A travers des activités ludiques et engageantes, cette recette indienne fait déjà ses preuves auprès des écoliers. Reportage au sein d'une école à Tamesna. Apprendre une table de multiplication tout en jouant à la marelle, c'est un peu la méthode TARL (Teaching at the right level), appliquée depuis le début d'année dans quelque 200 écoles nationales du primaire. Son principe est simple : accélérer les acquisitions des compétences fondamentales de base (lire, écrire et faire des calculs) par les élèves à travers des activités fun, ludiques et engageantes. L'approche séduit les enseignants mais encore plus les enfants. A quelques kilomètres de Rabat, dans la ville nouvelle de Tamesna, le groupe scolaire Okba Ibnou Nafii fait partie de ces écoles retenues pour tester la méthode indienne qui signifie littéralement ''enseigner au bon niveau''. Les enfants sont challengés sous forme de jeux d'équipe Dans la classe de français, les élèves travaillent en bonne intelligence à travers des groupes. A l'aide d'une carte mentale, ils apprennent la lecture. Au sol, des lettres ou des mots sont ainsi éparpillés et à eux de reconstituer des mots ou des phrases. Une compétition est alors engagée entre les groupes. Les enfants sont ainsi applaudis et encouragés sous le regard amusé du ministre de l'éducation nationale, Chakib Benmoussa, venu s'enquérir sur place des avancées de la méthode. L'ambiance est plus que joyeuse. Le jeu est également un outil convenable pour l'enseignement des mathématiques. Cela les aide à dénombrer correctement une quantité et de la comparer à une autre ou encore de travailler l'ordre des nombres. Apprendre en jouant Plus question maintenant pour les élèves de rester inactifs, et surtout passifs, devant les enseignements du professeur, mais d'être acteurs de leur apprentissage à travers des travaux de groupe, en cercle, au sol, en jouant aux cartes ou à la marelle. Plein d'activités ludiques sont ainsi créées dans un but pédagogique. Pour le ministre, l'introduction du TARL est le premier point d'entrée de sa réforme de l'éducation nationale. En effet, garantir les apprentissages de base a été érigé parmi les objectifs de sa feuille de route et au vu des responsables, on espère aplanir les difficultés d'apprentissage en quelques années. «A travers les activités ludiques, les élèves arrivent à mieux maîtriser les bases du calcul par exemple. Ceci dit, la réussite de ce programme tient aussi à l'engagement des enseignants et au suivi des élèves», a noté le ministre de l'éducation nationale. Il faut dire que l'enjeu est de taille quand on sait que plus de la moitié des élèves ne savent pas lire correctement ou encore faire des opérations basiques. Un dilemme pour les enseignants qui se retrouvaient souvent démunis et perdus. D'un côté, des élèves avec des niveaux différents, et de l'autre un programme pédagogique qui ne correspond pas forcément à l'apprentissage des enfants. Face à l'accumulation des lacunes d'apprentissage et au décrochage scolaire, la méthode indienne s'est alors avérée une solution idoine pour y remédier. Le processus a d'ailleurs démarré en été dernier avec la formation des inspecteurs et de quelque 600 enseignants à la méthode qui l'ont ensuite pratiquée sur le terrain en situation réelle avec les élèves. «La pédagogie par le jeu ou l'apprentissage par le jeu offre aux enfants la possibilité de s'engager activement et avec imagination avec les personnes, les objets et l'environnement. La méthode présente l'avantage d'évaluer individuellement leur niveau d'apprentissage réel. Certains élèves ont pu progresser et d'ailleurs une amélioration des notes a été constatée lors du premier trimestre de l'année», souligne, pour sa part, l'une des enseignantes de l'école Okba Ibnou Nafii. Bonnes activités pour de bons objectifs La réussite de la méthode tient également à plusieurs facteurs, à commencer par avoir des objectifs clairs et précis de pédagogie compris de tous les enseignants pour utiliser les bonnes activités aux bons objectifs de manière à mieux apprécier par la suite la progression des élèves. Après quelques mois d'exercice, l'expérience s'avère concluante jusqu'à présent. A en juger les derniers résultats du ministère, les tests réalisés ont fait preuve d'une importante évolution. Ainsi, les élèves de la quatrième année du primaire sont passés d'une performance de 10 à 61% concernant la soustraction, en l'espace de trois semaines seulement, sachant qu'ils n'avaient même pas les prérequis demandés pour entamer l'année scolaire de bon pied. Des améliorations appréciables ont été également réalisées par ces élèves en matière de lecture de la langue arabe. Le taux de maîtrise est passé de 23 à 54% à quelques jours d'intervalle. L'évolution de performance a été également constatée chez les élèves de 5e année du primaire. La maîtrise de la lecture en langue française a franchi la barre des 20%, en comparaison avec le taux initial qui ne dépassait pas les 5%. La méthode s'appliquera bientôt à 100.000 bénéficiaires, et ce, dès cette année et devrait atteindre un million d'élèves dans quelques années. Cet objectif nécessitera notamment le renforcement de l'effectif des enseignants qui seront capables d'adopter cette méthode parmi leurs techniques d'apprentissage. Ils seront bientôt 5.000 enseignants et 300 accompagnateurs à profiter d'une formation en la matière. De même qu'il est question de la mise en place des cadres référentiels, de système d'évaluation et de labellisation des établissements scolaires... Affaire à suivre.
Une méthode qui a fait ses preuves dans plusieurs pays Développée par l'ONG indienne Pratham, la méthode TARL a été appliquée dans plus de 30 pays d'Afrique, d'Asie et d'Amérique latine, avec des résultats notables. Au Maroc, la méthode a été adaptée au contexte local par le ministère en partenariat avec l'INDH et la Fondation Sanady. Basée sur la pédagogie dite active, elle permet d'améliorer la compréhension, la mémorisation et la capacité des élèves à résoudre des problèmes, mais aussi leur motivation à apprendre et à travailler en groupe. Dans un premier temps, les élèves sont évalués grâce à un outil simple. Puis, pendant 1h 30 par jour (durant une période déterminée ou tout au long de l'année), ils sont regroupés en fonction de leur niveau de compétence. Une fois en groupe, des activités et matériels adaptés à leur niveau sont utilisés. Le programme scolaire classique est abandonné pour se focaliser sur des méthodes participatives et ludiques.