L'Afrique reçoit à peine 7,6% des exportations marocaines malgré un énorme potentiel    La Bourse de Casablanca clôture en hausse    Le Général de Corps d'Armée, Inspecteur Général des FAR et Commandant la Zone Sud reçoit le Conseiller de SA l'Emir du Qatar aux affaires de défense    Le ministère de l'Intérieur planche sur des irrégularités liées aux travailleurs occasionnels dans les communes    Guerguerat : mise en échec d'une tentative de trafic de 3,5 tonnes de drogue    Migration : L'Algérie remet au Maroc 60 détenus    Rabat et Nouakchott déterminés à renforcer la coopération dans le domaine de la pêche    Politiques publiques : une année de transformation et d'accélération des réformes    Maroc : Une croissance économique de 4,3% au T3-2024 (HCP)    Après la chute de Bachar, des entretiens entre Bourita et son homologue syrien    Burkina Faso. Amnistie pour les auteurs du putsch de 2015    Le Maroc envisage de reprendre ses liaisons aériennes avec la Libye    Maroc : Les médecins pour la Palestine appellent à une action internationale à Gaza    Maghreb sans le Maroc : L'Algérie n'intègre pas la Mauritanie dans ses plans 2025    Imtilak : 200.000 dirhams à 0% au profit de la famille de l'enseignement    Safi : OCP Group signs 2 billion dirham deal with China's ZPMC    Moroccan YouTuber «Houyam Star» jailed for 4 years, channel closed    Le Festival du livre africain de Marrakech revient pour sa 3e édition    Classement : les Marocains parmi les Africains les plus influents de 2024    La 30ème édition du SIEL du 17 au 27 avril 2025 à Rabat    Antonio Guterres appelle les pays à réduire drastiquement leurs émissions à effet de serre en 2025    La malnutrition infantile, un problème critique en Afrique du Sud    Crash d'avion de Jeju Air: la Corée enquête sur la conformité du mur de béton de l'aéroport de Muan    Guerre en Ukraine : Moscou salue la position "équilibrée" du Maroc (Ambassadeur russe)    Un héritage sportif en construction pour 2025 et 2030    Espagne: La justice rejette la demande du FC Barcelone d'enregistrer Dani Olmo    ATP : victoire de Djokovic pour son 1er match de la saison à Brisbane    Basket. DEX(h) / J10: le FUS termine l'année 2024 sur la première marche du podium    Botola D2/J11: Le RAC, victorieux de Benguérir, rejoint le RBM et l'USYM en tête    PL : Mezraoui et coéquipiers terminent l'an 2024 14es !    Leicester City : Pep Guardiola impressionné par le talent de Bilal El Khannouss    Zouhair Feddal ambitionne de poursuivre une carrière d'entraîneur    Nadia Fettah détaille les réformes du secteur non structuré et des entreprises publiques    Appel à manifestation d'intérêt pour la mise en œuvre du programme «JobInTech»    Fin de la période de régularisation fiscale volontaire au Maroc : des enjeux financiers et des préoccupations    Rougeole : Plus de 100 décès au Maroc depuis octobre 2023    Le temps qu'il fera ce mardi 31 décembre 2024    Les températures attendues ce mardi 31 décembre 2024    Une nouvelle : De là-haut, il veille sur eux, le grand-père.    2024 : Avancée historique    Croissance économique au troisième trimestre 2024 : un dynamisme contrasté    Echanges extérieurs : principaux points du bulletin mensuel de l'Office des changes    Plus de 50 000 artisans formés entre 2022 et 2024, selon Lahcen Saadi    En 2024, la culture et l'art ont tenu leurs promesses    La réalité continue de secouer le gouvernement : au Maroc, deux tiers des chômeurs sans diplôme    Le 30è SIEL du 17 au 27 avril 2025 à Rabat    Le Festival de Charjah célèbre le patrimoine littéraire africain    Décès du chanteur populaire égyptien Ahmed Adawiya    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



«Il y a une mémoire partagée par les musulmans et les juifs du Maroc»
Publié dans Les ECO le 02 - 02 - 2017


