Le programme de la prime à la casse qui boite depuis sa mise en place vient de connaître un léger recadrage. Pour cela, le ministère de l'Equipement et des transports, en collaboration avec la Fédération nationale des transports, a décidé de remédier à ce phénomène de réticence de la part des transporteurs, à travers l'amélioration des conditions d'accès au programme. Dans ce sens, deux conventions ont été signées et un bon nombre de propositions ont été validées afin de faciliter l'opération de renouvellement de la flotte. Pour autant, tous les professionnels ne pourront pas bénéficier de ces conventions de sitôt, puisque leurs dossiers bloquent toujours au niveau du département des Finances, alors que le délai de validation a été initiallement fixé à un mois. Une source au sein du ministère nous explique que ce retard est dû «essentiellement à la révision à la hausse du montant de la prime à la casse. Cette nouvelle fourchette de prix nécessite que les dossiers déposés depuis 2010 soient refaits pour repasser dans le circuit de validation du ministère». Ces mêmes sources expliquent tout de même que la situation doit en principe être débloquée dans les prochains jours. En substance, le nouveau programme, pour lequel le ministère a prévu une enveloppe de 170 MDH, apporte un lot d'incitations pour pousser les professionnels à renouveler leur flotte. La première décision prise dans ce sens est l'augmentation du montant de la prime versée de 25.000 DH pour toutes les catégories de véhicules. Aussi, dans le cadre de cette nouvelle tranche du programme, la prime à la casse ne va pas se limiter aux véhicules dont l'âge est inférieur à 15 ans, pour concerner les véhicules exploités durant 20 ans. Ce n'est pas tout ! Le transporteur aura également la possibilité de joindre deux véhicules pour un seul en contrepartie. Et en cas de changement du statut juridique de la société, de personne physique en personne morale, le transporteur garde la même durée d'ancienneté du véhicule et bénéficiera d'une exonération de la TVA sur l'achat du véhicule durant cinq ans. Enfin, dans le but de rendre le programme plus attrayant, la fédération milite pour obtenir une exonération totale de la TVA lors du renouvellement du parc. «Nous sommes toujours en phase de négociation avec le ministère des Finances, et Mezouar nous a promis une rencontre dans les semaines à venir pour débattre de ce point, mais si l'exonération est accordée, elle ne sera appliquée qu'à partir de l'exercice 2012», nous confie Mohamed Metali, secrétaire général de la Fédération nationale des transports. Pour réussir cette version 2011 du programme de la prime à la casse, une série d'accords de partenariat ont été scellés avec les opérateurs. De prime abord, «le ministère de tutelle a signé un partenariat avec Carrosserie industrielle du Maroc, qui habille tous types de châssis, Volvo, Renault, DAF, Mitsubishi et Mercedes», nous informe Mohamed Metali. Notons que le partenariat conclu lors de la première tranche du programme avec le constructeur Riad Motors Holding, spécialisé dans le montage de véhicules utilitaires et de camions chinois, a été pointé du doigt car n'apportant pas de solutions fiables. Mise à part la fiabilité des véhicules, la nouveauté qu'apporte ce partenariat consiste en l'engagement de Carrosserie industrielle du Maroc de livrer lesdits véhicules juste après réception de l'attestation du «véhicule hors-circuit» (une attestation que l'on transmet au ministère des Finances pour encaissement du montant de la prime à la casse), et le certificat d'éligibilité délivré par la banque. Egalement, les constructeurs se sont engagés à ne pas procéder à la saisie des véhicules en cas de non paiement des traites sans avoir l'autorisation du ministère. Au niveau du financement des crédits, le ministère de tutelle a signé une convention avec la Société Générale, qui s'est engagée à accorder les crédits avec un taux préférentiel de 6% au lieu de 8%, ainsi que de donner une réponse dans les 24 heures qui suivent le dépôt du dossier. Sur le marché, toutefois, les avis sont quelque peu partagés sur l'impact attendu de ces incitations. «C'est le marché qui pourra pousser les entreprises à renouveler leur parc de véhicules, et non pas les nouvelles incitations», s'alarme un chef d'entreprise de transport. Un avis que partage Abderrahim Chenaoui, en expliquant que «les gens ne sont plus intéressés par ce programme de renouvellement». Il enchaîne : «le marché est restreint, et la concurrence est rude. Actuellement, les champions nationaux exercent un monopole de fait sur le marché. Bien qu'ils aient des structures organisées et des moyens financiers solides, ces derniers bénéficient également d'un appui de la part de l'Etat». Cela veut dire que l'investissement dans une nouvelle flotte ne sera pas rentable, notamment pour les petits opérateurs. À noter que ce secteur est constitué majoritairement (à 90%) d'entreprises familiales et embryonnaires. Du coup, il sera difficile pour eux d'honorer leurs engagements financiers. De plus, la plupart de cette population n'a pas la culture du crédit. Dans ce sens, Abderrahim Chenaoui déplore que «l'Etat compte sur la mise à niveau du secteur, avant de lancer un tel chantier». Faut-il rappeler que le programme de renouvellement du parc de transport routier de marchandises, à la base, s'est vu consacrer une enveloppe globale de 510 millions de DH répartie sur trois tranches par le ministère de tutelle. Ce programme n'a pas séduit grand monde depuis son instauration, car ses avantages étaient très limités. Au-delà du plafond de l'enveloppe consenti aux opérateurs, en effet, ces derniers lui reprochaient notamment de ne pas régler le problème de l'accès au financement bancaire pour les professionnels. Parmi les 2.100 véhicules prévus, seuls 600 ont été renouvelés entre 2008 et 2010. Actuellement, «nous n'avons pas un pourcentage d'adhésion qui nous permettra de dire que l'expérience à réussi», déclare Abderrahim Chenaoui, secrétaire général de la Fédération nationale des transports sur routes et dans les ports.