La mémoire régit l'essentiel de nos activités : intellectuelles, professionnelles, quotidiennes, de loisirs et construit l'identité, les connaissances, l'intelligence, la motricité ou l'affectivité. Petit cours sur cette fonction passionnante de notre cerveau, sous forme de questions / réponses. Qu'est-ce que la mémoire? C'est la fonction qui permet de capter, coder, conserver et restituer les stimulations et les informations que nous percevons. Il n'existe pas une, mais des mémoires : on peut distinguer la mémoire sensorielle, la mémoire à court terme et la mémoire à long terme. Quel est le rôle des différentes mémoires? • La mémoire sensorielle Extrêmement brève, elle correspond pratiquement au temps de perception d'un stimulus par nos organes sensoriels. La mémoire sensorielle visuelle (on dit aussi iconique) a une persistance comprise entre 300 et 500 millisecondes. La mémoire sensorielle auditive (ou échoïque) n'est guère plus longue. A ces stimuli visuels et auditifs, peuvent s'ajouter des perceptions captées par les autres sens mais qui semblent jouer un rôle moins important. Ainsi en est-il de la mémoire sensorielle tactile (mémoire haptique). C'est la combinaison de ces différentes perceptions qui permet l'identification de l'information. • La mémoire à court terme Egalement baptisée mémoire de travail (MT), nous la sollicitons en permanence : cette mémoire immédiate nous offre la capacité de retenir, pendant une durée comprise entre une et quelques dizaines de secondes, jusqu'à 7 éléments d'information en moyenne. • La mémoire à long terme Contrairement aux précédentes qui effacent les données aussitôt après leur traitement, la mémoire à long terme (MLT) stocke les informations pendant une longue période et même pendant toute la vie. D'une capacité considérable, la MLT est dépositaire de nos souvenirs, de nos apprentissages. En résumé, de notre histoire. Comment ce système est-il organisé ? Bien entendu, les informations que nous percevons ne sont pas déversées sans distinction dans une sorte de mémoire «réservoir», mais sont organisées et régies par des systèmes qui fonctionnent en relation permanente : d'une part, la mémoire épisodique et la mémoire sémantique, et, d'autre part, la mémoire procédurale et la mémoire déclarative. La mémoire épisodique permet de se souvenir des événements, des noms, des dates et des lieux qui nous sont propres. Elle est très liée au contexte affectif (par exemple: la semaine dernière, Karim, en voyant le match de foot opposant la Pologne à l'Equateur, et ravi de la victoire équatorienne, a appris que «Quito» était la capitale de l'Equateur). Quant à la mémoire sémantique elle concerne les concepts, le sens des mots et des symboles. Ainsi, Karim sait, sans se souvenir où et quand il a acquis cette connaissance, que «Rabat» est la capitale du Maroc. La mémoire procédurale correspond au savoir-faire : elle sert à réaliser des opérations complexes souvent motrices (conduire sa voiture, ouvrir le robinet ...) et entre probablement en jeu dans l'apprentissage «par cœur». Quant à la mémoire déclarative, c'est celle du savoir dire. Elle permet d'évoquer de façon consciente des souvenirs sous la forme de mots. Quel est le support de la mémoire ? Un souvenir est stocké dans un réseau de plusieurs milliers ou millions de neurones connectés les uns aux autres. Sur le plan chimique, les neurones communiquent entre eux ou avec des cellules spécialisées (musculaires, hormonales, etc.) par le biais de molécules appelées neurotransmetteurs ou neuromédiateurs Dans le cas de la mémoire, c'est l'acétylcholine qui joue un rôle essentiel. Son déficit est à l'origine de troubles amnésiques : c'est d'ailleurs l'une des causes de la maladie d'Alzheimer. La mémoire a-t-elle des limites ? Si les mémoires sensorielles et à court terme ont des capacités limitées au traitement de l'information, la mémoire à long terme possède de prodigieuses facultés de conservation. Il nous arrive pourtant d'avoir des défaillances et d'oublier, sans pour autant que nous ayons à nous alarmer. L'oubli n'est pas un phénomène anormal. Quand l'oubli se manifeste-t-il ? Notre cerveau est organisé pour éliminer tout ce qui pourrait l'encombrer inutilement ou lorsque l'information n'a pas subi le traitement approprié. C'est ainsi qu'intervient l'oubli. Le processus d'organisation est en effet essentiel dans le travail et le succès du rappel : les chances de retrouver