Les Marocains seraient-ils accros à leur carte bancaire ? Les conditions sont en tout cas réunies pour qu'ils le soient de plus en plus. D'un côté, les autorités de tutelle ont mis en place des outils pour assouplir les réglementations en vigueur. C'est le cas notamment de l'Office des Changes qui, en fin 2010, faisait passer la dotation touristique de 20.000 DH à 40.000 DH par an et autorisait les achats sur les sites étrangers. De l'autre côté, les banques ont à la fois élargi leurs offres en incluant des cartes privatives, uniquement valables sur leur réseau propre, et des panoplies de packages pour chaque type de client. Autant de mesures qui ont généré une activité bancaire en très bonne forme en 2011. C'est ce qui ressort des derniers chiffres de la monétique publiés par le Centre monétaire interbancaire (CMI). Ainsi, le nombre de cartes bancaires émises par les banques marocaines a progressé de 13,6% à fin 2011 par rapport à la fin 2010. Ce sont ainsi 8 millions de cartes qui sont actuellement en circulation. 6,9 millions de ces cartes sont destinées au paiement et au retrait émises sous les labels Visa, Mastercard et CMI. S'agissant du million de cartes restant, il s'agit de cartes privatives de retrait uniquement utilisables sur les distributeurs automatiques de la banque émettrice. L'évolution positive qu'a connu l'encours de cartes en circulation résulte de fortes progressions pour ces deux catégories de cartes. Les cartes étrangères en repli Le nombre de cartes de paiement a ainsi enregistré une augmentation de 14,5% à fin 2011 par rapport à l'année précédente, alors que le nombre des cartes privatives a quant à lui progressé de 7,9% sur l'année. À titre de comparaison, rappelons qu'en 2008, le nombre de cartes en circulation dépassait légèrement les 5 millions. Plus il y a de cartes, plus il y a de transactions enregistrées. Cela va de soi. L'augmentation du volume des transactions est donc bien sûr inévitable. C'est ainsi que le CMI a enregistré 187,5 millions d'opérations de retrait d'espèces et de paiement auprès des commerçants et e-marchands sur l'ensemble de l'année 2011. Ces transactions ont par ailleurs représenté un montant global de 160,3 MMDH, en augmentation de près de 16% par rapport à 2010. Ce sont principalement les cartes marocaines qui ont contribué à atteindre ce nombre de transactions : elles ont ainsi généré 178,3 millions d'opérations de paiement, soit 95% des transactions de retrait et paiement enregistrées sur le territoire, pour un montant total de près de 146 MMDH. De leur côté, les cartes étrangères ont été à l'origine de 9 millions d'opérations, pour un montant global de 14,4 MMDH. Alors que les cartes marocaines continuent d'enregistrer des performances à deux chiffres, qu'ils s'agissent des opérations de retrait (+16,4% en volume) ou de paiement (+22,9% en volume), l'activité des cartes étrangères, en revanche, a enregistré un léger repli. D'un côté, les opérations de retrait accusent une baisse de 4% du volume, mais de seulement 0,7% en ce qui concerne le montant total de ces retraits. C'est à croire que les touristes qui continuent de visiter le Maroc restent aussi dépensiers qu'avant. Les opérations de paiement ont d'ailleurs enregistré une baisse moins importante, avec seulement -2,5% du volume. L'activité des cartes marocaines à l'étranger, en revanche, se porte assez bien. Le nombre de paiement réalisés à l'étranger par des cartes émises au Maroc a ainsi augmenté de 53,8%. L'explication pourrait bien venir du lancement progressif des e-cards dédiées à l'e-commerce sur des sites étrangers. La hausse de la dotation touristique autorisée par l'Office des changes, désormais de 75.000 DH, a elle aussi contribué au développement des cartes touristiques. Rachida Benabdallah, DG du Centre monétique interbancaire (CMI). Les Echos quotidien : Le niveau de progression du taux de bancarisation est-il conforme à vos objectifs ? Rachida Benabdallah : Le CMI n'a pas d'objectif en termes de taux de bancarisation. Ses objectifs se calculent plutôt en termes de nombre de transactions de paiement au Maroc (pour les cartes marocaines et étrangères) puisqu'il gère l'acquisition des paiements par carte dans les commerces et sur les sites e-marchands. On peut néanmoins affirmer que l'avancement continu de la bancarisation au Maroc constitue un facteur qui favorise la progression des paiements électroniques domestiques. En effet, le nombre de cartes de paiement augmente avec le nombre de bancarisés et par conséquent, le marché local se développe, grâce notamment à l'élargissement du nombre de porteurs de cartes. Comment augmenter ce chiffre justement ? Les ouvertures d'agences bancaires ont pour conséquence le recrutement de nouveaux bancarisés. Ceci est encore plus vrai lorsque ces agences ouvrent dans de nouvelles localités, où aucune agence bancaire n'existe ou dans les quartiers périphériques des villes. De nouvelles technologies, telle que la 3D Secure utilisée en France, sont-elles prévues prochainement au Maroc ? Le taux de fraude e-commerce sur les cartes marocaines est de 0,02%. C'est dire qu'il est négligeable! Il n'est pas impératif de migrer vers ce mécanisme d'authentification pour le paiement en ligne: le dispositif actuel s'avère suffisant. Paradoxalement, le taux de fraude e-commerce sur les cartes étrangères constaté en 2011, auprès des e-marchands marocains, est de 13%, alors même que le mécanisme 3D Secure est en vigueur pour cette catégorie de cartes !