Serait-ce un nouveau tournant dans l'histoire de la VEFA (Vente en l'état futur d'achèvement)? Tout porte à le croire. En effet, de sources ministérielles, on apprend qu'un projet de loi, devant apporter les modifications nécessaires à la loi existante, est finalisé, ou presque. «Un projet de loi est prêt, mais on attend la tenue d'ateliers avec les associations de consommateurs et les professionnels afin de décider de la nécessité ou pas d'y intégrer des modifications», explique Mouna Lahlou, directrice de la Promotion immobilière au ministère de l'Habitat. Des concertations devront ainsi être menées avec les différents acteurs du secteur courant octobre et en novembre prochain avant la présentation finale du projet de loi aux autorités compétentes. Ceci dit, on peut d'ores et déjà dire que les principaux amendements qu'introduira la nouvelle loi seront centrés autour des différentes problématiques concernant les cautions à déposer par les promoteurs dans le cadre de la VEFA. D'ailleurs, c'est le principal point sur lequel convergeaient les participants au débat organisé par le Club Entreprendre, hier à Casablanca, et qui se voulait une occasion de dresser un bilan des huit ans de l'introduction de la VEFA, en insistant sur les principales problématiques y afférentes. D'emblée, il est clair que la VEFA n'a toujours pas connu le succès qu'on lui prédisait au moment de la mise en œuvre de la loi. Selon les professionnels, les transactions conclues via la VEFA ne dépassent pas 15% des opérations dans le secteur, ce qui demeure très peu comparativement à la moyenne affichée dans les autres pays. La raison à cette débâcle est toute simple : les promoteurs immobiliers n'appliquent pas tous la VEFA, particulièrement les petites et moyennes structures. «Si une loi n'est pas appliquée c'est qu'elle n'est pas bonne», souligne Maître Mohamed Alami, Président délégué du conseil national des notaires. La principale explication à la non application de la VEFA par les promoteurs est liée aux problèmes des cautions bancaires. En effet, «la difficulté ne se pose pas au niveau du dépôt de la caution mais plutôt dans sa récupération», précise pour sa part, Rachid Khayatey Houssaini, vice-président de la Fédération des promoteurs immobiliers (FNPI). Ces derniers déplorent en effet que la loi ne prévoie pas de sanctions devant pousser les deux parties à respecter les dispositions relatives à la récupération des cautions. Et dans les faits, l'histoire entre le promoteur et l'acquéreur se termine souvent par un conflit sur la conformité de qualité du bien avec ce qui était convenu à l'avance. Or, la loi ne prévoit en aucun cas une mention sur le «parfait achèvement». Ce qui est donc censé être une source de financement pour les promoteurs devient un poids à supporter. Dans le même contexte, pour plusieurs le modèle adopté jusque-là par le Maroc reste inadapté. Dans le Royaume, la constitution de la caution bancaire se fait d'une manière graduelle au fur et à mesure de la réalisation du bien immobilier. Dans les autres pays, notamment en France, la caution est dégressive, ce qui est jugé plus réaliste. Du coup, plusieurs promoteurs ont préféré faire sans la VEFA. D'autant plus que l'euphorie du secteur de ces dernières années avait mis les promoteurs en position de force face aux acquéreurs qui devaient se plier aux règles qui leur étaient imposées. «Les promoteurs ont été les premiers à demander une loi sur la VEFA. Cependant, celle introduite depuis 2002 n'est pas complète», ajoute-t-on au sein de la fédération. En effet, avant, il était interdit aux professionnels de vendre un bien immobilier non achevé et beaucoup transgressaient la loi. Celle-ci devait donc régulariser la situation. Il n'en fut rien, parce qu'elle est jugée avant tout incomplète. D'un côté, elle ne permet pas à l'acquéreur de devenir propriétaire au fur et à mesure de la finalisation du bien. Aussi, il n'est aujourd'hui pas possible pour les promoteurs de disposer de titre foncier provisoire pour les constructions en cours et d'y inscrire les actes de vente en état futur d'achèvement et les actes de prêt hypothécaire. Selon les notaires, cette mesure devrait faciliter le transfert progressif de propriété. D'un autre côté, elle ne peut être appliquée aux grands complexes résidentiels (les logements sociaux en sont l'exemple) en raison des conditions liées à la commercialisation. Cette dernière n'est, en effet, possible qu'après l'achèvement des travaux de gros œuvres sur le rez-de-chaussée. Or, les complexes résidentiels se font généralement par tranche et ne peuvent remplir cette condition. Le ministère de l'Habitat a semble-t-il pris conscience de ces problématiques et se propose de veiller à l'introduction d'une loi corrective. Cependant, cela suffira-t-il aux promoteurs ? Pas si sûr. Car même si le département d'Ahmed Hejira prône une démarche basée sur la concertation, les textes proposés par les professionnels ne sont pas toujours retenus.