Quels que soient les choix adoptés, il faut définir ce que l'entreprise attend de la croissance. Il est clair que les grandes entreprises sont les plus impactées par les effets négatifs d'une mauvaise gestion des parties prenantes. Cependant, les PME ont davantage de possibilités de profiter des opportunités offertes par les parties prenantes, et ce grâce à leur rapidité de réaction et à leur mode opératoire entrepreneurial. Les entreprises doivent souvent faire face à une question majeure qui se pose dès que la phase d'entrepreneuriat aboutit à un business model stable, générant des revenus réguliers: celle consistant à définir et réussir des plans de croissance (scale up) assurant la pérennité du business sur les moyen et long termes. Dès lors, les quatre cadrants (produits existants, nouveaux produits, clients existants, nouveaux clients) de la matrice d'Ansoff offrent différentes possibilités: pénétration de marché, développement de marché, développement de produit et diversification. Quel(s) que soi(en)t le(s) choix adopté(s) parmi ces scénarios, il faut définir ce que l'entreprise attend de la croissance . En effet, la définition de la croissance est souvent synonyme de valeur pour les actionnaires (stockholders/shareholders). Ceci est le cas depuis que Milton Friedman (1970) a exclusivement associé la croissance aux profits que l'entreprise peut apporter aux actionnaires. Cependant, cette définition a atteint ses limites depuis que les notions de développement durable ou éthique et de responsabilité sociale de l'entreprise se sont développées aux Etats-Unis, avec la prise de conscience du fait que la pérennité du business ne peut se faire sans intégration des parties prenantes qui ont des intérêts directs ou indirects dans la réussite de l'entreprise, à savoir les dirigeants, les employés, les syndicats, les investisseurs, les clients, les fournisseurs, les ONG et les collectivités locales. Cette prise de conscience a été formalisée par les travaux d'Edward Freeman (1984) qui est le fondateur de la théorie des parties prenantes. Il est clair que les grandes entreprises sont les plus impactées par les effets négatifs d'une mauvaise gestion des parties prenantes. Cependant, les PME ont la possibilité de profiter des opportunités offertes par les parties prenantes, et ce grâce à leur rapidité à réagir et leur mode opératoire entrepreneurial. Au-delà de l'intégration des parties prenantes dans le plan de croissance, le management doit savoir qu'il est extrêmement difficile de mesurer les objectifs à atteindre par chaque partie. La source de cette ambiguïté est, souvent, constituée par les agendas cachés des porte-paroles de ces parties ou le lobbying que des parties tierces peuvent effectuer afin d'atteindre des objectifs cachés. Combien de fois vous êtes-vous retrouvés devant un marché avec une réglementation qui pénalise vos produits à cause d'une caractéristique technique ou fonctionnelle, alors qu'un des concurrents dispose de cette même caractéristique? Combien de fois des sittings d'employés se sont transformés en boycotts, causés par une information émise par la presse au mauvais moment? Il s'agit de manifestations que les parties prenantes font sous l'influence des uns et des autres pour atteindre des objectifs que ne sont pas toujours identifiables au préalable. Dans ces cas, seules les compétences de négociation du management de l'entreprise peuvent faire la différence en détectant les vrais pouvoirs au sein des différentes parties prenantes. Les pouvoirs ne sont pas ceux que les organigrammes définissent au sens hiérarchique, mais plutôt le flux de la prise de décision telle que nous pourrons la saisir, de par nos qualités relationnelles. La gestion des parties prenantes n'est pas uniquement de la responsabilité du top management: elle constitue aussi un vrai challenge pour les middle managers et les directeurs de projets et de programmes. Farid Yandouz General Manager iCompétences Les changements émergents émanent d'une réflexion collective ou individuelle dans l'écosystème des parties prenantes de l'entreprise, et non ceux dont on connaît déjà l'issue ou le résultat. Ces changements sont les plus critiques et les plus dangereux pour la survie et la pérennité des organisations, étant par définition, inconnus et imprévisibles, provoquant une marge de manœuvre très réduite, si ce n'est inexistante. Les parties prenantes créent et développent les changements émergents. La criticité de ces changements est importante à appréhender car elle mérite une vraie transformation, radicale, de la vision et des business process de l'entreprise. Un exemple de changement émergent auquel les entreprises se sont adaptées est celui de l'utilisation des médias sociaux ou des tablettes par les employés et les clients. Initialement, les entreprises ignoraient purement et simplement ces outils/plateformes qui relevaient, selon leurs interprétations, seulement dans la sphère privée. Cependant, ces plateformes ont transformé le comportement des employés et des clients en générant et en renforçant des interactions sociales et professionnelles, tout en engendrant la constitution de communautés et de groupes de pressions qui sortent du périmètre de contrôle ou de veille des entreprises. Par la suite, et avec beaucoup de retard, les entreprises ont commencé à se rattraper, s'adaptant à ce changement émergent, avec des démarches de gestion de leur réputation digitale.