un souvenir, dans cette immense sale des archives qu'est la mémoire sémantique, dépendent de la qualité avec laquelle on a étiqueté ce souvenir. Beaucoup d'oublis ont également une cause affective. Pour les psychanalystes, l'oubli est souvent associé à des événements ou des intentions associés à des affects désagréables ou porteurs de stress. Quelles sont les maladies de la mémoire? Les troubles de la mémoire se caractérisent principalement par les amnésies. Des pathologies moins fréquentes sont observées sous le titre de paramnésie et hypermnésie. • Les amnésies Certaines sont dues à des lésions cérébrales : les amnésies neurologiques. D'autres ont des causes psychologiques : les amnésies psychiatriques. Selon les cas, la forme de l'amnésie varie. On distingue : - l'amnésie antérograde ou amnésie de fixation. Le malade ne peut plus acquérir de nouvelles données, mais les souvenirs anciens sont préservés. Ce type d'amnésie se rencontre notamment chez les alcooliques chroniques (syndrome de Korsakoff). - l'amnésie rétrograde empêche le patient d'évoquer des souvenirs antérieurs à sa maladie. - l'amnésie lacunaire est une perte de mémoire se rapportant à une période bien déterminée (période d'une perte de conscience, d'une crise d'épilepsie, d'un épisode psychiatrique...) - l'amnésie globale qui touche aussi bien les faits récents et anciens et qui se rencontre dans les démences. • La paramnésie C'est l'illusion du déjà vu ou du déjà vécu. Isolé et en dehors d'un tableau clinique psychotique (schizophrénie), il s'agit d'un défaut d'interprétation, d'un trouble de la perception parfois lié à la fatigue. • L'hypermnésie Elle est évoquée dans les cas de troubles psychiatriques où les souvenirs du patient occupent une place obsédante, exagérée et même invraisemblable. Qu'est-ce que la maladie d'Alzheimer ? De plus en plus fréquente chez les sujets âgés (après 45 ans, mais surtout après 65 ans), la maladie d'Alzheimer affecte le cerveau. Elle se manifeste par une perte de la mémoire à court terme, une confusion mentale et, finalement, par une détérioration physique et intellectuelle totale. Malgré des recherches intensives, la cause précise de cette affection reste inconnue et on ne sait pas encore la soigner. D'autres maladies dégénératives, moins répandues touchent le cerveau et s'attaquent aux facultés intellectuelles (syndrome de Pick, Chorée de Huntington, Maladie de Steel-Richardson, syndrome amnésique). En quoi le vieillissement perturbe-t-il la mémoire ? On a longtemps cru que la perte progressive des neurones expliquait, à elle seule, les difficultés mnésiques des personnes âgées. Mais les recherches ont permis d'apprendre que notre capital de neurones est tellement important et sous employé que nous pouvons aller au terme de notre existence avec des potentialités préservées. Cela explique sans doute la qualité des performances mnésiques de certains sujets parfois très âgés. Pourtant qu'avec l'âge, se produit souvent un ralentissement des capacités cérébrales. La transmission des informations est moins rapide, les nouvelles acquisitions sont plus difficiles et les souvenirs anciens existent mais leur rappel est plus complexe. Le vieillissement de la mémoire s'explique également par une baisse de l'activité psychique, de l'exercice physique et intellectuel ainsi que par un isolement. La mémoire a besoin d'être fréquemment sollicitée pour bien fonctionner : sa gymnastique doit se poursuivre le plus tard possible. Peut-on stimuler sa mémoire ? Précisons tout d'abord que, selon les pharmacologues, il n'a pas encore été fait la preuve qu'un médicament présumé efficace pour «doper» la mémoire ait eu des effets probants auprès de sujets dotés de capacités mnésiques normales ou supérieures. En effet, les produits concernés n'ont jamais fait l'objet des évaluations scientifiques requises. Explication : aucune substance chimique ne peut être considérée comme spécifique de la mémoire. Tout au plus peut-on, dans une période limitée, améliorer les vigilances, la concentration, diminuer l'anxiété. Ces fonctions, lorsqu'elles sont altérées, perturbent les performances mnésiques. Mais il faut faire preuve de prudence : la meilleure illustration nous est donnée par les étudiants qui, en période d'examens, prennent des stimulateurs et des excitants. Car s'ils activent certaines fonctions, ils nuisent en même temps au sommeil si important dans la qualité de la mémoire.