Khadija Merouazi est une grande dame de la lutte pour les droits de l'homme. Longtemps cheville ouvrière de l'OMDH, elle a été, avec Abdelaziz Bennani, l'une des premières à théoriser une expérience marocaine de la justice transitionnelle, ce qui va aboutir à l'IER. Porte-parole d'Al Wassit, elle vient de jeter un pavé dans la mare, en revendiquant la grâce pour les militants d'Al Adl Wal Ihsane incarcérés depuis 18 ans dans l'histoire de l'assassinat d'un militant de gauche. Ses arguments sont d'ordre juridique. Au-delà, ces gens ont passé près de 20 ans sous les barreaux, ils ont droit à une seconde chance, eux qui ont perdu les plus belles années de leur vie. Cet appel risque de buter sur des conceptions différentes des droits de l'homme, pire, partisanes. Il ne s'agit pas de défendre l'usage de la violence contre les adversaires politiques, ni le mysticisme fascisant de Yassine et ses troupes. Il s'agit juste de rappeler que la société, l'Etat qui au nom de la société a le monopole de la violence légale, ne peuvent céder à la barbarie. Dans cet esprit, tous les condamnés ont droit à une chance, au nom de leur humanité. Aussi paradoxal que cela puisse paraître, c'est en défendant les restes d'humanité de ceux-là même qui ont commis des actes attentatoires à la sécurité des autres que le militant des droits de l'homme se distingue du politique. Dans le cas qui nous concerne, ces étudiants mus par une idéologie totalitaire ont, selon la justice, assassiné un autre étudiant, militant d'une mouvance de gauche. Cet acte criminel devait être puni. Dans les sociétés civilisées, la sanction est modulable ensuite en fonction du comportement des détenus et de leurs efforts de réinsertion Cette modulation ne peut être liée à la permanence de leurs croyances. L'on sait par expérience que la détention permet rarement ce genre de revirement. Aujourd'hui il s'agit de dire, que le temps qu'ils ont passé en prison est une sanction suffisante et que comme tout être humain, ils ont droit à recouvrer leur liberté. Ce qu'ils peuvent en faire ne concerne que leur conscience d'individus. Khadija a raison, ils doivent sortir. Les droits de l'Homme sont universels ou ne sont pas.