Une rupture de carrière est toujours difficile à vivre....surtout quand rebondir prend beaucoup de temps. Pour ne pas totalement décrocher, le bon réflexe consiste à trouver en un temps record une voie alternative pour rester en contact avec l'univers professionnel. Habituellement, les personnes dans une situation pareille pensent aux contrats de freelance. C'est un bon moyen, si l'objectif est de découvrir l'entrepreneur qui est en vous, pour pouvoir le moment venu monter votre boîte en bonne et due forme. Autrement cette voie, peut vous entraîner dans des tracas administratifs peu enviables (patentes, facturations, chasse aux mauvais payeurs...). L'option de rester à attendre de longues journées dans l'espoir de décrocher à nouveau un poste stable avec un contrat CDI, n'est pas non plus souhaitable. Il existe cependant une troisième option pouvant permettre de supporter de façon plus ou moins aisée cette phase transitoire: c'est l'intérim cadre. Ordinairement, le métier est associé aux personnes peu qualifiées, mais aujourd'hui les choses commencent à changer. Il existe dans plusieurs secteurs, au niveau des grandes comme des petites structures de plus en plus de besoins d'intérim pour le middle management. Certes, c'est un créneau encore embryonnaire, mais qui selon les professionnels du marché, est appelé à connaître un développement intéressant. Win-win Lorsqu'elle est conclue et exécutée dans les règles de l'art, la prestation bénéficie à la fois à l'entreprise et au cadre intérimaire. À l'entreprise, elle permet de faire face avec un coût moins élevé (l'intérim étant généralement moins cher que le consulting) à un manque ponctuel de compétences. Elle gagne ainsi en flexibilité et pallie les dysfonctionnements que peuvent engendrer les pics d'activité, les départs en congé ou des urgences particulières (pression sur les collaborateurs, stress, manque de temps, chute de la qualité). Pour le cadre, c'est une option idoine pour se prémunir contre les trous de CV, l'érosion de compétences qui accompagnent inévitablement les situations de chômage prolongé, et aussi contre la dépression que peut causer la perte de revenu régulier. L'option intérim est également intéressante, dans la mesure où elle peut servir de «terrain» favorable à la conclusion d'un contrat CDI. Opportunités La demande en intérim des cadres est exprimée par les grandes entreprises, en majorité les multinationales, en implantation ou pour un projet spécifique, explique Salma Khairane, la responsable marketing et communication de Manpower. Celles-ci opèrent généralement dans le tertiaire (services, informatique), l'énergie et l'industrie (plutôt automobile), et dans une moindre mesure, le bâtiment, soulignent les professionnels du marché. Mais c'est surtout dans les IT (ingénierie et offshoring) que la demande est florissante. Selon Salma Khairane, cela se justifie par le fait que ces nouvelles filières travaillent essentiellement en mode projet et sont déjà imprégnées de la logique de l'externalisation. Les PME en développement ayant un management ouvert, commencent elles aussi, à s'intéresser au recrutement de cadres intérimaires, surtout lorsqu'il s'agit de faire face à des pics d'activité, notamment en fin d'année. S'agissant des types de profils recherchés, ceux-ci, couvrent l'ensemble des fonctions de l'entreprise, avec une légère prédominance des fonctions d'ingénierie, de logistique, les fonctions administratives, notamment dans la finance et dans le contrôle de gestion, et aussi des postes RH lors des recrutements de masse ou des réorganisations. Toutefois, pour Salma Khairane, le candidat idéal pour un poste de cadre en intérim doit être avant tout un «expert», qui arrive facilement à comprendre la mission qui lui est confiée, à s'intégrer et à agir avec efficacité. Le savoir-être est également d'une importance capitale et les entreprises expriment des exigences élevées en termes d'adaptabilité et de communication, surtout lorsqu'il y a des équipes à gérer. Pour réussir, le candidat doit donc faire preuve de davantage de flexibilité, de disponibilité et de réactivité. La mobilité géographique est aussi un critère souvent considéré. Contrastes Toutefois, ce nouveau segment qui émerge n'est pas lui aussi épargné par la mauvaise image dont souffre le métier de l'intérim. À ce propos, Patrick Cohen, directeur général de CRIT explique, que même si la demande est latente, la satisfaire demeure toujours difficile. Les attitudes vis-à-vis de l'intérim sont diverses, mais généralement marquées de méfiance et de mépris, aussi bien chez les cadres qu'au niveau des entreprises où le besoin est manifeste. Dans certains cas, lorsqu'une situation nécessitant un recours à l'intérim se crée dans l'entreprise (départ en congé, mission, nouveau projet...), les dirigeants préfèrent répartir les tâches entre leurs middle managers, quitte à les surcharger de travail. D'autres plus favorables, répartissent seulement les tâches stratégiques entre leurs cadres (pour des raisons de confidentialité) et font à appel à l'intérim seulement pour des tâches subalternes. Il existe une autre catégorie d'entreprise (notamment dans le secteur financier) qui recrute des intérims cadres et opérationnels, mais le fait dans la plus grande discrétion, toujours pour des questions d'image. Ce qui fait dire à Patrick Cohen, que les entreprises qui ont une attitude véritablement positive vis-à-vis de l'intérim sont celles qui arrivent à une certaine maturité dans leur management. Du côté des compétences RH potentiellement candidates à l'intérim, on retrouve également les mêmes comportements. Mais la mauvaise réputation qui colle au métier se justifie dans une large mesure. L'intérim peine à se débarrasser de son côté précaire et opaque. De l'avis même des professionnels du marché, parmi les quelques 120 sociétés d'intérim recensées et référencées au Maroc, rares sont celles qui font preuve de transparence et de rigueur dans la gestion des compétences intérimaires. Cependant, des améliorations sont attendues, surtout grâce aux travaux récemment menés entre le ministère de l'Emploi et la commission tripartite où des engagements fermes ont été pris par la partie gouvernementale pour faire respecter la législation du travail dans le secteur du travail temporaire. Outre cet aspect, les déficits ponctuels de ressources humaines liés aux pics d'activité et le turn over grandissant (du fait du zapping) sont sans doute des facteurs susceptibles de booster la demande. Reste aux acteurs du secteur d'être plus professionnels pour rassurer et attirer les candidats. Salma Khairane : Responsable Marketing , Communication Manpower Maroc Au Maroc, du fait de la spécificité des profils et de leur rareté, la chasse de tête reste le premier moyen de recrutement des cadres en intérim, ce qui n'exclut pas les moyens classiques comme l'annonce, le vivier des cabinets...mais avec des approches plus ciblées. Les délais de recherche sont très courts et il faudrait une analyse encore plus poussée sur le besoin précis de l'entreprise en amont et sur l'expertise du candidat et sa capacité à remplir les fonctions pendant une durée déterminée, puisqu'il n'y a pas de période d'essai. La rémunération de la prestation d'intérim est faite sur la base d'un pourcentage calculé sur le salaire brut du candidat détaché. Le coût dépend alors du salaire et du profil demandé. L'intérim permet à l'entreprise d'avoir une réelle flexibilité et de l'efficience en ayant la bonne personne au bon poste et juste pour la bonne période. Les relations employeur–employé deviennent plus aisées et axées sur les résultats, car la mission se déroule sur une période limitée. Les missions d'intérim permettent aussi de détecter les talents, puisque certaines débouchent sur un CDI. Pour le cadre en phase de transition de carrière, c'est un bon moyen de repositionnement. Cela lui permet de se redécouvrir et d'apprendre, ou de prendre du recul pour mieux se repositionner sur son projet professionnel.