Le Cube, independent art room – un espace d'exposition, de résidence et de recherches axé sur les pratiques artistiques contemporaines –, situé dans le cœur battant de la capitale, hébergera, du 7 novembre au 7 décembre, la manifestation «Etat d'urgence d'instants poétiques» qui devait poser ses valises au Jardin d'Essais Botanique, un lieu de cent-six ans. Le visiteur aurait pu lézarder et déambuler à sa guise dans ses allées de végétaux, d'essences rares et d'étonnants arbres fruitiers avant que ses pas ne le mènent à la découverte de cette obsession de la nature qui hante les œuvres réunies pour cette manifestation orchestrée de main de maître. Or, «à quelques jours de l'inauguration de cette nouvelle édition et en l'absence d'une réponse claire de la part des autorités locales, «j'ai décidé de déplacer EUIP du Jardin vers l'Espcae le CUBE», explique Bouchra Salih, directrice fondatrice du projet (…) L'art est la plus grande forme d'espoir et en cette période de pandémie, mon défi est de maintenir la création artistique et d'aller à la rencontre du public dans le respect des mesures préconisées», lit-on dans un communiqué. Pour un thème original, me direz-vous : la nature. A cela répond cependant le regard croisé des artistes rassemblé(e)s : immersif et hautement poétique, plus fouillé, rejoignant alors, par son prisme, certaines questions autrement plus actuelles, et touffues : soit le rôle de la nature, le défi de la durabilité environnementale…, de l'humain à son milieu, sommé de coexister et de s'adapter sous peine de périr tel Icare brûlé par une trop grande confiance en sa toute-puissance d'humain trop humain. Ceci dit, on se réjouira autant que l'on s'inquiètera. Une charmante expo qui offre à voir les travaux de Khadija El Abyad, Othmane Benebara, Bryony Dunne, Mohamed El Baz, Abdessamad El Montassir, Jumana Manna, Abdeljalil Saouli et Loutfi Souidi, entre autres indicibles fascinations. Que des artistes exceptionnels. Il n'y a pas lieu d'en être surpris, car leur choix émane d'une fine gourmette des arts. La manifestation ne se cantonne pas dans les limites d'une expo, aussi prenante soit-elle. Elle comporte également une animation pédagogique, rencontre et conversation entre artistes et élèves d'arts appliqués; «les murmures d'artistes, émission radiophonique», une table-ronde de réflexion où les artistes racontent et discutent en immersion au cœur de leurs démarches créative; des projections, «Cycle Cinéma». De surcroît, «le public, pendant sa visite de l'exposition, sera invité, à travers cette installation posée à l'entrée du jardin, à récupérer un morceau de bois où sera gravé une citation d'artistes». Car, «à partir du contexte que nous traversons depuis mars dernier, le confinement, la distanciation sociale, un retour à soi, l'absence physique..., mon vœu est de faire passer des phrases pour donner un nouvel élan au public d'EUIP», affirme Bouchra Salih. La 3ème édition d'«Etat d'urgence d'instants poétiques» est maintenue, mais quitte exceptionnellement le Jardin d'Essais Botaniques de Rabat. «Maintenir le cap», c'est tout le mal qu'on lui souhaite. D'autant qu'elle est une initiative salutaire, salvatrice.