Contrôle financier de l'Etat sur les entreprises publiques Le projet de loi relatif au contrôle financier de l'Etat sur les entreprises publiques a pour objectif d'instituer trois niveaux de contrôle financier pour garantir plus de transparence et une meilleure gestion des affaires. Le gouvernement vient de soumettre au Parlement le projet de loi 69.00 relatif au contrôle financier de l'Etat sur les entreprises publiques et sur d'autres organismes. Ce projet de loi devra être examiné incessamment par la Chambre des Conseillers. Mais il faut souligner tout d'abord que ce projet survient alors que des scandales énormes ont éclaté ici ou ailleurs et dénotent un manque flagrant de contrôle d'un certain nombre d'organismes publics. En dehors de ces scandales à répétition, la situation qui prévaut actuellement est pour le moins paradoxale. En effet, les rapports entre les entreprises publiques et les ministères de tutelle sont pour le moins ambigus. Dans beaucoup de cas, les entreprises se rebellent contre les autorités publiques à tel point que le ministre se trouve les mains liées face à un directeur comme si les entreprises publiques étaient devenues un Etat dans l'Etat. C'est à partir de ces constatations que découle l'importance de ce projet qui aspire à rétablir l'état naturel des choses afin de mettre le tissu productif marocain au diapason des données de l'ère nouvelle. Sur le plan politique, la stratégie gouvernementale pour la moralisation de la vie publique et pour la bonne gouvernance est relayée de l'orientation globale tendant à libérer l'économie nationale, à limiter l'interventionnisme de l'Etat et à restructurer les entreprises publiques dans le sens de les transformer en sociétés anonymes dotées de Conseils d'administration actifs. Pour cela, il était devenu nécessaire de créer le cadre institutionnel adéquat pour que ces entreprises passent des contrats bien définis avec l'Etat selon des objectifs financiers et techniques bien précis. Voilà le cadre général tracé par ce projet de loi qui est, par ailleurs, constitué de 9 chapitres et de 24 articles qui visent le renforcement des pouvoirs du ministère des Finances dans les domaines de l'enquête, du contrôle et de la gestion des entreprises publiques. Il tend, d'autre part, à doter ces organismes d'outils de contrôle modernes qui garantissent leur autonomie de gestion administrative vers plus de transparence et pour une meilleure prévention des risques. Qu'en est-il des sociétés soumises à la tutelle financière de l'Etat ? Le projet les énumère comme suit : les organismes publics ( l'Etat, les collectivités locales et les établissements publics), les sociétés d'Etat ( les sociétés dont le capital est détenu en totalité par des organismes publics), les filiales publiques ( les sociétés dont le capital est détenu pour plus de la moitié par des organismes publics), les sociétés mixtes ( dont le capital est détenu au plus à hauteur de 50% par des organismes publics), les entreprises concessionnaires ( chargées d'un service public en vertu d'un contrat de concession dont l'Etat est l'autorité contractante). Mais ce projet exclut Bank Al Maghrib, la Caisse de dépôt et de gestion, les établissements de crédit et les entreprises de l'assurance et de la réassurance. Les fonctions de contrôle financier Le contrôle financier de l'Etat a pour objectif, selon les cas, d'assurer le suivi régulier de la gestion des organismes publics, de veiller à la régularité de leurs opérations économiques et financières, à la qualité de leur gestion, à leurs performances économiques et de gestion, et d'oeuvrer à l'amélioration de leurs systèmes d'information et de gestion. Le projet prévoit trois niveaux de contrôle. Le contrôle préalable Les entreprises publiques sont soumises au contrôle préalable. Cette opération est pilotée par le ministre des Finances, le contrôleur financier et le trésorier payeur. En vertu de ce genre de contrôle, le projet accorde au ministre des finances la prérogative d'approuver les documents suivants pour qu'ils soient définitifs . ce sont : les états prévisionnels pluriannuels, les budgets, le règlement des marchés, l'organigramme, le statut du personnel, les conditions d'émission des emprunts et de recours aux autres formes de crédits bancaires, tels qu'avances ou découverts, l'affectation des résultats. Il est à signaler que les fonds disponibles des établissements publics sont déposés au Trésor, sauf dérogation accordée par le ministre chargé des finances. Dans le même cadre, le projet a défini les pouvoirs du ministre chargé des Finances au niveau de l'organisation financière et de contrôle des établissements publics. De même qu'il a défini clairement les fonctions du contrôleur financier et du trésorier payeur. Le contrôle d'accompagnement Ce genre de contrôle concerne essentiellement les sociétés d'Etat dont le capital est totalement détenu par l'Etat ou les collectivités locales, les établissements publics justifiant de la mise en œuvre effective d'un système d'information, de gestion et de contrôle interne. C'est le ministre chargé des Finances qui a pour mission d'effectuer ce genre de contrôle. A l'opposé du contrôle préalable, qui nécessite beaucoup de documents, ce contrôle se limite au budget, aux états prévisionnels pluriannuels et à l'affectation des résultats. Toutefois, les budgets des établissements publics qui ne reçoivent pas de subvention de l'Etat, deviennent définitifs dès leur approbation par le Conseil d'Administration ou l'organe délibérant à l'unanimité de ses membres. La spécificité de ce contrôle réside dans le fait que les organismes qui y sont assujettis doivent créer des comités d'audit dont la mission est d'apprécier la régularité des opérations, la qualité de l'organisation, la fiabilité et la bonne application du système d'information ainsi que les performances de l'organisme, faire prescrire et réaliser les audits internes, externes et les évaluations. Le contrôle conventionnel Ce genre de contrôle concerne les sociétés d'Etat où les établissements publics et les collectivités n'ayant pas de participation directe ainsi que les filiales publiques. Ce contrôle est caractérisé par le fait que c'est un domaine réservé au contrôleur d'Etat. Le projet 69.00 a prévu les conditions et les dispositions nécessaires pour établir une convention de contrôle. Parmi ces conditions, le contrôleur de l'Etat assiste, avec voix consultative, aux séances du conseil d'administration ou de l'organe délibérant ainsi qu'aux réunions des commissions ou comités constitués au sein de l'organisme contrôlé. Il dispose d'un droit de communication permanent tant auprès de l'organisme que de ses filiales et participations et peut effectuer, à tout moment, sur pièces et sur place, toutes vérifications et tous contrôles qu'il juge opportuns et peut se faire communiquer toutes les pièces qu'il estime utiles à l'exercice de sa mission. Le contrôleur d'Etat dispose, dans la limite des seuils fixés par le ministre chargé des Finances, d'un pouvoir de visa préalable sur les acquisitions immobilières, tous contrats ou conventions de travaux, de fournitures et de services ainsi que sur l'octroi des subventions et dons. La transparence et la bonne gouvernance Il apparaît clairement que le principal souci de ce projet est de renforcer la transparence et la bonne gestion des établissements publics pour qu'ils puissent remplir leur mission de la manière la plus efficace au service du développement économique et social sur la base d'une vision claire. Le moment est venu d'éradiquer le fléau de la dilapidation de l'argent public et d'arrêter l'hémorragie. Avec l'adoption de ce projet de loi, il est certain qu'un nouveau processus de restructuration des entreprises prendra son chemin, encore faut-il que les ressources humaines soient valorisées et formées pour qu'elles puissent maîtriser les risques économiques et financiers pour que les organismes publics ne soient plus un cadre où toutes les malversations sont permises.