La rentrée est un grand événement pour tous les parents d'écoliers au Maroc. Alors que les derniers vacanciers retardataires préparent leur départ pour rejoindre l'autre rive de la méditerranée, les familles marocaines, elles, se concentrent sur le coup d'envoi de la rentrée scolaire. Un événement annuel incontournable qui rythme la vie des parents et de leurs enfants au début de Septembre. Hespress FR a voulu savoir comment se passent les préparatifs, comment les libraires et les parents préparent la rentrée et surtout combien coûte-t-elle ? REPORTAGE Quand l'impatience et la pression se rencontrent 18 heures. L'atmosphère est pesante dans cette grande librairie de Rabat. La tension est palpable et les visages sont crispés. Tout le monde attend son tour pour que sa liste soit prise en charge par la quinzaine d'employés qui répondent aux multiples demandes des parents. Cette rentrée 2018 est marquée par un changement des programmes scolaires, ce qui affecte les manuels de l'Etat. « Les manuels de l'Etat ne sont pas prêts, ils ne sont pas encore commercialisés. Cela fait des semaines que nous sommes au téléphone avec les maisons d'édition. On nous dit qu'ils (les manuels scolaires du programme marocain, ndlr) vont être disponibles cette semaine, mais on n'a toujours rien » confie à Hespress FR, Mustapha un membre du staff de la librairie. Les parents, eux, ne comprennent pas, ils voudraient avoir une date. Regroupés devant une porte où il y a écrit « accès interdit », quelques parents attendent des nouvelles des livres en rupture de stock ou des fameux livres du programme national. « Vous êtes le numéro 23 madame, il va falloir attendre votre tour s'il vous plait », répond un employé à une femme qui n'a visiblement pas envie de faire la queue. Des passe-droits, tout le monde en veut. Un autre papa perdu dans la foule, essaye de négocier. « Cela fait des années que je suis client de votre librairie et on me dit que ma liste ne peut pas être traitée », grogne-t-il. Mais, avec les sollicitations incalculables, tout le monde est logé à la même enseigne. Chez les parents, chacun sa technique Alors que certains veulent en finir une bonne fois pour toutes avec toutes les fournitures, les cahiers, et les livres, certains prennent les choses à la cool, c'est le cas de Nora et son mari, de jeunes parents qui sont venus acheter un cartable, une trousse et un sac à goûter à leur enfant. Total des achats, 954 dirhams. « Nous essayons de faire les choses petit à petit. Les fournitures ce sera pour plus tard », nous déclare-t-elle à la caisse. « On prend les choses très au sérieux parce qu'on a pas envie de faire des allers et retour vers les librairies pendant tout le mois pour revenir chercher des fournitures manquantes. Les écoles ne plaisantent pas avec les fournitures ! », se plaint Naima, à bout de souffle dans un autre coin de la librairie. Dans cette librairie de la place, les préparatifs pour la rentrée ont commencé très tôt. « En juin, les écoles privées nous communiquent les listes des manuels scolaires +étrangers+ que nous devons commander. Les préparatifs de la rentrée chez nous commencent dès la fin de l'année scolaire », dit Mustapha. Très impliqués, les parents ne veulent surtout pas rater le début de rentrée car, une fois la machine lancée, tout roule comme sur des roulettes. Les professeurs sont contents de voir les écoliers impliqués et prêts pour commencer les cours, les parents sont soulagés de voir leurs bambins reprendre le chemin de l'école, et les enfants sont heureux de retrouver leurs amis. Dans le panier d'un parent, l'on peut remarquer même des protège-cahiers collés aux manuels et selon les employés de la librairie, les parents les plus organisés, ont déposé leur liste de fournitures scolaires en réservation dès juin et ont pu récupérer leur commande en juillet. Des factures salées A la caisse, les clients défilent et ne se ressemblent pas, les factures à contrario, sont plutôt similaires vu que la majorité des clients ont des enfants scolarisés dans le secteur privé, quant au public ce sera pour après puisque les élèves doivent attendre de rencontrer leur professeur pour noter à la main la liste des fournitures à acheter. Aziza, une des caissières de la librairie nous confie qu' « aujourd'hui, la plus grosse facture pour un seul enfant était de plus de 4.000 dirhams ». « En général, une liste complète par enfant se situe entre les 2.000 et les 2.500, des fois cela peut montrer jusqu'à 3.000 » ajoute-elle. Concernant les prix des fournitures « il y a eu une augmentation au niveau des prix des fournitures de haute gamme. Mais les fournitures locales de qualité moyenne, ont des prix incassables », observe Mustapha. Selon lui, la plupart des écoles privées exigeraient de la part des parents l'achat de marques précises de cahiers et de fournitures en tout genre, « par exemple il y a des écoles qui exigent des cahiers de 90 grammes, c'est la haute gamme des cahiers, et quand on a plusieurs cahiers à acheter pour différentes matières la facture grimpe vite », affirme-t-il. Cependant pour le secteur public, les frais ne sont pas les mêmes, pour les classes de même niveau, la facture est divisée par 3 d'après Mustapha. Les manuels, qui sont les plus chers dans la longue liste de fournitures, ne dépassent pas les 90 dirhams dans le programme du public, par contre, un seul manuel d'écoles privées peut aller jusqu'à 350 dirhams. « Aujourd'hui, certaines écoles publiques exigent les mêmes manuels des écoles privées surtout pour le français, et cela en parallèle avec le programme marocain. Malheureusement les livres et les programmes nationaux changent tous les 3 ou 4 ans, mais le contenu reste vide », déplore le libraire. Said, un père d'une quarantaine d'années, le front perlé de sueur arrive à la caisse perplexe. « Ne me faites pas peur » dit-il à la caissière Aziza. Venu chercher des pièces manquantes de ses fournitures, sa facture s'élève à plus de 1.200 dhs. Il pense que sa carte bancaire ne va pas passer. « J'ai dépensé presque 8.000 dirhams entre deux enfants, le premier est au CE7 et l'autre est au primaire » nous confie-t-il. « Avec les frais d'inscription et l'Aid El Kebir, si on rajoute les fournitures, on a du mal à s'en sortir » ajoute-il avant de s'en aller. A la sortie c'est le soulagement, les parents, les bras chargés de boites et de sachets contenant leurs achats finissent par pousser un « ouf » de satisfaction pour exprimer la fin de leur calvaire. Mais ce n'est pas fini, les flyers de publicité pour les écoles de soutien scolaire qu'on leur glisse entre les mains, leur rappellent les frais supplémentaires auxquels ils devront s'attendre cette année. *Les noms des personnes ont été changés.