Depuis les derniers mois de 2013, le marché des taux s'est «calmé» pour faire profiter le Trésor public de meilleures conditions d'endettement et de liquidités. Simple correction ou mouvement de fond ? L'Etat, en tout cas, ne se pose pas de questions. Il profite de cette détente pour se gaver de cash. Pendant le mois de janvier, le Trésor a fini par dépasser ses besoins mensuels estimés en début de mois. Il avait en effet annoncé préalablement vouloir lever 8 Mds de dirhams pendant cette période mais ce sont en réalité quelque 9,1 Mds de dirhams de bons de Trésor qu'il a placés sur le marché. Non pas que ses besoins ont évolué, mais le marché lui offre de meilleures conditions d'endettement. Alors il en profite ! En face, ce sont pas moins de 17 Mds de dirhams de bons de Trésor qui ont été demandés par les investisseurs. Les analystes d'Attijari Intermédiation qui rapportaient déjà la semaine dernière un record de demande sur le marché primaire à cause des roulements de positions, évoquent cette semaine un nouveau record de demande. La confrontation entre l'offre de papier frais et cette demande a naturellement causé une détente des taux. Un phénomène qui, après avoir touché des maturités longues peu significatives, s'étale aujourd'hui aux maturités moyennes et courtes. «Ainsi, la maturité 52 semaines cède 7.9 pbs pour un montant retenu de 350 MDH et la maturité 2 ans se délaisse de 5.3 pbs pour un montant de 650 MDH», expliquent les analystes d'ATI. Quelle crédibilité donner à cette baisse ? D'abord, revenons sur la hausse des taux qu'a connue le Maroc les années passées, pour reprendre l'analyse faite par Hamid Tawfiqi, CEO de CDG Capital lors des dernières Assises de la finance en 2013: «La hausse de la partie haute de la courbe des taux est tirée par le 10 ans et le 15 ans et cela me semble incohérent. Normalement, cette partie de la courbe est tirée par l'inflation, or l'inflation est stable. Même la contagion aux taux courts est illogique car ces derniers sont habituellement tirés par la hausse du taux directeur de BAM. Mais il n'y a pas eu de hausse du taux directeur. Ce dernier baisse constamment». Tawfiqi avait conclu à l'époque que la seule explication à la hausse généralisée des taux est à rechercher du côté du déficit grandissant de l'Etat, de la perception qu'en ont les investisseurs voire même de leurs anticipations sur le futur du déficit. Peut-on alors avancer que la détente actuelle provient d'une meilleure appréciation du risque de déficit budgétaire par les investisseurs ? Peut-être. Car les chiffres du HCP et de BAM montrent qu'une détente de cette composante budgétaire sera observée en 2014 avec un retour du déficit au niveau de 5%. Cela pour la tendance de fond. A court terme par contre, la demande grandissante sur le marché primaire peut être expliquée par le roulement des positions de 2013. Une demande qui a naturellement provoqué un ajustement par la baisse des taux. A. H. Un besoin urgent d'efficience Le marché de la dette souveraine est l'épine dorsale des marchés de capitaux car, c'est grâce à lui que se fixe la courbe des taux, référence pour l'ensemble des instruments financiers. Or, aujourd'hui, ce marché manque de liquidités sur les maturités longues, ce qui fausse la lecture que l'on peut faire du comportement des investisseurs sur les taux à long terme. Aussi, l'absence de courbe zéro-coupon de référence rend la fixation des prix sur le marché de la dette privée peu exacte.