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Comment le gouvernement conçoit et évalue les politiques sociales ?
Publié dans Lakome le 06 - 09 - 2011

Le lancement du site www.makassib.ma par le gouvernement a déclenché un débat sur le degré de robustesse des données chiffrées avancées, mais aussi sur la démarche suivie dans la production d'un tel bilan.
A première vue, les remarques préliminaires suivantes s'imposent :
■ Le site présente un ensemble de réalisations chiffrées par domaine stratégique sans se référer aux objectifs/résultats fixés dans la déclaration gouvernementale de 2007, ce qui fait que le lecteur n'a aucun moyen de vérifier la performance du gouvernement par rapport à ses engagements, à moins d'aller faire cette analyse soi-même si la déclaration est encore accessible ;
■ Le site n'explique pas la démarche d'appréciation utilisée, est ce une évaluation ? si oui qui l'a réalisé ? quelle est la démarche adoptée pour assurer son indépendance et impartialité selon les normes de toute évaluation qui se respecte ? si ce n'est pas une évaluation, pourquoi ne l'a-t-on pas fait sachant qu'il existe des organisations marocaines mandatées pour évaluer les politiques publiques;
■ Le site ne présente pas les difficultés rencontrées et les résultats non réalisés, et les mesures prises pour y pallier ;
■ Dans tout bilan, on s'attend également aux recommandations, ce qui reste à faire, comment le faire, etc. en se basant sur les leçons tirées et faciliter la tâche au gouvernement qui va suivre (et donc économiser l'argent publique et éviter de tout refaire à zéro).
Dernière remarque un peu subjective : à la lecture de ce bilan, on a l'impression que tout ou presque est au beau fixe, alors que la crise bat son plein dans presque tous les secteurs sociaux au regard des indicateurs publiés régulièrement par le Haut Commissariat au Plan, mais aussi le vécu des citoyens relayés tous les jours par le biais des médias classiques mais aussi les médias sociaux.
Il est donc évident qu'aucune évaluation robuste, indépendante et scientifique de l'action du gouvernement, de 2007 à aujourd'hui, n'a été entreprise en vue d'étayer ce bilan, et si des évaluations auraient été faites, le site makassib.ma n'en fait pas état dans tous les cas. En effet la pratique de l'évaluation en tant que moyen rationnel qui permet de porter un jugement scientifique et neutre sur n'importe quelle action politique ou autre, ne peut être dissociée de la culture générale du gouvernement de concevoir, planifier, suivre et évaluer les politiques publiques. Cette culture se décline en principe en méthodes démarches, et mesures déclarés à côté des objectifs et résultats escomptés, qui figurent dans la déclaration de la politique gouvernementale.
En vue de porter un regard objectif sur le bilan publié par le gouvernement, le présent article analyse la déclaration gouvernementale faite par le Premier Ministre devant le parlement en 2007, notamment dans son volet social ainsi que les mécanismes qui auraient été utilisés en vue d'inspirer la déclaration/programme/engagements pris, et se doter de moyens rationnels pour pouvoir les mesurer par la suite, en vue de rendre compte vers la fin du mandat.
La déclaration de la politique du gouvernement de 2007 au lendemain de son investiture consacre l'importance du développement social en tant que priorité dans l'agenda politique Marocain. En effet, prioriser le développement social est largement justifié au regard des indicateurs socio-économiques du pays, qui malgré les mesures prises, et le lancement en 2005 de l'Initiative Nationale de Développement Humain (INDH) continuent à se dégrader plaçant le Maroc, en 2007 au 126ème rang selon la classification de l'indice de développement Humain (IDH) du Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD).
L'analyse du contenu de cette déclaration est, donc, une opportunité en vue de décortiquer les tendances gouvernementales pendant les cinq années du mandat en matière de politiques publiques en générale et les politiques sociales en particulier. En effet, l'analyse du contenu est une technique de recherche qui permet de procéder à une lecture objective d'un document ou d'un discours, en écartant l'opinion ou l'interprétation subjective qui ne font pas partie de la démarche scientifique de la recherche. La déclaration de la politique gouvernementale de l'année 2007, a été analysée selon les questions suivantes :
• quels sont les critères sur les quels s'appuient le choix des politiques publiques en général et des Politiques sociales en particulier ?
