La vague de chaleur «Chergui» a encore frappé. La hausse des températures enregistrées depuis le 7 août dernier – qui a dépassé la barre des 40°C et qui a balayé plusieurs régions du pays à forte concentration d'élevages avicoles – a provoqué d'importants dégâts au secteur : 100 millions DH de pertes financières relevées en date du 13 août. Il s'agit de l'équivalent de 60 millions de DH de pertes liées à la mortalité des volailles, et de 40 millions de DH dues à la baisse des performances de production. Le taux de mortalité est élevé au niveau des élevages de poulets de chair (15% des pertes du secteur au niveau national) et de dindes (10% des pertes du secteur au niveau national). Quant à la chute des performances de production, elle atteint 15% pour les poulets (retard de croissance), 10% pour les dindes (retard de croissance), 25% en reproducteurs et accouvage et 10% en pondeuses (chute de pontes). Ces pertes varient selon les régions, l'âge des volailles et les techniques d'élevage appliquées (présence ou non de moyens de lutte contre les fortes canicules). Interrogé sur les retombées de cette catastrophe sur la consommation nationale et l'approvisionnement des marchés durant le mois de Ramadan, Khair-eddine Soussi, président de la Fédération interprofessionnelle du secteur avicole (FISA), écarte du revers de la main tout risque de pénurie. «D'autant plus que, pendant le mois de Ramadan, la demande d'œufs est beaucoup plus forte», appuie le responsable. Prix contre température ? D'un autre côté, le consommateur marocain devrait, toutefois, s'attendre à une répercussion de ces effets sur les prix du kilo de volaille, si la vague de chaleur persiste et se prolonge plus que prévu. «Dans de telles conditions, nous serons obligés de revoir les cours sur les marchés, afin de compenser le manque à gagner. Actuellement, le kilo coûte 15 à 16 dirhams à la ferme. Si les températures reviennent à la normale, ce prix pourrait tomber à 14 ou 13 DH», explique le président de la FISA. De plus, ce dernier fait état d'une demande exceptionnellement en hausse, le mois dernier, et qui aurait quelque peu affecté les cours. «Le Ramadan est arrivé très tôt cet été. Le mois de juillet a donc été marqué par une concentration de festivités et autres manifestations qui ont fait grimper la demande en viande blanche», détaille ce dernier. Cependant, ces déclarations sont contradictoires à celles faites, lundi, par un grossiste, dans les pages d'un quotidien de la place. Ce dernier parle d'un vaste réseau de lobbying entourant la fixation des prix. Un lobby qui manipule le marché, par le biais «du stockage d'œufs et de renchérissement des prix des aliments du bétail». Des affirmations qui se justifient par le fait que les hausses de prix coïncident, chaque fois, avec le Ramadan et la période estivale où il y a un pic de la demande. La thèse avancée par la FISA est restée inchangée lors de ces trois dernières années, accusant les vagues de chaleur. Les versions demeurent très partagées sur ce point, au grand détriment du consommateur moyen. Cap gardé Si à court terme, les risques de pénurie et de flambée de prix sont moindres, qu'en est-il des engagements pris par le secteur, auprès de l'Etat, dans le cadre du contrat-programme 2009-2013 ? Ne seront-ils pas fortement contrariés ? Ces interrogations sont justifiées, sachant que la même vague de chaleur avait porté des coups, «beaucoup plus dur», au secteur, en juillet 2009. Cependant, sur cet aspect aussi, Soussi rassure : «nous avons atteint 440.000 tonnes de production en viande blanche en 2009, sur un objectif fixé à 500.000 tonnes pour 2013, d'après les clauses du contrat-programme. La mise à niveau du secteur est en bonne marche et nous espérons honorer nos objectifs, en délais et quantités». Pour l'heure, la R&D est placée parmi les priorités de cette mise en œuvre, avec la signature d'une série de protocoles d'accord avec le ministère d'Akhannouch portant sur ce volet, il y a près de trois mois. Le secteur peut donc toujours compter sur ses propres ailes pour gagner en compétitivité.