La première facture d'eau et d'électricité reçue par les Marocains, après trois mois de suspension de la lecture des compteurs, a suscité la colère des itoyens, qui se sont déchaînés aussi bien dans la rue que sur les réseaux sociaux. Alors que les opérateurs d'eau et électricité n'ont repris la lecture des compteurs que le 1er juin, après 3 mois de suspension des tournées des releveurs et la distribution de factures, les internautes ont estimé la facture de juin « exagérément élevée« . Pour la Rédal, le distributeur d'eau et d'électricité de la capitale qui compte près de 700.000 clients pour l'électricité et 600.000 l'eau (1.3 million de compteurs), et qui n'a pas échappé aux critiques, la cause de cette hausse observée au niveau des factures n'est autre que le changement du niveau de consommation ou encore des habitudes de consommation des clients, suite à la pandémie du Covid-19, qui les a obligés à se confiner chez eux pendant toute cette période. Dans une interview accordée à Hespress Fr, Abdessamad Zahri directeur clientèle et marketing à Rédal, a avancé, dans un premier temps, qu'il s'agit « d'un contexte assez spécial« , notant que malgré la suspension de la lecture des compteurs, il y a eu une estimation de la consommation des mois d'avril et de mai, selon la consommation moyenne de chaque client durant la même période en 2018 et 2019, soit avril et mai 2018/2019. « Vers la dernière semaine du mois de mars, tous les distributeurs d'eau et d'électricité au Maroc, ont reçu une note d'instruction et de recommandations qui détaille des actions devant être entreprises par l'ensemble des distributeurs au Maroc. La Rédal s'est conformée à 100% aux instructions des autorités publiques, dont l'arrêt de la lecture des compteurs à compter du 23 mars, la non-distribution des factures papier, ou encore l'estimation de la consommation, selon des règles précises« , nous a-t-il expliqué. Pour ce qui est de l'estimation des mois d'avril et de mai, le responsable nous a assuré que lorsque les instructions des autorités ont été appliquées à la lettre, la réalité était tout autre. « Avant la pandémie, les gens sortaient de chez eux à 7h du matin et ne rentraient qu'après 18h, soit en moyenne 10h en dehors de la maison, et de ce fait la consommation était faible. Pendant la période de confinement, les enfants ont arrêté l'école et se sont retrouvés confinés à la maison, le télétravail a commencé, et le niveau et les habitudes de consommation ont changé. Si un client était habitué à consommer 10 m3 ou 150kwh par mois, et recevait une facture de 250 dhs, il faut juste observer combien de fois il a utilisé la douche dans son foyer, composé par exemple d'une famille de 5 personnes, combien de fois ils ont rechargé leur téléphone, combien de fois ils ont utilisé l'éclairage dans les chambres« , fait noter le responsable, soulignant que toute cette consommation n'était pas envisageable avant la pandémie. Donc, poursuit-il, pour un client qui recevait une facture mensuelle ne dépassant pas les 250 dhs, sa consommation, pendant cette période de confinement « a doublé, voire triplé« . Dans les détails, il nous explique que « les mois d'avril et mai, ont été estimés selon l'historique avec des moyennes de consommation en baisse, mais la réalité est que la consommation était élevée« , rappelant que « les mois d'avril et de mai de chaque année, représentaient des vacances scolaires de 15 jours, et la majorité des familles voyageaient, et du coup la consommation est faible, ou encore le mois de Ramadan qui connait une grande consommation d'habitude ». Tous ces facteurs-là, dit-il, ont fait que la facture d'eau et électricité ait augmenté. Et de faire remarquer que si le client paye une « estimation » qui s'avère plus élevée que sa consommation réelle, Redal lui rend la différence, soit sur la facture suivante, soit par espèce dans une agence. S'agissant de la protestation d'une catégorie de clients quant à la hausse constatée sur la facture du mois de juin, qui représente également une facture de régularisation des mois d'avril et de mai, Abdessamad nous a indiqué, chiffres à l'appui, qu'en effet, « 46% des factures de régularisation après la lecture du 1er juin 2020, se sont révélées inférieures ou égales à la même période de 2019, 40% de facturation a connu une augmentation de l'ordre de 300 dh, tandis que les 14% restants des factures de régularisation ont connu une augmentation supérieure à 300 dhs« . Les deux dernières augmentations sont justifiés, selon le responsable, par « le changement des habitudes de consommation du client pendant la période de confinement, et le mois de Ramadan, qui a coïncidé cette année avec la pandémie du Covid-19« . Pour la facture de régularisation de ce mois de juin, et vu ce principe d'estimation imposé par les autorités publiques suite à la pandémie, il y a eu plusieurs cas de figure, tel que le client qui a quitté son domicile pendant la période de confinement pour se retirer ailleurs, pour cause de travail par exemple, et qui n'était pas présent dans son foyer. Sa facture a été estimée selon la moyenne normale de consommation des mois d'avril et mai 2018 et 2019, mais réellement en cette période de confinement il n'a rien consommé. Maintenant que la Rédal a repris la lecture des compteurs et peut faire ce constat, « il pourra être remboursé des sommes qui ont été surestimées, parce que sa maison était vide. Mais pour la majorité des clients Rédal, l'estimation s'est faits sur la base des mois 4 et 5 de 2019 et 2018″. S'agissant de la consommation réelle des clients Rédal, pour la période allant du 1er mars, dernière date de lecture des compteurs au 1er juin, date de reprise de la lecture, « c'est une consommation juste et exacte à 100%« , et n'est entachée d'aucune erreur, selon le distributeur, qui invite le client à se référer aux anciennes et actuelles données et vérifier par lui-même sa consommation. « La consommation prélevée sur les compteurs le 1er juin, à savoir la consommation du 23 mars au 1 juin, est exacte, car il s'agit d'un compteur qui continue de tourner et c'est la garantie entre le client et nous. Cette consommation qu'on a prélevée, on l'a déduite des estimations du mois d'avril et mai. Si par exemple, on a estimé pour un client le mois d'avril à 10 mètres cubes (m3) de consommation, et mai pareil, alors que pendant ces 2 mois de confinement il a consommé en réalité 40 m3 (du 1er mars au 1er juin), on prend les 40 m3 et on déduit les 10 du mois d'avril et les 10 du mois de mai estimé, et les 20 m3 restants entrent dans la facture de régularisation de ce mois de juin« , nous explique notre interlocuteur. D'autre part, plusieurs Marocains ont été mis au chômage par leurs employeurs lors de cette crise économique engendrée par la pandémie du Covid-19, ou encore une catégorie qui était à la base vulnérable, et dont la situation a empiré pendant cette crise sanitaire, mettant à mal leurs finances, alors qu'elles doivent honorer des factures élevées, notamment celle de l'eau et de l'électricité. Abdessamad Zahri assure à ce propos que Rédal « est consciente de la crise économique actuelle« , raison pour laquelle, elle a mis en place des mesures d'accompagnement des clients vulnérables, en concertation avec les autorités. « Tous les clients en difficulté de paiement, doivent juste réclamer cela, et leur dossier sera traité sur place. Il y aura des larges facilités de paiement. On ne peut être que compréhensif pendant cette période de pandémie. Et c'est du cas par cas« , conclut le responsable au sein de Redal.