• le gouvernement a-t-il utilisé la recherche et l'évaluation comme moyen de diagnostic et d'identification des priorités ? Sinon quelles étaient les alternatives ?
• Le gouvernement comptait-il recourir à la recherche et l'évaluation pour affiner ses choix politiques déclarés devant le parlement et les étayer par des faits ? Sinon quelles étaient les alternatives proposées ?
Cet exercice d'analyse a permis de tirer un certains nombre de remarques et d'observations en essayant de répondre à ces trois questions.
La déclaration gouvernementale objet d'analyse, ne fait pas allusion aux critères de choix des politiques sociales et intentions d'action annoncées. Sur le plan conceptuel, les concepts utilisés appartiennent au registre de renforcement de la démocratie, l'accélération des chantiers économiques, la valorisation et le renforcement des actions de proximité sociale, la qualification des ressources humaines, le renforcement de la bonne gouvernance dans tous les domaines de l'action publique.
Par ailleurs, le Premier Ministre affirme sans ambigüité, que la source d'inspiration et de conception des politiques gouvernementales est, en premier lieu, les discours royaux notamment le discours d'investiture législative de l'actuel parlement.
La déclaration présentée devant le parlement marocain, le 24 Octobre 2007, est rédigée en 53 pages, incluant 8200 mots et 306 paragraphes. L'analyse du contenu portera exclusivement sur les domaines inclus dans la grille d'analyse élaborée à cette fin, à savoir : l'éducation, la santé, les enfants en situation difficile, l'emploi, l'habitat, le développement local, la migration, la jeunesse, les Droits Humains, l'égalité entre les sexes et le développement rural.
Les concepts utilisés s'inspirent généralement du ‘jargon' moderne des politiques sociales basées sur la planification stratégique et la valorisation des ressources humaines à savoir : le développement social, la participation, la citoyenneté responsable, l'investissement dans les ressources humaines, la démocratie, les élections, etc. sachant que la déclaration ne s'appuie à aucun moment sur des éléments de diagnostic étayés par des faits collectés selon la méthode scientifique (recherches, études, évaluations, enquêtes, etc.) ;
La déclaration fixe des objectifs chiffrés ambitieux, qui ne sont pas étayés par une analyse des capacités et des moyens de mise en oeuvre, ni d'échéances de réalisation à savoir :
a. Créer 250, 000 postes d'emploi par an ;
b. Réduction du taux de chômage à 7% à l'horizon 2012 ;
c. Réaliser 150, 000 logements par an;
d. Accélérer le rythme de généralisation de l'éducation au niveau des collèges et lycées ;
e. Former 10,000 travailleurs sociaux pour l'encadrement de l'INDH ;
f. Opérationnaliser l'initiative de 10,000 ingénieurs et la mise en place de programme de formation en nouveaux métiers (Offshoring) ;
g.Opérationnaliser le plan de formation de 3,300 par an à l'horizon 2020 ;
h. Réduire de 60% le phénomène de travail des enfants et l'éradication de l'emploi des petites filles domestiques ;
i. Réaliser entre 1200 et 2000 km de routes par an pour désenclaver près de 80% de la population rurale à l'horizon 2012 ;
Les données et indicateurs produits par le Haut Commissariat au Plan et autres institutions de recherche et d'analyse des politiques publiques, ainsi que les systèmes d'information de routine ne semblent pas avoir été utilisés, dans un souci de planification rationnelle à moyen et long terme. Ce manque d'analyse rationnelle s'est reflété davantage au niveau de la rhétorique utilisée à savoir : le gouvernement continuera ses efforts pour…, le gouvernement est déterminé à…, le gouvernement accordera une importance particulière à…, le gouvernement procédera à des réformes structurelles, etc.
L'analyse des cinq noeuds du futur du rapport des 50 ans de développement, pour ne citer que celui là, ne semble pas encore inspirer les politiques publiques en matière du social, bien qu'un diagnostic objectif a été élaboré mettant en relief que l'absence de mécanismes décisionnels fondés sur la connaissance et le rôle de la recherche en général a profondément affecté les politiques du pays et a fait perdre au Maroc un temps considérable en terme de développement socio-économique.
