Egypte. Don des héritiers de Cheikh Abdullah Al-Mubarak Al-Sabah à l'hôpital « Ahl Masr »    Gérard Larcher en visite au Maroc : le Sahara au cœur du programme    Le Maroc et l'Argentine sont des « partenaires naturels », selon l'ancien ambassadeur argentin    L'attaquant de Mulhouse en France : un migrant algérien que l'Algérie a refusé de réadmettre    Congrès des présidents des assemblées et parlements arabes : Adoption d'un plan d'action en faveur de la résilience des Palestiniens    ICESCO : nouveaux horaires de visite de l'exposition et du musée de la Sîrah du Prophète durant le mois de Ramadan    La visite du Président du Sénat français au Maroc    L'initiative "Poisson à prix raisonnable" prévoit plus de 4.000 tonnes    Benguérir : "Science Week 2025" explore les défis scientifiques majeurs de l'avenir    Mohammedia. Brahim Mojahid décroche un marché de voirie de plus de 173 millions de DH    Global Soft Power Index : Le Maroc se maintient parmi les 50 pays les plus influents au monde    Le chef du gouvernement inaugure le pavillon marocain au Salon international de l'agriculture de Paris    Miloudi Moukharik reconduit à la tête de l'UMT pour un 4ème mandat    La lutte contre le fentanyl et l'Ukraine au centre d'un entretien téléphonique Trudeau-Trump    France : Un mort et cinq blessés dans une attaque au couteau à Mulhouse, l'assaillant interpellé    S.M. le Roi félicite le Serviteur des Lieux Saints de l'Islam à l'occasion du Jour de la Fondation    France : Un mort et cinq blessés au couteau par un Algérien sous OQTF    Liga: le Barça s'impose à Las Palmas et se maintient en tête du classement    Botola : Programme et résultats de la 22e journée    Botola : Le classico AS FAR-Raja Casablanca en tête d'affiche    Afrobasket 25: Le Mali bat le Soudan du Sud et élimine le Maroc !    Botola D1: Le Wydad sans solutions face aux deux "bus" du CODM!    Botola D1: Le MAT renversé par le DHJ !    Casablanca : arrestation d'un Français recherché par Interpol pour trafic de drogue    Casablanca: Interpellation d'un Français d'origine algérienne faisant l'objet d'un mandat d'arrêt international (source sécuritaire)    Tanger Med: Mise en échec d'une tentative de trafic de 1.852 unités de pétards et de feux d'artifice    MAGAZINE : Booder, l'autodérision comme point nodal    L'Algérie utilise une image du Ksar Aït Ben Haddou dans une vidéo officielle    Le Festival International du Film de Dublin 2025 rend hommage au cinéma marocain    Netflix va investir 1 milliard de dollars au Mexique lors des quatre prochaines années    Hommage à l'explorateur marocain Estevanico à New York    Etats-Unis : Le Caucus des accords d'Abraham s'intéresse à l'éducation au Maroc et au Moyen orient    Moroccan rapper «Hliwa» is facing charges over a social media post on President Macron    Espagne: Consulat mobile en faveur de la communauté marocaine de Toledo    Diaspo #377 : Ilias Ennahachi, un multi-champion de kickboxing aux Pays-Bas    Marrakech : Le Complexe sportif Sidi Youssef Ben Ali rénové et livré    Global Soft Power Index : Le Maroc se maintient parmi les 50 pays les plus influents au monde    Morocco's Govt. Head inaugurates Kingdom's pavilion at Paris International Agricultural Show    À Témara, cinq enfants périssent dans l'incendie d'une habitation après l'explosion d'une bonbonne de gaz    CasaTourat, la nouvelle application destinée à faire découvrir le patrimoine de la ville    La Chine enregistre un record d'émission de certificats d'électricité verte en janvier    L'Algérie reprend secrètement ses livraisons de pétrole brut à Cuba    Salon International de l'Agriculture de Paris : Akhannouch aux côtés de Macron à l'inauguration officielle    Alain Juillet : "Le Maroc a toujours été en pointe dans la lutte contre le terrorisme islamiste"    Disponibilité du poisson au Maroc : 35% des Marocains estiment qu'il est moins disponible    RDC : le HCR demande 40 millions de dollars pour aider les civils fuyant les violences    La signature marocaine, référence internationale de la légitimité de la diversité et de l'altérité (André Azoulay)    L'Humeur : Quand le CCM se ligue contre les festivals    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Qui veut la peau du singe magot?
