérielle, plusieurs initiatives privées, relevant essentiellement des missions étrangères, ont vu le jour. Pour celles-là, il s'agit principalement de grandes écoles installées dans les grandes villes du pays. D'autres initiatives privées de moindre ampleur sont venues renforcer le dispositif de l'Etat visant à garantir la continuité pédagogique et l'apprentissage scolaire à tous les apprenants au moyen de ressources numériques. S'il est encore trop tôt pour se prononcer sur la performance de ce dispositif, les premiers résultats sont plutôt encourageants. Le Maroc, un pays 4.0 Le Maroc est passé de pays 1.0 à pays 4.0 avec la crise liée au coronavirus, rattrapant ainsi plusieurs années de retard. Un acquis considérable à valoriser, selon le président de l'Université Moulay Ismail (UMI) de Meknès, Hassan Sahbi. Il appelle au renforcement de l'enseignement à distance, en capitalisant sur les acquis enregistrés lors de la crise sanitaire du Covid-19. «La promotion de l'enseignement à distance permettra de parer aux contraintes des effectifs en augmentation continue et de généraliser l'enseignement dans les zones enclavées du pays», a indiqué Sahbi dans une déclaration à la MAP, notant que l'enseignement à distance, le e-learning et les MOOC sont maintenant une réalité, alors qu'ils étaient encore des chantiers en cours dans la plupart des établissements de l'éducation nationale et de l'enseignement supérieur. Selon lui, d'aucuns ne peuvent nier l'effet de cette crise sur l'adoption immédiate et spontanée des technologies d'information et de communication par les différents acteurs de l'enseignement primaire, secondaire et universitaire pour assurer la continuité pédagogique auprès des élèves et des étudiants. «À la faveur du confinement, les enseignants sont désormais en mesure de donner des cours sur des plateformes et à travers des logiciels adaptés», poursuit-t-il, affirmant que les étudiants -des natifs numériques pour la plupart d'entre eux- connaissent parfaitement les portails académiques et se sont vite familiarisés avec ces nouveaux modes d'enseignement virtuels. Son collègue de l'Université Abdelmalek Essaâdi (UAE), Mohamed Rami, lui, va plus loin. Déjà convaincu que l'enseignement à distance pourrait devenir une réalité dans un avenir proche en associant cours présentiels et virtuels, celui-ci soutient que «Nous ne pouvons pas revenir à la situation que nous vivions avons la pandémie car la pédagogie de l'enseignement va changer et nous allons associer cours présentiels et renforcement des cours à distance». Dans un entretien accordé à la MAP sur l'expérience de l'enseignement universitaire à distance durant l'état d'urgence sanitaire, il insiste sur la nécessité d'œuvrer au niveau national pour créer une université virtuelle, «surtout que nous disposons d'une quantité impressionnante de cours de différentes disciplines sur les plateformes numériques, qui pourraient constituer une base pour le lancement d'une université virtuelle avec ses propres professeurs et cadres administratifs». Cette université, poursuit-t-il, permettrait de dispenser un enseignement à distance aux étudiants qui ne peuvent pas assister aux cours présentiels, et serait un énorme acquis pour le Maroc. Il faut noter que les professeurs et le staff administratif de l'UAE ont produit plus de 4.000 cours numériques que les étudiants peuvent consulter au niveau des plateformes ou des sites web des établissements universitaires. Ces cours sont également diffusés sur les chaînes télévisées et via les radios régionales d'Al Hoceima, Tétouan et Tanger. Plus de 140 cours ont été diffusés, jusque-là, sur les ondes des radios régionales, tandis que d'autres cours ont été diffusés sur la chaîne de télévision Arrabia. Malgré la motivation dont font preuve étudiants et enseignants, il existe tout de même une différence dans l'enseignement à distance entre les établissements à accès limité et ceux à accès ouvert. Pour les premiers, où le nombre des étudiants est limité, les cours étaient généralement interactifs, tandis que pour les établissements à accès ouvert, il a fallu d'abord télécharger les cours des sites et plateformes des deux facultés, puis utiliser les autres plateformes électroniques pour diffuser les cours en direct, relève-t-on. «Personne ne peut mettre en doute l'importance du présentiel dans les activités pédagogiques», souligne Hassan Sahbi pour qui les deux modes doivent désormais coexister en vue d'une meilleure performance d'apprentissage, rappelant également que le Maroc, à l'instar des pays développés et émergents, s'est doté de toute une stratégie numérique étalée sur plusieurs décennies, et ce dans les différentes facettes économiques et sociales du pays.