La police est-elle sortie de son rôle de maintien de l'ordre pour se transformer en milices revanchardes punissant les citoyens de Safi ? C'est l'accusation appuyée de témoignages que portent des militants démocrates de la ville. Les émeutes se suivent et ne se ressemblent plus au Maroc. Les émeutes qu'a connu la ville de Safi, le lundi 1er juillet ont eu leur lot de revendications sociales non satisfaites, de répressions violentes et d'actes de vandalisme. La grande nouveauté reste «l'opération de vengeance orchestrée par la police et spécialement les forces antiémeutes pour punir la population qui s'est révoltée», avance Mustapha Sandia, militant du 20 février-Safi. Vandalisme versus punition collective À l'origine de ces émeutes, une tentative de bloquer le train transportant du souffre destiné à l'unité de l'OCP dans la ville. Suite à l'intervention des forces de l'ordre, des émeutiers saccagent en matinée le siège du 10ème arrondissement du quartier Loukliâ et le commissariat de police situé dans le quartier Kaouki. Dans l'après-midi, la police riposte. Sauf que selon de nombreux témoignages, l'intervention de la police ressemblait plus à une descente punitive qu'à une opération de maintien de l'ordre, selon de nombreux témoignages. Dans une vidéo (à voir ici), des membres de la Coordination des chômeurs de Safi affirment avoir été sévèrement battus et insultés alors qu'ils n'avaient pas pris part aux émeutes. «Alors qu'on tenait une réunion dans un jardin public pour discuter de la situation dans la ville et condamner les actes de vandalisme commis ce jour-là, les forces de l'ordre ont pris d'assaut notre AG et ont dispersé par la force les membres de la Coordination présents», témoigne un des Safiots frappés et insultés par la police. Contacté par Lakome.com, la Direction générale de la sureté nationale (DGSN) a préféré ne pas répondre à ces accusations et a renvoyé la balle au ministère de l'Intérieur. Khalid Naciri, ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement, a lui fustigé les manifestants et «les dérapages dangereux qui ont eu lieu. » Ajoutant que « Ces manifestations ne sont nullement une expression de l'exercice démocratique». D'autres sources dans la ville nous confirment que la police a tenté d'autres expéditions punitives dans le quartier de Loukliâ, mais sans succès. «Les habitants ont résisté à l'assaut donné par les forces de l'ordre. Femmes et enfants ont accueilli les policiers avec des jets de pierres», se réjouit un habitant de la ville qui a préféré gardé l'anonymat. «Les policiers ont failli se faire lyncher, si ce n'était l'intervention des habitants», ajoute-t-il. Le 8 août, une date à retenir Le Lundi 8 Août l'Office chérifien des phosphates (OCP) annoncera le résultat du vaste programme de recrutement qu'il a mis en place pour répondre aux revendications sociales des jeunes issues des régions où se trouvent ses installations. «La réaction des autorités ce lundi n'augure rien de bon pour la suite. L'Etat sait qu'il ne peut plus offrir rien de plus que les 5800 emplois promis par l'OCP. Les demandeurs d'emploi dépassent ce chiffre et le pouvoir est dans l'impasse sur ce dossier», estime M. Sandia du 20 février-Safi. En attendant, la tension reste palpable. Des renforts de la police et des forces auxiliaires ont été appelés de Marrakech pour venir à bout de toute nouvelle explosion de colère populaire.