Mohammed Kenbib, Historien
Suite à la publication de son livre intitulé «Juifs et musulmans au Maroc», dans lequel il raconte la cohabitation harmonieuse plus que bimillénaire des deux confessions au Maroc, le Pr. Mohammed Kenbib dévoile quelques éléments de cette histoire partagée.
Les ECO : Quelles sont aujourd'hui les «traces» concrètes ou symboliques de la présence juive au Maroc ?
Mohammed Kenbib : Les traces matérielles et immatérielles liées à l'histoire des communautés juives du Maroc et à leurs relations avec les autres populations sont indissociables de l'ancienneté de leur enracinement dans le pays et des apports multiformes qui ont été les leurs à travers les siècles.
Que peut-on dire des principales composantes de ces communautés ?
Il convient de rappeler d'emblée que les premiers noyaux dits des Tochabim ou Beldiyyine (gens du pays) remontent au Ve siècle avant l'ère chrétienne et que le second groupe, dit des Méghorashim (chassés de la péninsule ibérique), s'y est réfugié en 1492 après la promulgation du décret d'expulsion scellé par les rois catholiques. D'autres éléments juifs sont arrivés ici aux XVIe et XVIIe siècles. Il s'agit des Marranes, c'est-à-dire des Juifs qui ont fait mine de se convertir au catholicisme en Espagne et au Portugal. En se réfugiant au Maroc, ils avaient le loisir de retourner à la pratique ouverte de leur religion.
Comment se fait la promotion du patrimoine juif du Maroc ?
Les notions de patrimoine sont à la fois précises et extensibles. Si l'on s'en tient à l'acception classique du patrimoine, on peut s'en faire une idée en visitant le Musée du judaïsme marocain à Casablanca, institution unique en son genre dans le monde arabe. Y sont exposés divers objets et matériaux montrant ce qu'était (et ce qu'est) la «vie juive» au Maroc en termes, par exemple, de rituels religieux, de tenue vestimentaire, d'alimentation, d'éducation, d'instruments de musique, etc. Le patrimoine bâti (ou architectural) inclut en particulier les synagogues, les anciens quartiers (dits mellahs) habités par les juifs, les demeures de marchands opulents, les anciennes écoles de l'Alliance israélite universelle, le siège des associations de bienfaisance, les maisons de retraite, etc. Les cimetières font partie intégrante de ce patrimoine. Tout récemment, le roi Mohammed VI a redonné à l'ancien quartier juif de Marrakech son ancien nom (mellah). En 2013, le message lu au nom du souverain par le chef de gouvernement lors de l'inauguration à Fès de la synagogue restaurée dite Slat al Fassiyine demeure d'une grande portée... Sur le même registre, il faudrait mentionner le rôle des juifs dans la préservation et la promotion de la musique andalouse.
Les juifs marocains établis hors du Maroc conservent-ils un intérêt pour ce patrimoine ?
En sus de ce qui vient d'être dit à propos de la musique andalouse, si l'on reste dans le symbolique et le religieux ou plus exactement ce qui relève de la religiosité populaire, il serait possible de dire que les hilloulot, par exemple, constituent l'un des signes de l'attachement à ce patrimoine. Il s'agit dans le cas d'espèce de pèlerinages et de célébrations autour de tombeaux réels ou supposés de saints. Un tel phénomène existe depuis fort longtemps et se traduit, y compris aujourd'hui, par des manifestations périodiques à la fois religieuses et festives. À l'instar des moussems musulmans, les hilloulot sont l'une des expressions de la religiosité populaire. Signalons au passage qu'il y avait des saints vénérés à la fois par les juifs et les musulmans. Pour les juifs du Maroc établis ailleurs dans le monde, ces festivals sont l'un des moyens de garder des liens avec la terre natale, de se ressourcer autour de symboles forts de leur judéité et de préserver la composante marocaine de leur identité.
Que peut-on dire à propos de la mémoire ?
En dépit des aléas de l'histoire, il y a effectivement une mémoire partagée entre musulmans et juifs de ce pays. La gratitude à l'égard du roi Mohammed V, qui s'est opposé à l'application des lois raciales de Vichy à ses sujets juifs pendant la deuxième guerre mondiale, en est l'une des composantes essentielles. Elle s'est traduite par le Prix Martin Luther King pour la liberté décerné à titre posthume au souverain défunt et remis à sa petite fille, la princesse Lalla Hasnae, dans une grande synagogue de New York en décembre 2015. Il convient d'ajouter à ces faits le principe d'allégeance perpétuelle sur lequel se fonde le Code de la nationalité marocaine ainsi que la référence dans le préambule de la Constitution de juillet 2011 à «l'affluent hébraïque» de la civilisation marocaine. Tout cela s'inscrit dans l'attachement assumé et revendiqué à la dimension juive de l'histoire, de la culture et du patrimoine du Maroc, et serait à méditer dans un monde traversé de nos jours par toutes sortes de crispations identitaires et de tensions.
Carte de visite
Mohammed Kenbib est professeur de l'enseignement supérieur à Rabat. Docteur d'Etat de l'Université Paris I-Sorbonne, il a été professeur visiteur à la Sorbonne et Senior Associate Professor à l'Université d'Oxford. Il a également enseigné et donné des conférences aux Etats-Unis et au Canada. Ses recherches portent sur l'histoire contemporaine et le temps présent. Son ouvrage le plus récent, publié par les Editions Tallandier (France) en août dernier, a pour titre «Juifs et musulmans au Maroc. Des origines à nos jours».


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.