Publié dans La Gazette du Maroc le 18 - 10 - 2004


Animaux en voie de disparition au Maroc
De ses mains expertes, il décortique en un éclair les cacahuètes lancées par les touristes qui viennent admirer une espèce unique dans son habitat naturel. Les visiteurs ont intérêt à en profiter, puisqu'au rythme où vont les choses, le magot pourrait ne plus en avoir pour longtemps.
Victimes de la désertification, de l'érosion, du surpâturage et de changements climatiques de plus en plus importants, les forêts de cèdres du Moyen Atlas passent un mauvais quart d'heure. Plusieurs parcelles portent déjà les marques d'une dégradation qui ne semble pas en voie de s'arrêter. Selon le Fonds Mondial pour la Nature (WWF), la densité végétale des forêts du Moyen Atlas aurait diminué de 40 pour cent depuis les 15 dernières années. Et si le singe magot, une espèce animale ayant depuis toujours cohabité en harmonie avec le cèdre de l'Atlas, menaçait aujourd'hui d'en causer la perte?
Les faits sont indéniables. Dans certaines régions du parc d'Ifrane, comme ailleurs dans le Moyen Atlas, les dommages causés aux cèdres par le singe magot sont omniprésents. Dans la forêt d'Aïn Kahla, par exemple, un nombre préoccupant d'arbres à la cime asséchée défigurent le paysage. L'animal s'en prend le plus souvent aux jeunes cèdres, arrachant l'écorce au sommet de l'arbre et l'empêchant de croître en hauteur. “L'attaque n'est pas généralisée, mais cause beaucoup de dommages dans certaines régions”, affirme M. Mohammed Tigma, ingénieur au service forestier d'Ifrane du Ministère chargé des eaux et forêts. “Ça anéantit un peu nos efforts de régénération de la forêt”, ajoute-t-il.
Un tel comportement ne date pas d'hier, des forestiers l'auraient observé dans les années 1940. Par contre, la prolifération des dommages depuis les 15 dernières années a suffi à attirer l'attention du gouvernement et d'un certain nombre de scientifiques marocains
et étrangers. Plusieurs hypothèses circulent au sujet des raisons motivant de telles attaques, mais certains chercheurs soutiennent que le singe magot serait –
à défaut d'en être la cause – victime de la dégradation de l'écosystème. Pour le professeur Andrea Camperio, primatologue enseignant à l'Université de Padoue, en Italie, et président du GEA – une organisation qui mène depuis 1994 des recherches sur ce phénomène – il s'agirait d'un problème de disponibilité d'eau.
Les forêts de cèdres du Moyen Atlas n'abritent pas que
le singe magot : le milieu forestier subit la pression croissante
d'une population considérable d'animaux d'élevage.
Par exemple, bien que des quotas sur le bétail aient été établis en fonction de la capacité de la forêt à supporter leur présence, les abus sont fréquents. “Il y a une législation qui parle d'établir la capacité de charge des parcours forestiers, et à partir de là on décide de la taille du troupeau que peut soutenir la forêt”, explique M. Tigma. “Mais cette législation n'a jamais été appliquée; c'est difficile d'appliquer quelque chose qui ne l'a jamais été”. Certains signes de tels abus sont évidents : aux abords de certaines routes de montagne près d'Azrou, des clôtures de fil barbelé censées empêcher l'accès à certaines parcelles forestières sont garnies d'une laine qui n'a pu appartenir qu'au bétail qui les traverse régulièrement. On estime à 800.000 têtes l'ensemble du cheptel actuellement en pâturage dans le parc d'Ifrane – près de quatre fois ce qu'il devrait être si les quotas étaient respectés.
Pour le singe magot, la compétition est donc féroce. De plus, certains groupes de bergers autrefois nomades se sont aujourd'hui sédentarisés. “Les bergers se sont accaparés les points d'eau et le singe n'y a plus accès”, explique Ali Aghnaj, responsable des projets de la WWF au Maroc.
