L'obésité est l'un des principaux facteurs de risque de cancer. Cependant les médecins oncologues ont remarqué une chose étonnante: Les patients en surpoids réagissent parfois mieux que les autres à des médicaments qui exploitent le système immunitaire pour combattre les tumeurs. Sciencemag rapporte que les chercheurs avancent une explication possible: l'obésité affaiblit le système immunitaire et favorise la croissance tumorale en stimulant les mêmes molécules que ces médicaments ciblent. Ceci parait contradictoire mais la suite éclaircira vos doutes. «Dans l'ensemble, tout le monde suppose que l'obésité est toujours mauvaise. Mais avec ces médicaments, le résultat est positif», déclare l'immunologiste du cancer à l'Université de Californie Davis, William Murphy, qui dirigeait les travaux avec l'oncologue Arta Monjazeb, publiés le 12 novembre dans Nature Medicine. Murphy pense que cette découverte pourrait indiquer des moyens de rendre les médicaments plus efficaces chez tous les patients atteints de cancer. Le mécanisme de ces médicaments Appelés inhibiteurs de points de contrôle, les médicaments bloquent l'activation des récepteurs de la protéine PD-1, à la surface des cellules immunitaires, appelées lymphocytes T. Le corps déclenche naturellement l'atténuation de la réponse immunitaire par la PD-1, mais les tumeurs peuvent également inciter la PD-1 à se protéger. La levée de ce «frein» moléculaire permet aux lymphocytes T d'attaquer les cellules cancéreuses. Les inhibiteurs de la PD-1 ont fait disparaître pendant des années des tumeurs incurables chez les personnes atteintes de mélanome, de cancer du poumon et de certains autres types de cancer. Mais dans la minorité de patients qui réagit aux médicaments on trouve un pourcentage disproportionné de personnes en surpoids, selon une étude réalisée au début de l'année dans The Lancet Oncology. Des lymphocytes T « épuisés » L'équipe de Murphy après avoir confirmé que les tumeurs se développaient plus rapidement chez les souris obèses, a étudié les lymphocytes T de souris, de singes et de personnes obèses. Ils ont découvert que les cellules étaient «épuisées». Elles étaient lentes à proliférer et avaient cessé de produire des protéines sécrétées qui stimulent d'autres aides du système immunitaire. Ils ont également affiché plus de PD-1 que la moyenne. La leptine, une hormone fabriquée par les cellules adipeuses (de graisse), est l'un des facteurs de l'excès de PD-1. Les animaux et les personnes en surpoids produisent des niveaux élevés de l'hormone qui signale en temps normal au cerveau que l'organisme a assez mangé. Mais la leptine affecte également le système immunitaire, et l'équipe de l'Université de Californie Davis soupçonne qu'elle déclenche une voie de signalisation de la PD-1 chez les cellules T. Cet excès de PD-1 présente pourtant un avantage, ainsi chez les souris obèses, les lymphocytes T réagissent de manière inhabituelle aux inhibiteurs de la PD-1, rapporte l'équipe dans Nature Medicine. Une fois le médicament relâché, il permet aux lymphocytes T de se concentrer sur la tumeur, nourris par le glucose et d'autres nutriments abondants dans les tissus de l'organisme en surpoids, ce qui les rend plus efficaces que chez les personnes de poids moyen. Devenir obèse pour mieux guérir? Murphy envisage de déterminer si un régime riche en graisses destiné aux souris de poids normal atteintes d'un cancer, pourrait augmenter leur réponse aux inhibiteurs de la PD-1. Mais de tels traitements pour les patients cancéreux pourraient aussi avoir des effets nocifs, d'autres expériences seront donc nécessaires.