Il est des projets artistiques qui, par la profondeur de leur message, vous laissent tellement songeur... «Jam & Salam» est le fruit d'une rencontre entre artistes marocains et sénégalais. Exposition collective réunissant sept artistes, «Jam & Salam» contribuera sans aucun doute à consolider cette identité africaine, que l'on a tendance à oublier. Dix jours durant (du 1er au 10 mai), ces artistes, chacun de leur côté, tenteront de croiser leurs regards le long du fleuve Sénégal, un lieu chargé d'histoire. Ils présenteront par la suite au public leurs œuvres, inspirées indubitablement de cette histoire commune et de cet avenir que nous, Africains, sommes en train de façonner ensemble. «Jam & Salam», qui signifie paix en wolof et en arabe, est le thème donc de cette exposition marquée par la participation de la peintre Mouna Charrat, de la photographe et cinéaste Fatou Kande Senghor, du sculpteur El Haj Adama Keita, de l'artiste peintre Mohamed Mourabiti, du photographe Saâd Tazi, du peintre et sculpteur Ngoor et de la romancière Abla Ababou. Tout au long de la période de cette résidence artistique, on créera et discutera de sujets universels au long de ce fleuve, fédérateur des peuples du Sénégal, de Mauritanie, du Mali et de la Guinée où il prend naissance. L'Afrique, c'est l'avenir Initié par l'association Pava pour la promotion des arts visuels en Afrique et soutenu par bon de nombre de personnalités (Oussayne Wade, SG de la Biennale de Dakar ; Joëlle Le Bussy, commissaire générale de la Biennale Off de Saint-Louis ; Amadou Diaw, président de la Fondation Saint-Louis for Africa ; et Mouna Kadiri, d'Attijariwafa Bank, «Jam & Salam» aspire à «réinventer, le temps d'un échange, des contes d'un passé commun, la ligne de l'histoire, dans son expression la plus contemporaine, un témoignage vivant de ce que murmure Saint-Louis, cette plate-forme de fusions, où s'enchevêtrent les identités et les regards». C'est ce que découvrira le public lors du vernissage prévu le 16 mai prochain et organisé dans le cadre de la journée de Saint-Louis, du Off de la Biennale de Dakar, programmé du 11 mai au 10 juin prochains. Des œuvres qui promettent de transmettre cette envie de dessiner les grandes lignes de l'avenir et de rechercher cette identité africaine commune. Des œuvres qui seront aussi fortement inspirées par cette capitale historique de l'Afrique de l'Ouest qu'est Saint-Louis. «Cette ville, carrefour culturel et spirituel, se renouvelle sous les décombres du délabrement colonial, dont le legs attire experts, écrivains et touristes», explique Mouna Kadiri, commissaire générale de l'exposition. «Jam & Salam » est aussi l'occasion de promouvoir le dialogue interafricain entre les peuples. En effet, une conférence sur le leadership en Afrique est programmée le 14 mai, toujours à Saint-Louis. Elle sera marquée par la présence d'étudiants marocains et sénégalais. Bref, «Jam & Salam», se veut une expérience unique pour rapprocher les peuples marocains et sénégalais. Une occasion aussi de découvrir les scènes culturelles et artistiques marocaines et sénégalaises, en ébullition depuis quelques années. En attendant que ce projet s'exporte vers d'autres pays africains, il nous rappelle que nous sommes tous acculés à adopter notre identité africaine, le seul moyen d'envisager le futur avec sérénité. Mouna Kadiri, Commissaire d'exposition. «Nous partageons une identité commune» Les Echos quotidien : Comment vous est venue l'idée de cette rencontre artistique ? Mouna Kadiri : En réalité, cette rencontre est le fruit de l'amitié maroco-sénégalaise. C'est grâce à mon ami Oussayne Wade, SG de la Biennale de Dakar, que j'ai rencontré un mécène culturel sénégalais. Au fil des échanges, nous nous sommes rendus compte que l'on partageait une identité commune et que notre objectif était de créer une plate-forme de paix et dessiner les lignes de notre avenir. C'est ainsi qu'est née l'idée de mettre en place cette rencontre artistique. L'art et le dialogue interculturel renforcent les liens entre les communautés. Partant de ce fait, nous avons décidé que les œuvres, fruits de cette expérience, fassent l'objet d'une vente aux enchères au profit de la Fondation Saint-Louis for Africa, à destination d'un projet humanitaire. Comment s'est fait le choix des artistes participants ? Comme je vous ai expliqué, au fil des rencontres, nous avons fait la connaissance de bon nombre d'artistes marocains et sénégalais. Il s'agit notamment de Mouna Charrat qui a participé à la concrétisation de ce projet, de Mohamed Mourabiti, qui connaît très bien le Sénégal pour avoir déjà fait Nouakchott-Dakar par la route, et de Saâd Tazi, photographe contemporain. Côté sénégalais, il y a notamment Fatoumata Kande Senghor, qui fait partie aujourd'hui des artistes les plus en vogue. Elle collabore surtout avec les jeunes, promouvant un art créatif et libre. En un mot, les artistes participant à ce projet, qu'ils soient marocains ou sénégalais, sont à la recherche de cette identité africaine commune, qui ne peut que renforcer et consolider le partenariat Sud-Sud. À quand Jam & Salam au Maroc ? Notre rêve est d'organiser cette exposition l'année prochaine au Maroc et d'inviter les artistes sénégalais dans notre pays. Toutefois, nous préférons pour le moment, nous concentrer sur ce projet qui aura lieu dans quelques jours à Saint-Louis. Nous sommes tous mobilisés pour que cette expérience réussisse et pour que nous adoptions une nouvelle manière d'appréhender l'avenir.