Que la CAN 2015 se tienne au Maroc ou non, le coup sera dur pour le secteur du tourisme. Il s'agit de l'un des secteurs les plus affectés par l'épidémie d'Ebola. En attendant la décision du Maroc, puis de la Confédération africaine de football, concernant le report ou le maintien de la CAN 2015 à sa date, il est assez évident qu'au vu des différents scénarios qui se profilent, le coup sera d'emblée assez dur pour l'industrie du tourisme. Ce secteur est en effet l'un des premiers à être véritablement affectés par l'épidémie qui a déjà eu raison de plusieurs grandes manifestations d'envergure sur le continent. La Banque mondiale et le FMI ont, dans des rapports distincts publiés récemment, anticipé sur les conséquences de la maladie au-delà de l'impact humanitaire et sanitaire. La propagation de la maladie s'accompagne de conséquences socio-économiques assez importantes. Ainsi, au Sénégal où un seul cas a été enregistré et la maladie circonscrite, l'épidémie a coûté près d'1 milliard de FCFA, rien que pour le secteur touristique. L'impact financier d'Ebola croît sous l'effet de coûts directs et indirects, a ainsi estimé la Banque mondiale qui ajoute à cela les coûts plus élevés des activités économiques dans chacun des pays, mais aussi des échanges entre ces pays. De ce fait, les «comportements de psychose» et la peur de contracter le virus Ebola privent à eux seuls beaucoup d'entreprises de leur main-d'œuvre, perturbent les transports et conduisent les ressortissants des pays touchés par l'épidémie à limiter leurs voyages. De même, plusieurs pays imposent des restrictions pour leurs voyageurs de manière à éviter les «zones à risques», c'est-à-dire où la probabilité de contracter la maladie est plus probante. Plusieurs agences de voyages ont ainsi confirmé le report ou l'annulation des réservations des touristes vers les pays à risques. Avec la CAN, et les prévisions des supporters en provenance de ces pays, les risques seront assez amplifiés au Maroc dans l'éventualité où la CAN serait maintenue aux dates souhaitées par la CAF. En plus du secteur du transport, celui de l'hôtellerie sera également impacté ainsi que, dans une moindre mesure, l'artisanat. «Durant l'évènement, ce ne sont pas seulement les touristes en provenance des pays africains qualifiés ou pas que nous attendons, mais aussi d'Europe ou du Moyen-Orient», témoigne cet opérateur touristique. Les inquiétudes sont déjà palpables auprès des professionnels de toute la chaîne impliquée dans l'évènement. Bref, avec cette épidémie d'Ebola, le manque à gagner pour le Maroc, pays organisateur de la CAN 2015 sera assez important pour les opérateurs avec comme pire scénario, l'annulation de l'évènement. Maintenant, tout reste entre les mains des officiels, dont la position sur ce dossier était vivement attendue, mardi en fin de journée, puisque les médias étaient conviés à une conférence de presse donnée par le ministre de la Jeunesse et des sports, Mohammed Ouzzine, et son collègue de la Santé, Lhaussain Louardi. À l'heure où nous mettions sous presse, rien ne filtrait encore sur ce que les deux responsables ministériels s'apprêtaient à «annoncer». À suivre... La fête est déjà gâchée ! La décision de la CAF pèsera beaucoup sur le déroulement de l'événement. De toute façon, la fête ne sera pas au rendez-vous, sauf pour la CAF... La Confédération africaine de football (CAF) a donc décidé de refiler au Maroc, la patate chaude de la décision d'abriter....ou non, l'édition 2015 de la Coupe d'Afrique des Nations de football (CAN), qui devrait se tenir du 17 janvier au 8 février prochains. La demande des autorités marocaines de reporter cet évènement à une date ultérieure en raison de l'épidémie Ebola a reçu une fin de non-recevoir auprès du comité exécutif de la CAF, qui tient coûte que coûte à organiser les éliminatoires aux dates prévues. À travers la décision de la CAF du lundi dernier, il apparaît que l'organisation continentale se penchera sur un plan B, au cas où le Maroc maintiendrait sa demande de report. L'essentiel pour Issa Hayatou et Cie est que l'évènement soit organisé avec comme principale base d'argumentaires, «l'obligation de respecter le calendrier international tel qu'élaboré par la FIFA» ainsi que «tout changement dans le chronogramme des compétitions se ferait au détriment du reste de l'agenda de la Confédération». Autant dire que, pour la CAF, c'est l'aspect commercial qui a davantage prévalu que les défis sanitaires. C'est pour cette raison, que la CAF n'a pas manqué de souligner dans son communiqué que «depuis sa création, la capacité de la CAF à respecter ses engagements et tenir à temps ses compétitions lui a permis de maintenir une relation saine et de confiance avec ses associations nationales, leurs autorités, le public, les partenaires commerciaux et toutes les autres organisations sportives internationales». Ainsi, la CAF confirme le maintien de la compétition aux dates initiales, tout en demandant à la Fédération royale marocaine de football de préciser la position définitive du Maroc au plus tard le 8 novembre. L'ultimatum donné au Maroc est considéré par la CAF comme un autre délai donné aux autres associations nationales de manifester leur intérêt pour une candidature à l'organisation de la compétition aux dates arrêtées. Le suspense continue donc et l'appel à manifestation d'intérêt de la CAF indique clairement que celle-ci n'a pas encore son plan B, les pays ne se bousculant pas au portillon pour remplacer le Maroc pour l'édition 2015 sur fond de risque d'épidémie. Scénarios Le Maroc a aujourd'hui jusqu'au 8 novembre pour se décider et la réponse des autorités du royaume sera entérinée par une nouvelle réunion du Comité exécutif de la CAF, le 11 novembre au Caire afin de «prendre les décisions qui s'imposent». Le royaume n'aura que deux choix, soit d'accepter l'organisation de la CAN aux dates prévues, soit de décliner l'organisation de l'évènement. La décision appartient aux plus hautes autorités du pays qui ne manquent pourtant pas d'arguments pour un report de la CAN au vu des risques que fait planer Ebola. Pour le Maroc et la CAF, les enjeux ne s'apprécient pas de la même manière. Le gouvernement doit pour ce faire, peser le pour et le contre de sa décision et pourrait s'appuyer sur des recommandations de l'Organisation mondiale de la santé dont la sollicitation est plus que nécessaire. C'est au Maroc de juger de sa capacité à contenir tout risque de propagation infiltration et de propagation du virus. Le choix ne sera pas facile, même dans le cas où les prévisions en la matière ne sont guerres rassurantes. Les chiffres peu fiables de la CAF Dans son argumentaire, le Comité exécutif de la CAF estime que le nombre de supporters étrangers attendus dans les stades pour la Coupe du monde des clubs 2014, qu'accueillera le Maroc en décembre prochain, est largement supérieur à celui attendu pour la CAN Orange 2015. En outre, avance la CAF, la quasi-totalité des supporters pour la CAN Orange sont résidents au Maroc, et considérant le pouvoir d'achat moyen dans l'essentiel des pays africains, «il est illusoire d'attendre plus de 1.000 personnes venant du continent pour assister à la CAN Orange 2015». Pour la CAF donc, la gestion des flux de supporters et autres touristes ne devrait pas poser de problèmes au Maroc. Or c'est justement à ce niveau qu'il y a les plus grandes inquiétudes. Les chiffres de la CAF dont la fiabilité n'est pas attestée en dehors de véritables estimations, ne peuvent en aucun cas atténuer l'ampleur des risques.