«Le Maroc doit être riche avant de devenir vieux».
La rentrée scolaire qui a eu lieu récemment est de nature à légitimer le débat portant sur la centralité de l'éducation au Maroc, qui ambitionne d'intégrer promptement le club des pays émergents. D'emblée, soulignons que le Maroc, qui érige l'enseignement en priorité nationale, comme en témoignent les sommes colossales consacrées (6% du PIB), a réalisé des pas considérables en matière éducative depuis le début des années 2000. L'accès à l'éducation primaire est quasiment universel, même si l'on constate que plus on avance dans les cycles supérieurs (collège, lycée), plus la déperdition s'accentue. Le diagnostic est partagé par tout le monde : les résultats obtenus et la qualité de l'enseignement public sont largement en deçà des dépenses publiques consacrées à l'éducation des futurs acteurs de développement du Royaume, qui ne sont autres que les élèves et les étudiants. Au cours de ces dernières années, le rang du Maroc lors des différents tests internationaux (calcul, lecture, etc.) n'a au cesse de se dégrader. L'autre grief est que la grosse partie des dépenses liées à l'éducation est captée par la rémunération des enseignants. Ce qui laisse naturellement peu de ressources destinées au développement des contenus et outils pédagogiques. Tout ceci met à nu les profonds dysfonctionnements de nature à inhiber l'innovation, facteur-clef à même de permettre au Royaume de relever les multiples défis du futur. D'ailleurs, selon certaines organisations internationales, ce ne sont pas moins de 2 millions de postes de travail qui partiront tout simplement en fumée, à l'horizon 2030, à cause de la révolution technologique. Au regard des enjeux majeurs qui précèdent, le Bureau de la Banque mondiale de Rabat a jugé opportun d'organiser une rencontre portant sur l'innovation dans l'éducation au sens large (préscolaire, primaire, secondaire, enseignement supérieur).
L'innovation pour l'amélioration de l'éducation
Le message véhiculé par Marie Françoise Marie-Nelly, directrice de la Banque mondiale pour le département Maghreb, Malte, Moyen-Orient et Afrique du Nord, a le mérite d'être clair. Le modèle de développement du Maroc, assis sur la demande intérieure et qui a fait ses preuves, a atteint ses limites. Par conséquent, il est impératif de passer à une nouvelle ère, celle de l'augmentation de la productivité, ce qui suppose une meilleure formation du capital humain. L'autre atout du pays est qu'il se trouve dans une transition démographique favorable jusqu'en 2040. A ce titre, les spécialistes utilisent une formule éloquente : «Le Maroc doit être riche avant de devenir vieux». Au-delà de la question des ressources financières allouées au secteur de l'éducation, l'important est de revoir les façons d'enseigner, les contenus et les outils pédagogiques.
"L'innovation dans le système éducatif ne se résume guère à l'introduction de tablettes ou d'ordinateurs connectés dans les salles de classe"
Toutefois, à en croire Fadila Caillaud, responsable des programmes de développement humain de la Banque mondiale pour la région Maghreb, l'innovation dans le système éducatif ne se résume guère à l'introduction de tablettes ou d'ordinateurs connectés dans les salles de classe. La question est davantage complexe, puisqu'elle englobe toutes les structures qui touchent le système éducatif (formation des enseignants, préscolaire, développement des softs skills, etc.). La gouvernance et les stratégies de mise en œuvre des politiques publiques en matière éducative devraient aussi être revues. Cela dit, l'institution de Bretton Woods, qui s'attèle à bâtir une nouvelle stratégie pour le Maroc, prépare un programme financier destiné à l'éducation. Ce projet a sans doute motivé l'organisation d'une telle rencontre à Rabat, qui a enregistré la participation de plusieurs acteurs impliqués dans le système éducatif (professeurs) et l'accompagnement des jeunes pour l'innovation et le développement de l'esprit entrepreneurial au Maroc. A ce titre, il y a lieu de citer Injaz Al-Maghrib qui a épaulé depuis 2007 près de 95.000 jeunes issus de l'enseignement public. ■