Football : valse des entraîneurs Chaque saison connaît son lot de limogeages en série et la cadence est allée en s'accentuant pour atteindre aujourd'hui un rythme insoutenable qui explique d'ailleurs l'instabilité des équipes et, partant, leur faiblesse. Bouc-émissaire par excellence, l'entraîneur est toujours le premier à payer les pots cassés des mauvais résultats comme s'il était le seul et unique responsable de tous les malheurs d'un club. Depuis des lustres, le cérémonial de la destitution a été bien établi au point où tout coach qui se respecte rappelle qu'il travaille toujours avec la valise à la main, c'est-à-dire prêt à déguerpir pour éviter la crise de l'équipe. Mais si sous les cieux plus cléments du football professionnel on fait preuve d'un brin de retenue avant de remercier un entraîneur, au Maroc, le limogeage est devenu un réflexe normal et les dirigeants ne s'en privent pas pour calmer les ardeurs belliqueuses de leurs supporters. Le football marocain vit actuellement au rythme de trois entraîneurs par saison. Plus personne ne s'en offusque. On trouve que «c'est normal». Et, demain, on passsera à quatre coaches par exercice sans inquiéter l'opinion sportive. On pourrait même ajouter que, finalement, chacun y trouve son compte, aussi bien les comités qui offrent la tête du technicien indésirable que les supporters qui jubilent à l'occasion. Alors coupable de tous les maux le coach soudainement décrié par tout le monde ? Deux cas de figure se présentent en la circonstance. A-t-il été recruté avant l'ouverture de la saison et pris part aux recrutements réalisés par le club, ou a-t-il pris le train en marche avec un effectif choisi et arrêté par les seuls dirigeants ? Il est évident qu'un entraîneur qui se respecte ne saurait entrer en fonction avec des données de base de départ qui ont échappé à sa stratégie de travail mais la réalité du métier étant tout autre, la plupart des entraîneurs acceptent le poste sans être trop exigeants sur la question. Responsabilité de l'échec non partagée Même Oscar Fullone, le coach aux multiples titres africains, a accepté de prendre les rênes techniques du WAC alors que l'effectif avait été arrêté par son prédécesseur, Rachid Taoussi. Les victoires en Coupe du Trône, en Coupe des vainqueurs de coupes ont sauvé la tête de l'entraîneur argentin. Que sera-t-il advenu de lui en cas de double insuccès ? La question est aujourd'hui posée au Raja avec un Walter Meeuws sur la sellette depuis la déconvenue en finale de la Ligue des Champions. Tôt ou tard le technicien belge paiera pour les erreurs de recrutements opérés par les dirigeants car il faut bien que quelqu'un «trinque» pour les fiascos des Verts. Au MAS, la situation est en train de passer du comique au tragique, car depuis le renvoi de l'entraîneur roumain, rendu responsable de la défaite en finale de la Coupe du Trône (face au WAC), l'équipe fassie n'a plus connu de victoires avec son nouveau coach, Aziz Amri, venu tout droit du CODM qui caracolait en tête en début de saison sous sa houlette. Encore deux ou trois revers et le comité du MAS sera contraint de changer une nouvelle fois d'entraîneur. A Meknès, Laâyoune et Tanger on vit également à l'heure du changement en faisant porter le chapeau à l'entraîneur alors que les clubs sont confrontés à d'autres problèmes. Tous ces va-et-vient d'entraîneurs perturbent la marche des équipes, incapables d'avoir un fond de jeu et donc de progresser. Et c'est tout le niveau du football national qui s'en ressent avec, fatalement, des retombées néfastes sur les différentes sélections, elles-mêmes en proie à des changements périodiques. Souffrant déjà du déficit infrastructurel et en proie aux difficultés financières, le football marocain est aussi victime de la déstabilisation de son encadrement technique avec les conséquences que l'on devine.