La CGEM devient partie prenante du programme Dun Trade Maroc mis en place par Inforisk. Le programme permettra de déterminer le comportement de paiement des entreprises marocaines.
Par M.D
Il est connu de tous que sous l'impulsion royale et la détermination de l'argentier du Royaume, Mohamed Benchâaboun, le public est en passe d'apporter des réponses concrètes à la problématique des délais de paiement (mise en place de la plateforme Ajal, publication des délais de paiement des EEP, etc.). En revanche, en matière de règlement des entreprises à temps, le secteur privé continue d'être le dernier de la classe, voire l'exemple à ne pas suivre, et ce en dépit de l'existence de mesures législatives, notamment les lois 32-10 et 49-15 relatives au délai de paiement. Aujourd'hui, les chiffres sont éloquents et commandent de nouvelles mesures pragmatiques à même d'amener les entreprises à régler leurs fournisseurs dans les délais (entre 60 et 90 jours). 40% des défaillances des entreprises marocaines sont dus au fait de l'allongement des délais de paiement. Seuls 15 à 20% des entreprises payent leurs fournisseurs à temps. Ce pourcentage se rapproche des 70% dans les pays cités en exemple en matière de délai de paiement (Danemark, Taiwan, Pays-Bas, Allemagne, USA). Entre 2014 et 2018, les délais de paiement clients des TPE oscillaient entre 6 et 8 mois. Les crédits interentreprises culminent aujourd'hui à près de 420 Mds de DH. Force est d'admettre qu'une telle situation freine l'investissement et empêche l'essor des entreprises nationales. Dans ce contexte, la dernière initiative de la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM) et Inforisk sonne comme un sursaut face à ce qui constitue un goulot d'étranglement pour l'économie nationale. En effet, lors d'une rencontre organisée récemment à Casablanca, les deux entités ont signé une convention de partenariat. Cette dernière permettra au patronat de disposer d'une source de données fiables et à jour sur les délais de paiement, à la fois des secteurs public et privé. Pour rappel, la CGEM est membre de l'Observatoire des délais de paiement, censé jouer les premiers rôles pour la limitation du retard de règlement entre les entreprises. «La CGEM avait besoin d'un partenaire fiable afin de faire des propositions adéquates au niveau de l'Observatoire des délais de paiement», concède Salaheddine Kadmiri, médiateur de la CGEM.
Un partenaire de référence Le patronat s'est allié à un spécialiste du traitement des données d'entreprises, disposant dans sa base de données 600.000 sociétés marocaines et près d'1,6 million de bilans et 800.000 dirigeants et associés d'entreprise. «La question de la data est cruciale pour résoudre la problématique des délais de paiement», explique Khalid Ayouch, PDG d'Inforisk. Ce dernier n'a pas manqué de rappeler un triptyque essentiel pour le sujet : profil du client, solvabilité de la contrepartie et délais de paiement réels des entreprises et des entités publiques. Faudrait-il préciser qu'Inforisk est membre du réseau Dun & Bradstreet qui dispose de 100 milliards de data. Le réseau qui compte 100.000 clients et présent dans 220 pays, agrège les données de 330 millions d'entreprises. «Nous avons lancé récemment le programme Dun Trade Maroc qui permettra de déterminer le comportement de paiement des entreprises marocaines», affirme Khalid Ayouch. Ceci dit, il est ressorti des échanges lors de la rencontre que la CGEM devra accomplir un énorme travail de sensibilisation de ses membres pour le succès du partenariat avec Inforisk. D'autant plus que les entreprises devront jouer le jeu, car Dun Trade Maroc, porté par Inforisk, est un programme d'échange et de partage d'informations sur le comportement de paiement des clients des entreprises adhérentes. Très concrètement, Dun Trade Maroc permettra de collecter mensuellement les expériences de paiement auprès des entreprises partenaires, avec à la clef la production d'une analyse comparative de paiement. ◆
Faut-il aller vers des sanctions ? Au cours des multiples échanges, des recommandations sont allées dans le sens de l'instauration d'un système de bonus-malus afin de favoriser les bons payeurs au détriment des mauvais payeurs dans le cadre des marchés publics. A cela s'ajoute l'interdiction de consigner dans les charges une facture réglée par une entreprise au-delà des délais de paiement légaux. Salaheddine Kadmiri n'est pas resté insensible aux propositions de l'assistance. «Au niveau de l'Observatoire, beaucoup de suggestions ont été faites. Toujours est-il que leur application pose problème sur le terrain», révèle-t-il, tout en rappelant que la CGEM, contrairement à l'Etat, ne peut contraindre (à l'aide de sanctions) les entreprises à régler à temps leurs fournisseurs.