Aire métropolitaine centrale On croirait se réveiller brusquement d'une longue léthargie pour diagnostiquer les carences structurelles et sectorielles en matière d'organisation et de répartition des espaces démographiques, économiques et culturelles pour leur opposer la voie du salut plébiscitée : développer la fonction décisive, mais dont l'absence est cruellement ressentie, de conception-innovation. Et de quoi avaient l'air les protagonistes, autorités, élus, opérateurs, universitaires et autres décideurs ou partenaires potentiels en admettant, à l'unanimité, ce "vide" pour appeler les bonnes volontés à se mobiliser afin de remonter un sacré retard. a permis au moins d'accorder les violons sur un diagnostic implacable et transparent et d'attirer la réflexion sur l'urgence d'un plan d'action pour y faire face. C'est que l'étude magistralement présentée par Felix Damette nous a ramené sur le plancher des réalités coriaces que l'impéritie de la gouvernance des décennies passées n'a fait qu'aggraver pour nous retrouver, à l'arrivée, devant une “montagne” de difficultés et de contraintes cumulées rendant ardus les programmes de redressement et de développement. Un territoire cohérent et compétitif Le nouveau concept approfondi par le Directeur technique du Bureau d'études DIRASSAT, SOFA-AMC (Schéma d'organisation et d'aménagement de l'aire métropolitaine centrale), un complexe urbain littoral s'étendant sur 230 km autour du duopole Casablanca-Rabat avec des pénétrations de 80 km vers l'intérieur du territoire, se veut “une nouvelle politique de métropolisation pour le renforcement de la compétitivité de notre territoire”. Le projet gouvernemental, pris en charge de coordination et de réalisation par le département coiffé par Mohamed El Yazghi, est un ensemble de première importance avec ses 7 millions d'habitants représentant 20% de la population du Royaume et 50% de sa valeur ajoutée nationale. Si pour les experts, SOFA introduit un “nouveau concept porteur des principes d'identité, d'équité et de solidarité”, il n'en demeure pas moins que, de l'avis de nos institutionnels impatients à “requalifier” les fonctions des métropoles du Royaume, “SOFA permet d'organiser une grande aire métropolitaine plus compétitive parce que plus cohérente et plus attractive. C'est l'une des grandes orientations et ambitions du schéma national d'aménagement du territoire (SNAT)”. Si cette AMC est le moteur et le poumon démographique et économique du pays, c'est aussi “une locomotive en mauvais état”, mettent en garde les spécialistes, développeurs, aménageurs et autres économistes. Le constat met l'index sur les “signes d'essoufflement” marqués par la capitale économique du Royaume qui comparée à d'autres grandes agglomérations méditerranéennes, “est faiblement dotée en fonctions métropolitaines et sa dynamique de développement ne paraît pas suffisante pour combler ce déficit”. La composante Rabat-Salé constitue “un potentiel mal exploité”. Le rapport ambigu entre les deux agglomérations du fleuve Bouregreg a condamné Salé au rang de banlieue populaire et de zone d'expansion pour les besoins d'habitat de Rabat, capitale et siège des grands équipements publics et de souveraineté. Et principal pôle culturel à l'échelle nationale. La double fonction de Rabat est l'intégration de Salé et le développement de relations de complémentarité économique et culturelle avec Casablanca. L'énigme Kénitra reflète la contradiction flagrante entre une forte croissance démographique et une croissance économique négative. Tandis que l'axe Kénitra-Settat-El Jadida-Khémisset, une zone d'extension en duopole villes fortes à profil généraliste bien représentées dans les 4 domaines de production, reproduction simple, reproduction élargie et intermédiation. Elles peuvent prendre le relais du développement pour le diffuser plus largement. Quoique moyennement industrialisées, ces villes présentent un grand intérêt pour le desserrement de “l'étau” industriel Casa-Rabat et atténuer la “satellisation” de villes comme Khemisset pour Rabat et Settat par Casablanca. “Sauvons, tous, notre région” L'appel de “détresse” a émané de la conscience de Omar Bahraoui qui eut cet élan spontané sans même chercher à maquiller ses mots : “nous avons jusqu'ici travaillé dans l'anarchie. Nous avons jusque là plus subi la pression des événements que n'avons agi par anticipation. Pour faire face à la véritable crise économique que traverse notre pays, nous devons, tous, nous mobiliser pour sauver notre région”. Ce mea culpa du président MP du Conseil de la Ville de Rabat a rendu raison à Damette pour le mérite de “nous avoir secoués et incités à réagir en prenant acte de l'importance de la fonction conception et innovation négligée jusqu'ici”. Une fonction dans laquelle doivent tremper dorénavant les potentiels multisectoriels des composantes de l'AMC, à savoir El Jadida, Settat, Casablanca, Rabat, Salé, Kenitra et khemisset. Le ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement prit à son corps défendant ces révélations autocritiques en soulignant que “seul le langage de la transparence est payant et que la vérité seule permet de surmonter les situations les plus compromises”. C'est vrai que les déficits accumulé des décennies durant sont énormes et risquaient de précipiter le pays dans le chaos. Mais Hassan Amrani tenta une sortie de ces scénarios pour contourner l'autoflagellation ambiante. “Si les développeurs et les aménageurs sont effectivement confrontés à ces problématiques du développement du territoire, en revanche il importe de stimuler, dès à présent, toutes les initiatives innovatrices en diffusant cette étude dans les collectivités locales et en organisant des ateliers spécifiques d'analyse et d'appplication des solutions appropriées aux problèmes d'organisation fonctionnelle et d'aménagement du territoire de la région AMC”, a fortement préconisé le Wali de la région Rabat-Salé-Zemmour-Zaer. Et ce, en partant du constat général établi qui se traduit par le fait que les dysfonctionnements urbains actuels sont moins dus à un manque de ressources socioéconomiques ou culturelles qu'à un déficit d'orientation politique dans la gestion et l'organisation des bases économiques des villes. Le duopole Casa-Rabat représente les deux leviers majeurs du développement dont dépendent à la fois la construction de l'AMC et la restructuration de leurs espaces périphériques.