Le singe magot, ainsi privé de l'accès aux points d'eau naturels, s'en prendrait à l'écorce riche en eau des jeunes cèdres. Selon le Pr. Camperio, son comportement pourrait être interprété comme un indicateur du déséquilibre de l'écosystème, une conclusion sur laquelle tous semblent vouloir s'entendre.
Les environnementalistes ne sont donc pas seuls à avoir sonné l'alarme, le gouvernement marocain en a fait autant.
“Cette alarme, elle ne doit pas être uniquement au sujet du singe”, soutient M. Tigma.
“C'est une alarme généralisée. Le singe n'est qu'un cas particulier qui est apparent”. Dans le cadre du Projet d'aménagement et de protection des massifs forestiers de la province d'Ifrane, les autorités parlent de développer des solutions globales aux problèmes environnementaux rencontrés dans l'Atlas moyen. Avec un budget de plus de 200 millions dirhams, le projet (débuté en 2002) d'une durée de cinq ans, prévoit entre autres une étude poussée sur l'évolution des populations et des comportements du singe magot. M. Tigma explique qu'une telle étude devrait permettre de connaître une fois pour toutes les raisons qui poussent le singe à s'attaquer aux cèdres, en plus de mettre fin à la polémique au sujet de l'accroissement ou de la diminution de la population.
“Les chercheurs italiens ont tendance à croire que la population de singes diminue”, explique-t-il. “Nous croyons, d'après nos observations sur le terrain, que c'est plutôt l'inverse”.
Pour le Pr. Camperio, les théories du gouvernement sont peu convaincantes.
“Si vous regardez le long des routes, comme le font les forestiers, vous verrez plus de singes, parce qu'ils ont faim et sortent à la recherche de nourriture”, explique-t-il. “Par contre, si vous observez à l'intérieur de la forêt, comme nous l'avons fait, ce que vous verrez d'une année à l'autre, c'est de moins en moins de singes”. Même l'ambitieux projet du gouvernement laisse le Pr. Camperio sceptique. “J'ai vu des millions de dollars passer dans l'Atlas pour des études environnementales et plusieurs compagnies s'y remplir les poches”, confie-t-il. “La firme italienne Agriconsulting en est un exemple frappant. Ils ont récolté des sommes énormes de la Banque mondiale et n'ont produit que quelques rapports. Des rapports que même mes pires étudiants auraient pu écrire en deux fois moins de temps” dit-il. “Par contre je peux vous garantir qu'on ne les a jamais vus en forêt”.
Le singe magot – dont l'habitat naturel se limite à certaines régions du Maroc et de l'Algérie – figure depuis 2000 sur la liste rouge des espèces menacées de l'Union mondiale pour la nature (UICN). Le magot est allé y rejoindre un nombre alarmant d'espèces animales, en partie parce que l'UICN estime que son territoire s'est réduit de plus de 20 pour cent au cours des 10 dernières années et que, si la tendance se maintient, une diminution de même ordre pourrait prendre place avant la fin de la prochaine décennie. Selon un rapport publié par le Fonds français pour l'environnement mondial, 30,000 hectares de forêt sont défrichés chaque année au Maroc, ce qui “entraîne une érosion sans précédent” - 22.000 hectares de terre agricole seraient perdus chaque année.
Le Pr. Camperio avoue que le cas du singe magot n'est pas ce qui le préoccupe réellement.
“Franchement, il n'est pas si important pour moi. Ce qui est terriblement important, c'est que s'il disparaît, cela voudra dire que l'écosystème est tellement compromis que même les humains devront partir”. La véritable urgence, ajoute-t-il, est de protéger la forêt, la culture berbère, ses traditions et d'assurer sa compatibilité avec la conservation de l'écosystème. “En se débarrassant des chèvres – qui produisent peu de revenus et causent les plus grands dommages – et en offrant des alternatives aux groupes tribaux comme la production de miel, l'élevage de dindes, ou le développement de l'artisanat par exemple”. Le Pr. Camperio croit que, faute d'une solution efficace au problème, les conséquences pourraient être catastrophiques.
“Il n'y aura plus d'eau produite dans les montagnes, et toutes les communautés situées plus bas en souffriront, la population en général en souffrira, et toute la biodiversité en souffrira”.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.