Le wali de Bank Al-Maghrib (BAM), Abdellatif Jouahri, a évoqué ce mercredi à Rabat les conditions de financement de l'investissement au Maroc, à la lumière du resserrement de la politique monétaire de la banque centrale entamé en septembre dernier. «Ces derniers mois, au regard de l'accélération de l'inflation, la Banque a augmenté son taux directeur à deux reprises depuis septembre dernier. Certes, ce sont des actions de resserrement, mais il faudrait souligner que les conditions monétaires restent largement accommodantes», a fait savoir Jouahri dans son allocution à l'ouverture d'un symposium organisé par le Conseil du développement et de la solidarité (CDS), sur le thème «L'investissement et le rôle de l'Etat territorial». Il a également assuré qu'avec un taux directeur à 2,5% à fin 2022 et une inflation à 6,6% en moyenne sur l'année, les taux d'intérêt réels sont toujours négatifs. Pour assurer une meilleure transmission de ses décisions, Jouahri a souligné que BAM assure un suivi étroit à travers un ensemble d'enquêtes et de reportings réguliers, mais aussi un dialogue permanent avec le système bancaire. Ce dialogue se fait notamment à travers une réunion qu'il tient une fois par semestre avec les présidents des banques, et une rencontre tenue après chaque réunion du Conseil entre BAM et les directeurs généraux des banques. De plus, il a précisé que BAM suit les conditions de crédit à travers deux reportings trimestriels, l'un sur les taux débiteurs, l'autre sur les conditions d'offre et l'évolution de la demande, et veille à une concurrence saine entre les banques. Jouahri a révélé dans ce sens que la banque centrale est en train de finaliser avec le Groupement professionnel des banques du Maroc (GPBM) un comparateur des conditions tarifaires pour davantage de transparence.
«Changer de culture» À travers toutes ces actions, BAM essaie de pousser vers un changement de culture pour que la banque finance plutôt le projet que la personne, a-t-il fait remarquer, reconnaissant que les difficultés sont nombreuses, liées notamment à l'insuffisance de la transparence financière et la qualité de l'entrepreneuriat, en particulier pour les TPE, mais aussi à la complexité des procédures judiciaires et aux délais de recouvrement des créances. Dans ce sens, il a rappelé que le taux de ces créances qui sont en souffrance a atteint à fin décembre 8,4% globalement et 11,7% pour les entreprises privées, sachant qu'il était à des niveaux inférieurs à 5% en 2011. Dans cette optique, Jouahri a rappelé que BAM œuvre pour le rapprochement Banques/entreprises pour une meilleure compréhension des positions mutuelles. «Nous avons ainsi pris l'initiative d'organiser une première réunion tripartite BAM-CGEM-GPBM en 2016 qui a débouché sur plusieurs engagements des parties prenantes et un mémorandum adressé au Chef du gouvernement. La deuxième, tenue en 2019, a été l'occasion de dresser le bilan des actions engagées et d'examiner de nouvelles mesures pour améliorer le financement des entreprises», a-t-il rappelé. L'année dernière, BAM a également réuni le GPBM avec la Commission des finances et du développement économique au sein de la Chambre des représentants, puis avec la même Commission relevant de la Chambre des conseillers pour un dialogue qui s'est avéré encore difficile mais de moins en moins conflictuel, selon Jouahri. Il a relevé en outre que BAM contribue à l'élaboration et à la mise en œuvre des réformes visant l'approfondissement du système financier et l'amélioration de l'environnement des affaires. Il a cité à cet égard la création du registre national des sûretés mobilières, le développement de l'activité de la finance participative, la mise en place du cadre régissant le financement collaboratif (crowdfunding), la réforme de la microfinance, ou encore la création d'un marché secondaire des créances en souffrance…