Le Caire : Début du sommet extraordinaire de la Ligue arabe avec la participation du Maroc    Gabon: le président Oligui Nguema annonce sa candidature à la Présidentielle du 12 avril    Les violations des droits de l'Homme dans les camps de Tindouf, en Algérie, dénoncées devant le CDH    Mohamed Ould Errachid s'entretient à Rabat avec le ministre albanais des Affaires étrangères    Aéronautique : Hausse des exportations de 14,2% en janvier    Bank Al-Maghrib dément une fausse information utilisant son identité    Sonasid: Le chiffre d'affaires consolidé en hausse de 10% à fin 2024    Crédit bancaire : l'encours augmente à 1.134,7 MMDH à fin janvier    Investissement régional : le social rafle la mise    HPS et Enigma s'associent pour renforcer la détection de la fraude grâce à l'IA    Sahara : "la plupart des pays de l'UE partagent notre position" (José Manuel Albares)    Donald Trump suspend les aides militaires à l'Ukraine    Accord de 1968 : l'ultimatum de Paris face au silence d'Alger    Agence Bayt Mal Al-Qods: distribution d'aides alimentaires en faveur d'établissements de protection sociale dans la Ville Sainte    Donald Trump confirme l'application mardi de taxes douanières contre Ottawa, Mexico et Pékin    Dakar 2025: comment Dacia a sécurisé ses véhicules (VIDEO)    LDC. 8es de finale aller / Real - Atlético: La grande affiche de de la soirée !    Footballeurs marocains du Monde: Le DTN belge désapprouve le choix de Talbi    Footballeurs marocains du Monde: Brahim Diaz MVP du mois de février au Real !    Fès-Meknès : 1,1 MMDH pour la création d'un pôle santé    Températures prévues pour le mercredi 05 mars 2025    Appels à projets pour la subvention des associations et instances culturelles, syndicats artistiques et festivals au titre de 2025    Jour 1 – Programmation spéciale Ramadan : Les chaînes nationales dominent le prime-time    Histoire et traditions : de l'ère des Idrissides à aujourd'hui, un héritage préservé    1er jour de Ramadan : les chaînes nationales dominent le prime-time    Spain dismisses U.S.-Morocco ties as a threat to Ceuta and Melilla's status    Kaïs Saïed skips Arab Summit in Cairo, aligning with Algeria    Marrakech court increases sentence for head of Al Haouz earthquake victims' group    Tbib Expert Ep41. Ramadan : Cinq comportements à éviter pour prévenir les migraines    Affaire Jerando : nouvelles auditions et déclaration attendue du parquet    Bourse de Casablanca : clôture en territoire négatif    Lions de l'Atlas : Vers un retour de Samy Mmae en équipe nationale?    Le Maroc, deuxième pays d'origine des naturalisés dans les pays de l'UE    En quête de sous-marins, le Maroc attise la rivalité entre les chantiers navals européens    Mohamed Benaïssa, l'adieu à «un bâtisseur de ponts» : l'hommage de Youssef Amrani    Le Projet « Culture Mali 2025 » lancé    MAS : Le coach allemand Stepić signe son contrat et définit son staff technique    Real Madrid : Brahim Diaz élu joueur du mois de février    Peine de mort en Iran. Un mercredi noir    La Sierra Léone annonce sa première Fashion Week    Fès : Le festival des musiques sacrées sous le signe des « Renaissances »    Après l'annulation de l'Aïd, les éleveurs face aux mesures d'accompagnement    L'heure de la responsabilité    Figuig : Les habitants et la Coalition s'opposent à la "privatisation" de la gestion de l'eau    Les couleurs du ciel du mardi 4 mars    Parution : Abdeljalil Lahjomri repeint le passé pour mieux écrire l'avenir    Entre le Maroc et la Belgique, Chemsdine Talbi a fait son choix    Edito. En toute humilité…    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



SDF : Cette vie pas comme les autres !
Publié dans Finances news le 13 - 12 - 2007

* Doctorat en philosophie pour l’un, père de famille chassé par sa propre progéniture pour l’autre, les récits des SDF témoignent de l’insolite de cette vie.
* Redoutant plus les agressions qu’autre chose, la plupart craignent davantage leur prochain que le froid.
* Récit d’une tournée nocturne.
La nuit, les rues de Casablanca deviennent une jungle dangereuse et pourtant, c’est une jungle peuplée, notamment des «sans domicile fixe». Il est minuit à Hay Al Amal, un des quartiers les plus animés le jour. Il est plutôt austère et peu accueillant en cette nuit de décembre. Les stores des boutiques sont baissés et pourtant quelques mouvements sont perceptibles à proximité de la mosquée du quartier. Des formes humaines emballées dans d’énormes sacs en plastique. Ils sont une dizaine tassés dans un petit espace.
Mon collègue et moi avons presque honte de troubler leur quiétude. L’un d’eux nous prie de quitter les lieux gentiment pour ne pas créer de zizanie qui amènerait les gens du quartier à les chasser. Il assure néanmoins que, dans ce quartier, les gens sont généreux et les tolèrent bien.
Le froid est bien le cadet de leur souci face à l’animosité dont peuvent faire preuve certains passants ou leurs semblables. Le froid est dans ce cas un moindre souci. Il n’existe aucun chiffre sur le nombre des SDF à Casablanca, mais l’on a appris que le pôle social de la Wilaya du Grand Casablanca a lancé un recensement qui est en cours actuellement.