Bien qu'elle a fait allusion à un certain nombre d'approches rationnelles comme la gestion axée sur les résultats et la budgétisation sensible au genre, la bonne gouvernance, etc. la déclaration marquait l'absence d'engagement des pouvoirs publics à promouvoir la production et l'utilisation de la connaissance et des savoirs au service du développement en général et le processus décisionnel en particulier. Ceci suppose que les politiques publiques sont déterminés par d'autres facteurs et critères qui n'ont pas été suffisamment explicités dans le document de la déclaration.
Dans quelle mesure peut-on, donc, affirmer la quasi-ignorance de la recherche et de l'évaluation dans les processus décisionnels des politiques publiques, et les politiques sociales en particulier ? Si l'on se réfère à la dite déclaration, un début de réponse est que les politiques publiques au Maroc ne sont pas fondées sur la connaissance en général et les résultats de la recherche et l'évaluation en particulier.
Les raisons de ce déficit ne sont pas uniquement liées à la volonté politique mais aussi à d'autres facteurs. Il s'agit, entre autres, de la mauvaise gouvernance reflétée dans l'irrationalité de la gestion des secteurs publics, les effets des groupes d'intérêt bureaucratiques qui résistent au changement et au fait que le gouvernement s'intéresse davantage aux résultats de la recherche qui sont politiquement faisables et pratiques. Dans le même sens, un autre chercheur (Mansouri, non daté) analyse les raisons du non recours à la recherche dans le domaine des politiques fiscales et macro-économiques. Il soutient que si les décideurs ne s'inspirent pas de la recherche, il existe d'autres facteurs externes qui accentuent cette situation à savoir :
• L'inadéquation des connaissances utilisées et la formation de base des décideurs ;
• L'idée largement reçue que la recherche est extrêmement théorique et vague ;
• La mauvaise diffusion de recherches fiables.
Quand aux mécanismes que le gouvernement entend utiliser pour affiner ses choix politiques, à l'exception de son intention d'évaluer le programme ‘MOUKAWALATI' qui va permettre de nouvelles orientations pour améliorer l'employabilité des jeunes marocains, aucun autre type de recherche ou d'investigation n'est mentionné par la déclaration.
Qu'en est-il des moyens réellement mobilisés pour permettre une évaluation solide, qu'il s'agisse d'évaluations commanditées auprès des bureaux d'études spécialisés, ou à travers un agenda de recherche national à travers le réseau des universités marocaines ? Le site makassib fait état de deux points/acquis seulement :
1. L'augmentation des dépenses de la recherche scientifique de 0,64% du PIB en 2006-2007 à 0,8% actuellement. Et ce sans préciser l'impact de cette augmentation sur la recherche scientifique au Maroc ; et
2. Le raccordement de 110 établissements de l'enseignement supérieur et de la recherche scientifique au réseau informatique académique « MARWAN », et ce jusqu'à 2010.
Deux petites mesures insignifiantes qui montrent bien qu'on est encore très loin de la société de connaissance, pré-requis fondamental pour rationaliser les politiques publiques, les évaluer systématiquement en vue de mettre le doigt sur les vrais problèmes qui rongent le pays, et prévoir des solutions rationnelles, quantifiables, évaluables et durables. Jusqu'à présent nos responsables politiques ne jouent que sur le court terme, ce qui nuit à la qualité des actions gouvernementales, et partant à leurs effets sur le bien être des citoyens.
[1] Les lecteurs peuvent eux mêmes comparer ces objectifs avec ce qui est publié sur le site makassib comme réalisations effectives.
[2] Consulter le texte intégral de la déclaration : http://doc.abhatoo.net.ma/doc/IMG/pdf/texte_integrale_declaration_gouv_el_fassi.pdf
[3] Mansouri, B, Bridging Research & Policy, why Moroccan government does not use reliable research when implementing fiscal policy reforms, période étudiée, 1990-2002. Article non daté, lien: www.gdnet.org/rapnet/pdf/41_Fullpaper.pdf


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