Avec de l'humour et beaucoup de dérision, Milouda Chaqiq- alias Tata Milouda- a proposé vendredi soir au Diwan de Bab Al Bahr à Casablanca une véritable leçon de vie. L'artiste de 62 ans a subjugué un public qui découvre pour la première fois son spectacle «Tata Milouda et vive la liberté !», déjà présenté en France. Tout commence par une sorte de résumé de la vie de Milouda. «Quand j'étais enfant, je voulais aller à l'école, mais malheureusement, c'était impossible puisque j'étais une fille». Pire, Milouda est confrontée à une autre injustice. Sa petite sœur est élevée par un oncle riche de Casablanca tandis qu'elle est placée dans cette même famille pour s'occuper de sa sœur et l'emmener à l'école. Les années se suivent et ne se ressemblent pas pour Milouda. À 14 ans, elle se voit mariée. Quelques années plus tard, elle devient responsable de six enfants. «Je ne pouvais pas sortir seule. Seules les femmes âgées avaient ce privilège. J'ai commencé donc à prier le grand Dieu tous les jours pour devenir vieille et pouvoir sortir», affirme-t-elle dans son spectacle présenté au Maroc grâce à l'Institut français de Casablanca et au CCME. Courageuse comme elle est, Milouda décide de mettre fin à cette situation. À 39 ans, elle quitte le Maroc pour Paris. «Avant que je n'arrive en France, je pensais que ça allait être le paradis... mais hélas, c'était trop dur». Ne sachant ni lire, ni écrire, ne parlant pas français, Milouda se voit confrontée à son destin. Femme de ménage sans papiers, elle essaie de reconstruire sa vie. Et la chance arrive ! Six mois après son arrivée à Paris, elle obtient des papiers français, divorce de son mari, suit des cours d'alphabétisation, puis fait venir une à une ses trois filles auprès d'elle. C'est à partir de là, qu'elle décide de réaliser un rêve longtemps refoulé, celui de monter sur scène. Grâce à sa volonté implacable, elle réussit à décrocher un stage dans une salle de théâtre. Puis, petit à petit, se met au slam et présente son spectacle en France. Ce parcours si atypique est raconté d'une façon très originale. Aux textes de Tata Milouda s'ajoutaient la voix sublime de l'artiste algérienne Samia Diar et les sonorités mélodieuses du violon de Mokrane Adlani. Les chants en français et en arabe appuyaient les textes de Tata Milouda, plus qu'émouvants. Milouda Chaqiq ne compte pas s'arrêter là. «J'ai contacté Jamel Debbouze qui m'a déjà donné l'occasion de me produire au Jamel Comedy Club pour voir la possibilité de faire un film sur moi. Je prépare un livre sur ma vie et j'ai commencé à apprendre l'anglais». Tata Milouda qui n'a pas cessé de rappeler tout au long du spectacle qu'il y a des femmes plus fortes qu'elle, a oublié pourtant de souligner que rares sont celles qui ont décidé de briser le silence.