* La part des dépenses aussi bien de l'Etat que du privé est très minime. Quelle place occupe la culture au Maroc ? La question revient souvent. Ce secteur qui reflète, en quelque sorte, l'image de marque du pays et son niveau de développement reste à la traîne par rapport aux autres secteurs, et pour cause : les moyens alloués sont très dérisoires et les citoyens restent peu demandeurs de produits culturels. Aussi bien au niveau public que privé, les dépenses pour la culture sont minimes, voire médiocres, par rapport aux autres dépenses. En comparaison avec des pays similaires, le Maroc reste sous-développé en la matière. Le ministre de la Culture reconnaît que « le secteur est le moins loti en matière de moyens mais il n'empêche que le gouvernement a enregistré plusieurs réalisations». En effet, le Budget de l'Etat est très faible et sert essentiellement à assurer les dépenses de fonctionnement. Cependant, il est comblé par d'autres budgets, notamment le Fonds Hassan II qui réalise une bonne partie des projets et les budgets de coopération de certains pays amis. Et d'ajouter : «Le rayonnement culturel du Maroc est présent sur la scène internationale. De grandes expositions sont réalisées partout. D'autres verront le jour. Des expositions permanentes auront lieu au Mexique, au Brésil, à Berlin. Il y a, aussi, un certain nombre de rencontres où le Maroc est présent. Il est aussi présent, pratiquement, dans tous les grands festivals du monde et dans toutes les grandes biennales des arts plastiques». La participation des communes ou des régions apporte un soutien fort. Le nombre de festivals ne dépassait pas les cinq ou six par an alors qu'actuellement on en compte plus de 80 dont certains sont reconnus au niveau international comme celui des musiques sacrées de Fès ou celui des Gnaoua d'Essaouira. Pour ce qui est du 7ème art, le Fonds pour le développement de l'audiovisuel a contribué largement à la relance de la production cinématographique nationale. Mais les réalisations restent monopolisées par certains producteurs ou metteurs en scène. Le film marocain est très apprécié par les spectateurs, mais les productions, en l'absence d'une subvention de l'Etat, demeurent déficitaires. La production de films destinés à la télé connaît un fort engouement. Pour les salles obscures, la situation ne cesse de se dégrader faute de clients; malgré les mesures de relance entreprises par l'Etat. Au niveau du théâtre, la production reste saisonnière, notamment durant la période de Ramadan. Malgré les 60% de financement garantis par l'Etat, le nombre de pièces créées n'arrive pas à atteindre la vitesse de croisière. Les représentations demeurent concentrées dans les grandes villes du Royaume en l'absence de tournées régionales. Presque toutes les troupes théâtrales bénéficient du soutien financier de l'Etat. Il est donc difficile, pour les nouvelles troupes, notamment régionales, d'assurer leur pérennité ou leur entrée dans le « club des troupes subventionnées ». Au niveau de l'édition, le marché des livres reste hésitant. Si le livre scolaire connaît une forte demande expliquée en cela par son aspect obligatoire et par l'évolution démographique, les autres formes d'édition demeurent fragiles. Haj Abdelhadi El Fassi, un libraire installé de longue date au quartier Habous, a expliqué que «l'essentiel de son chiffre d'affaires, soit plus de 90%, est réalisé durant la rentrée scolaire pour une période qui ne dépasse pas les trois mois. La même situation est perceptible chez les autres libraires ». El Fassi a indiqué que « l'investissement dans le livre scolaire assure une marge bénéficiaire, ce qui n'est pas le cas pour les autres publications». Quant au profil des adeptes de la culture ou les clients du livre, El Fassi a annoncé que « certains sont des clients réguliers et optent pour un domaine bien déterminé. Ce sont généralement des intellectuels avec un revenu adéquat». Pour ce qui est de la presse écrite, le Maroc est déjà en retard par rapport à des pays similaires; aussi bien au niveau des tirages que de la diffusion. Le pays arrive à peine à dépasser les 300.000 exemplaires, soit un journal pour 100 habitants. C'est-à-dire en deçà de la moyenne mondiale. En Egypte, Al Ahram tire à 1 million d'exemplaires. En Algérie, Al Moujahid a une diffusion de 500.000. Malgré les subventions accordées au secteur, le coût de l'édition et la faible demande demeurent un handicap majeur. «Le coût des facteurs et l'arrivée de l'internet ne sont pas les seuls motifs qui expliquent cette situation. Déjà, cette habitude de lire et de dépenser pour la lecture n'est pas tout à fait ancrée chez les Marocains », a affirmé Youssef Abouali, professeur à l'Université de Settat, et d'ajouter que «les Marocains ont une préférence pour l'audiovisuel, notamment gratuit. 2M, du temps de l'abonnement, n'arrivait pas à assurer sa continuité. Sa survie il la doit à son retour au secteur public. Ceci explique aussi le piratage de certaines chaînes cryptées étrangères. Il y a donc une demande mais elle n'est pas solvable ».