Plus que deux simples cahiers des charges, c'est une nouvelle vision de l'audiovisuel national, qu'a présentée le ministre de la Communication vendredi dernier. Si les professionnels de l'information s'y attendaient déjà depuis la nomination du nouveau gouvernement, il faut reconnaître que les «grandes lignes» des cahiers des charges de la SNRT et de la SOREAD-2M vont bien au-delà de simples recommandations sur la programmation ou le positionnement des chaînes. Quatre défis majeurs, c'est ainsi que résume Mustapha El Khalfi le résultat de deux mois de travail participatif, au cours duquel, il dit avoir mis à contribution «plus de 35 acteurs concernés» qui ont laissé leur memorandums. Le ministre PJDiste nouvellement nommé parviendra-t-il à faire en quelques mois ce que son/ses prédécesseur(s) ne sont pas parvenu à réaliser en un mandat ? Tout porte à le croire, car en plus de la simple «mise en œuvre des dispositions de la nouvelle Constitution», le département d'El Khalfi compte «gagner le pari de la compétitivité, mettre à niveau les médias publics dans la perspective de leur libéralisation» et enfin «relever le défi du rayonnement des médias audiovisuel nationaux». Ces quatre leitmotivs, seraient en passe de lui faire connaître «un nouveau chapitre» de son histoire, préconise El Khalfi – Une histoire qui sera d'abord marquée par la consécration de la bonne gouvernance, insiste-t-il. Y a-t-il un commandant un bord ? Au programme, des médias publics «professionnels, responsables et compétitifs» qui répondent aux principes de «qualité, de pluralisme, d'égalité des chances, d'indépendance éditoriale, de liberté d'initiative et de respect de la déontologie». En somme, l'idée est d'en faire de véritables médias au service du public en «déterminant les principes du service public, les finalités et les normes», souligne le ministre. Pour rappel, ce dernier avait présenté jeudi dernier un rapport d'examen du projet de loi de finances 2012, devant la commission de l'Enseignement, de la culture et de la communication de la Chambre des représentants. Voulu comme un bilan préliminaire du secteur pour l'année 2012, ce rapport trace les prochains chantiers du département d'El Khalfi, mais également des deux chaînes. Il avance déjà la nécessité «d'activer» les différents conseils institués aussi bien à la SNRT, qu'à 2M. Il s'agit en l'occurrence du Conseil d'administration, Conseil stratégique, celui des salaires et des indemnités, d'audit ainsi que du Conseil de la déontologie. L'appel à la création d'une commission de sélection des programmes et l'activation du comité d'éthique, n'est pas non plus pour rassurer quant à la bonne gouvernance du pôle public. Nouvelle vision, nouvelles chaînes On efface tout et on recommence. C'est en partie ce que laisse entendre ce fameux rapport soumis par le ministre qui, au delà du renforcement du rôle du service public des deux chaînes, parle d'un repositionnement des chaînes thématiques déjà existantes. Ainsi la chaîne éducative Arrabia devient chaîne culturelle, Al Maghribia, relais à l'international des programmes d'Al Oula et 2M verra «ses émissions destinées aux MRE se renforcer». Il en est de même pour la chaîne religieuse Assadissa. Concrètement, l'objectif est «de disposer d'une chaîne culturelle et d'un support d'information international en quatre langues», explique le ministre. Serait-il question de revenir à un modèle de chaîne tout info, à l'image de Medi1TV avant sa «reconversion»? À ce titre d'ailleurs, le rapport indique qu'il a été procédé, pour la chaîne tangéroise, «à la mise en œuvre d'une convention de contrôle». L'objectif serait de mettre en adéquation la relation de la chaîne publique avec les institutions gouvernementales. Le projet de chaîne parlementaire revient également sur le tapis, en force cette fois-ci. Le ministre avance en effet, que «des consultations avec le Parlement et le ministère chargé des relations avec le Parlement» ont été initiées avec le SNRT pour la création d'une chaîne parlementaire. Et de poursuivre que la SNRT sera chargée du volet technique, tandis que «la responsabilité éditoriale revient au Parlement». Pour la chaîne sportive Arryadia, par contre, rien n'est dit. Fortement prometteuse de par son positionnement et sa ligne éditoriale, celle-ci est largement en retrait au vu du montant des droits audiovisuels. Même constat pour ce qui est de la chaîne Amazigh, qui pourtant traduit au mieux le principe de pluralité culturelle honoré dans la Constitution. Plus surprenant encore, le rapport présenté par El Khalfi, fait état d'un projet de création d'une nouvelle chaîne de télévision «qui traitera des questions de la famille et de l'enfant». Imaginée en partenariat avec le ministère de la Famille et du développement social, ce projet de chaîne, comme les autres, fera l'objet d'une étude visant à «définir le cadre juridique et le modèle économique et de gestion» leur convenant. À en croire les délais annoncés dans ce rapport, l'étude devrait être lancée sous peu. En effet, le lancement des chaînes est prévu pour 2013 et 2014. SNRT (re)devient holding public Avec tous ces projets dans le pipe, il paraît «évident» que la SNRT doit renforcer son positionnement en tant que «holding du pôle public», un projet dont il a été déjà question il y a deux gouvernements de cela. À ce titre, une étude concernant les aspects «juridiques, financiers et organisationnels a déjà été entreprise», annonce El Khalfi. L'étude se penchera également sur le volet RH dans le but de «créer un pôle public pilote et complémentaire au cours de l'année 2012». La Société nationale de radiodiffusion et de télévision jouira dans la foulée d'un nouveau siège social.Dans le même ordre d'ambitions, renforcer le paysage audiovisuel national, favoriser la diversité... le département ministériel laisse entendre que «des concertations ont été entamées avec des chaînes internationales et arabes pour leur installation au Maroc». Les radios publiques n'échappent pas à l'appel du ministère qui envisage pour elles, «un programme d'urgence» visant une remise à niveau des stations et une «redéfinition de l'identité propre à chaque chaîne radiophonique».