La demande énergétique, cela est bien connu, est en évolution exponentielle dans les pays en développement. Le Maroc, ne dérogeant pas à cette règle, enregistre une progression annuelle de l'ordre de 8 % de la demande en énergie électrique. Cette énergie est produite à partir de plusieurs types de ressources, en l'occurence les énergies renouvelables et celles non-renouvelables. Le charbon, largement utilisé pour alimenter les centrales thermiques, fait partie de cette dernière catégorie. Au Maroc, dans le dispositif de production de l'Office national de l'électricité (ONE), cette énergie fossile constitue la deuxième plus importante source de production d'énergie électrique, juste derrière le pétrole. Mais le fait est qu'elle est aussi l'une des plus polluantes, sa combustion produisant du CO2. Un mal nécessaire ? Pas forcément. En effet, depuis 2005, il est devenu possible de rendre ce charbon «propre». Le principe est simple: isoler le CO2 contenu dans le fossile, avant sa combustion, afin de produire des rejets moins agressifs pour l'atmosphère. L'ONE, dont la production est assurée à près de 80% par des installations thermiques, a mis en gestation un important projet de centrale à charbon propre, première du genre, dans la région de Safi. D'une puissance totale installée de 1.320 MW, le projet devrait être réalisé d'ici 2012, pour produire à terme 10 milliards de KWh, en plein régime (soit 27 % de la demande globale à l'horizon 2014). En mars dernier, deux consortiums internationaux – «International Power (UK)/Nareva Holding (Maroc)» et «EDF International (France)/China Datang Corporation (Chine)» – ont d'ailleurs déjà été pré-sélectionnés pour l'éxécution de ce projet. Des ambitions claires, qui devraient apporter un grand bol d'air frais. Vraiment Propre ? Toutefois, ce charbon propre ne semble pourtant pas l'être réellement. Depuis l'invention de cette technologie d'isolation du CO2, un grand flou entoure son avenir. Après isolation, le CO2, capturé dans des conditions bien définies de pression et de concentration, est ensuite stocké dans le sous-sol afin qu'il ne pollue pas l'atmosphère. Tout cela semble bien normal. Mais une question taraude les experts internationaux en énergie fossile. «Comment et où peut-on emmaganiser tous ces millions de tonnes de CO2 ?». Rappelons que les garanties de sécuritté exigent que le CO2 soit enterré à une profondeur allant de 1.000 à 2.500 mètres sous terre, selon les normes internationales. L'autre interrogation sur laquelle butte cette solution, est d'une logique très simple. En enfouissant dans la terre ces quantités de CO2 pour éviter la pollution atmosphérique, ne peut-elle pas représenter une autre source de pollution, pour le sol cette fois ? Et bien d'autres questions qui, du coup, relativisent profondément les attributs de ce charbon dit propre. Au Maroc, c'est l'usage du charbon comme source de production électrique, qui est remis en question. «Cette ressource n'a pas d'avenir dans notre pays. Le charbon propre n'est là qu'à titre transitoire pour la période 2010, en attendant l'aboutissement des autres projets du pays dans le solaire, notamment et le gaz naturel», déclaree Moulay Abdallah Alaoui, président de la Fédération de l'energie. Cette prévision rejoint bien le rythme d'évolution de volume de charbon importé par le pays. Recuil au profit du renouvelable D'après les dernières statistiques du département de l'Energie et des mines, la part du charbon dans la facture énergétique nationale a dégringolé de près de 43 %. Entre janvier-Mai 2009 et Janvier-Mai 2010, cette valeur est allée de près 2,8 milliards de dirhams à1,5 milliard de dirhams. En termes de consommation de combustibles pour la production de l'énergie électrique, cette perte d'importance est également notée. De 232.000 tonnes en janvier-mai 2009, ce volume est passé à 159 338, soit une baisse d'un peu plus de 31%. Face à ce recul, le gaz naturel a gagné du terrain avec une progression de 26,2% en quantité consommée, entre les deux périodes étudiées. Dans la catégorie des «renouvelables», l'éolien et l'hydraulique ont égalament réalisé un bond sensible. «La stratégie énergétique s'adapte au niveau international. La maîrise de l'énergie est un souci mondial et tous les pays cherchent à se départir des ressources fossiles à fort effet polluant, pour se tourner vers des énergies plus propres», commentte Alaoui. Si on doit alors lier le destin du Maroc à celui de la planète toute entière, il faut toutefois souligner que beaucoup reste encore à parcourir dans cette voie. Jusqu'en 2030, la consommation mondiale d'énergie devrait continuer à être assurée, à 90 %, à partir des énergies fossiles. Il est certain que d'ici là, des types de ressources comme le pétrole, se raréfieront davantage, au rythme actuel d'exploitation. Mais concernant le charbon, elle est considérée comme une source d'énergie abondante, (avec 150 ans de réserves prouvées dans le monde et deux à trois fois plus avec les réserves probables), géographiquement et géopolitiquement bien répartis. L'ère du zéro charbon est donc encore bien loin. En attendant, lamise va surtout vers le solaire, l'éolien, la géothermie et l'hydraulique. Aux origines du charbon propre Les débuts du charbon propre sont encore très récents. Deux des plus grands projets précurseurs, à miser sur cette option, le «Futuregen» et le «HypoGen», ont été lancés respectivement en 2003 et 2004. Si les principes scientifiques de production sont les mêmes et que leur dénomination portent le même suffixe, leurs appartenances en sont tout à fait différentes. Le premier projet est américain, et porte sur un investissement de 1 milliard de dollars pour une période de dix ans. Quant au second projet, il est européen, et a un budget de 1,3 milliard de dollars pour la même période d'éxecution. Ces chiffres sont tirés du magazine spécialisé «Futura-Sciences», qui positionne ces deux grands projets comme des concurrents directs. FutureGen est concentré sur un seul combustible, qui est le charbon. l'avantage des Américains dans ce domaine est leur capacités technique en matière de recherches de zones de stockage. Du côté des Européens, en plus du charbon, les recherches portent également sur le gaz naturel. Un projet pilote de stockage est actuellement mis en œuvre en Norvège, dans la Mer du Nord, avec une capacité de stockage annuelle d'un million de tonnes de CO2.