Minuit et demi, sur le Boulevard Hassan II, une silhouette, ou plutôt une ombre déambule du côté du parc Yasmina. Il y a de quoi, ce SDF ne peut pas encore s’installer à cause des rondes de policiers en civil à moto qui ratissent le parc de long en large. Il a néanmoins hâte de retrouver son banc. La surprise est c’est quand ce SDF frappe à la vitre pour demander l’aumône dans un français impeccable. Mi-saint d’esprit mi-fou, il explique que c’est sa femme qui l’a rendu fou par des sortilèges qu’elle lui aurait jetés. C’est ainsi qu’il s’est retrouvé à la rue, laissant derrière lui une situation sociale et matérielle confortable. Un de ses trois enfants travaille dans une banque et le deuxième poursuit ses études en France. Du moins, à l’époque où il avait quitté le domicile conjugal. Difficile d’obtenir un discours cohérent de ce SDF qui perd le fil de ses pensées et sombre dans ses souvenirs. Il assure qu’il a un Doctorat en Philo. Sa manière de parler et ses connaissances laissent croire que cet homme, aux habits crades et aux ongles en deuil, la cinquantaine, est un homme très instruit. Il préfère la vie dans la rue à la compagnie des siens. «Au moins les policiers compatissent, ce qui n’est pas le cas ni de ma femme ni de mes enfants. Je leur ai tout offert et ils demandaient toujours plus. En ce lieu, je suis tranquille. Je n’ai rien et je ne veux rien, juste la paix. Comme le disait Thomas Hobbes : l’homme est un loup pour son frère, l’homme». À l’automne de sa vie, il ne regrette rien de sa vie passée et n’attend rien de ses jours futurs.
Il nous plante là et s’en va récitant un texte de Nietzsche. La vie est vraiment insolite !
Changement de décor. À proximité d’une grande enseigne de restauration rapide sur la corniche de Casablanca, une bande de quatre adolescentes viennent mendier les restes des clients, une boisson, une cigarette ou un dirham… Tout est bon à prendre pour ces jeunes à la rue depuis bien des années. L’un d’eux, Mohamed surnommé « Chmikira » à force de sniffer la colle, surpasse sa méfiance et confie «J’ai seize ans et cela fait quatre que je vis dans la rue». Son calvaire commence quand son père se remarie en décidant d’avoir la garde de ses trois enfants. À l’époque, Mohamed à 12 ans et souffre de la violente séparation de ses parents. Il est de surcroît confronté à une marâtre jeune et n’ayant aucune envie d’élever les enfants de son époux. Et elle s’acharne sur le plus jeune, Mohamed qui fugue une première fois avant d’être coopté par l’association Bayti. Son père vient le chercher et ils rentrent ensemble à la maison. Mais le mauvais traitement dissuade Mohamed de rester dans le foyer parental. Depuis, cet enfant de bonne famille, sillonne les rues de Casablanca. La nuit, avec ses amis de fortune, ils se planquent dans l’une des ruelles de la corniche après que les pubs ont fermé leurs portes. Une cicatrice sur sa joue témoigne que les nuits «à la belle étoile» ne sont pas toujours paisibles. «Avant de s’installer à la Corniche, je squattais avec d’autres un immeuble à la Médina où éclataient souvent des bagarres la nuit et cette cicatrice émane d’un coup de couteau que m’a asséné un vieux après que j’étais endormi sur sa place». C’est alors que ces quatre ados ont décidé de se soutenir mutuellement, car, un pote à lui a été violé par plus âgés que lui. Un monde de la nuit cruel dont ils n’émergent qu’aux premières lueurs du jour. Mais l’attroupement de ces quatre ados leur vaut quelques soucis et ils sont souvent pourchassés par la police. Actuellement, ils sont devenus familiers avec les agents de police; cela dit, les passants s’en méfient, les confondant avec des pickpockets. Mohamed reconnaît avoir commis quelques forfaits, mais il a été poussé à le faire puisque personne ne témoignait de charité à son égard. Il affirme néanmoins ne plus avoir volé depuis l’époque. «Ana ould ennass, malgré tout !». Il rêve de mener une vie normale et de poursuivre ses études… De trouver un travail et fonder une famille. Mais, il ne semble pas prendre conscience que ce n’est qu’un mirage par la colle forte qu’il sniffe. Le voir s’éloigner, rejoindre un autre monde parallèle au nôtre est une sensation bizarre. Cette impuissance de le retenir et cette frustration de ne pouvoir rien faire pour le sortir de là. Disons que nous vivons dans une société qui n’a prévu aucune alternative pour ces gens.
Il ne faut pas croire que seuls ces jeunes sont touchés par ce phénomène. Même au crépuscule de sa vie, on n’est pas à l’abri. C’est le cas d’un septuagénaire qui vit dans une célèbre rue de Mers Sultan. Après plusieurs années de bons et loyaux services à la société et après avoir trimé pour élever ses enfants, ces derniers le mettent à la porte, âgé et malade sans aucun scrupule, raconte un gardien de voiture qui s’était pris de sympathie pour lui. «Je surveille les voitures mais lui aussi. Je veille à ce que «les Oulad Lhram» ne lui volent ses affaires». Le vieil homme a tellement été choqué de l’acte de ses enfants qu’il en reste à quia. Il vit essentiellement de la charité des gens et du proprio du bar qui lui a donné l’accord pour installer son bric à brac juste à côté. Il est d’autant plus toléré dans le quartier. Ne touchant pas à une goutte d’alcool, il a plutôt bonne presse chez ses voisins de «palier». Après cette longue balade nocturne, j’ai presque honte de prendre un bain chaud et retrouver un lit douillet, en pensant que d’autres croupissent dans le froid et courent tous les dangers à l’extérieur. Une réalité qui n’empêche pas trente-cinq millions de Marocains de dormir la nuit et pourtant, chacun pouvait bien se retrouver à la place de l’un de ces SDF et aurait certainement trouvé une personne pour lui tendre la main.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.