Un «gisement d'opportunités» s'offre aussi bien au Maroc qu'aux pays de la CEDEAO, en cas d'adhésion du royaume. De nombreux produits pourraient s'échanger davantage, sans parler de la complémentarité entre l'économie marocaine et de celles de l'espace ouest-africain. C'est une sorte d'étude d'impact commercial sur une éventuelle adhésion du Maroc à la CEDEAO que vient de livrer la Direction des études et prévisions financières (DEPF). Dans un document succinct de 38 pages, cette direction relevant du ministère de l'Economie et des finances livre une radioscopie des échanges entre le Maroc et la CEDEAO, avec un focus sur les «opportunités par pays et par produit». Globalement, l'étude nous apprend qu'en cas de levée des barrières douanières entre le royaume et les 15 pays membres de l'espace communautaire ouest-africain, les principaux produits marocains qui en bénéficieraient seraient les articles d'habillement, les engrais, les équipements pour distribution d'électricité, les produits agroalimentaires ainsi que les véhicules automobiles. En retour, «le Maroc pourrait constituer un marché porteur pour plusieurs produits originaires de la CEDEAO» comme les produits énergétiques (pétrole et gaz), les produits alimentaires (cacao, café, graines et fruit oléagineux...), le coton, le bois et produits de bois, en plus des cuirs et des minéraux. Les pays porteurs Quant aux principaux pays avec lesquels le Maroc pourrait considérablement booster ses échanges, il s'agit, selon l'étude, du Nigeria, de la Côte d'Ivoire, du Ghana et du Sénégal. Ces pays ont, selon le document de la DEPF, «un potentiel de complémentarité» avec le Maroc. Pour le Nigeria par exemple, poids lourds de la CEDEAO, les opérateurs marocains pourront miser sur les articles d'habillement et chaussures, essentiellement importés par ce pays depuis la Chine et l'Inde. Cela, d'autant plus que «le Maroc est absent du marché nigérian et ses exportations subissent des droits de douane assez élevés», note l'étude. Celle-ci rappelle que les échanges commerciaux entre cette puissance économique et démographique africaine et le Maroc se sont établis à 1,7 MMDH en 2016, soit à peine 0,3% du total des échanges du royaume. Contraintes L'étude de la DEPF, qui chiffre le volume des échanges Maroc-CEDEAO à 10,3 MMDH en 2017, note que le dynamisme commercial entre les deux parties «s'avère en deçà du potentiel mobilisable, au vu du caractère plutôt complémentaire que concurrentiel des profils de spécialisation de part et d'autre». Si l'impact de la suppression des tarifs douaniers est susceptible d'impulser potentiellement les échanges entre le Maroc et la CEDEAO, «il n'en demeure pas moins vrai que ces tarifs ne constituent que la partie apparente de l'iceberg», indique le ministère de la DEPF. Celle-ci note que d'autres contraintes structurelles devraient être levées pour libérer le potentiel du commerce entre les deux parties. Il s'agit, entre autres, des questions liées à l'insertion dans les chaînes de valeur régionales, à la compétitivité logistique et à l'intensité de la concurrence qui se déploie au sein des marchés de cette zone. Notamment celle émanant de pays émergents réputés pour leur compétitivité-coût imbattable. L'Inde et la Chine, principaux partenaires de la CEDEAO Cela peut en surprendre plus d'un, mais c'est avec les puissances asiatiques que les pays membres de la CEDEAO échangent le plus. En effet, selon le constat de la DEPF, l'Inde est devenue la première destination des exportations de la CEDEAO avec une part de 17% en 2016, suivie des Etats-Unis (7%), de la Suisse (7%), de la France (7%), de l'Afrique du Sud (6%) et des Pays-Bas (6%). Quant aux importations de la CEDEAO, elles proviennent essentiellement de Chine, devenue le premier fournisseur de la communauté avec une part de 23% en 2016, suivie des Etats-Unis (8%), de la Belgique (7%), de la France (6%), des Pays-Bas (6%), de l'Inde (5%) et du Royaume-Uni (4%). «La prééminence des pays émergents comme source et destination des échanges extérieurs de la CEDEAO reflète un basculement de la grille des partenariats de cette zone au détriment des puissances traditionnelles qui ont accusé des pertes significatives de parts de marché au sein de la CEDEAO», note la DEPF. Autant dire que si le Maroc intègre la communauté, le grand défi sera de grignoter, autant que possible, les parts de marché de ces puissances.