Les pays du CCG représentent un marché important pour le Maroc. Le Royaume pourrait constituer également une plate-forme entre cette région et l'Europe et les Etats-Unis. L'éloignement géographique et les disparités entre les législations et les normes restent les principales contraintes. Le Maroc a accepté l'invitation du Conseil de Coopération du Golfe (CCG) de rejoindre cette entité régionale qui regroupe l'Arabie Saoudite, les Emirats Arabes Unis, le Qatar, Oman, le Koweit et Bahrein. L'invitation a été également adressée à la Jordanie, l'autre monarchie du Moyen-Orient avec qui le Maroc a conclu un ALE dans le cadre de l'Accord d‘Agadir. «A priori, le CCG a pour but déclaré une unification du système économique et financier des Etats membres. Mais sa création avait été justifiée lors de la guerre Irak-Iran. L'un des buts de cette organisation est de contrer l'expansionnisme iranien et le baasisme irakien», a indiqué Hassan Haddad, expert en relations internationales. «L'adhésion du Maroc et de la Jordanie, avec la bénédiction de Washington, a pour but essentiel de conter les révolutions arabes», a-t-il lancé Sur le plan économique, le CCG est une zone importante pour le Maroc, d'abord au niveau des échanges, des IDE et de l'implantation des travailleurs marocains. Concernant le commerce extérieur, la balance du Maroc est largement déficitaire et cela avec tous les membres du CCG. En outre, la facture pétrolière est très déterminante. En 2010, la valeur des importations des pays du Golfe s'est établie à 20,7 Mds de DH contre des exportations de l'ordre de 1,74 Md de DH. Le taux de couverture est de moins de 8,5%. Pour les Emirats avec qui le Maroc est lié par un ALE le solde est le moins déficitaire. Le Royaume a importé à fin novembre 2010 pour près de 1,43 Md de DH avec une croissance sur l'année de 7,29%. Malgré l'explosion des exportations avec un bond de 315,74% durant la même période de l'année 2010, elles ont atteint 1,06 Md DH mais ne parviennent pas à assurer la couverture des importations. L'Arabie Saoudite reste le plus grand partenaire de cette région. A elle seule elle assure près de 75% des échanges et fait partie du top ten des partenaires du Maroc. En 2010, la valeur des importations de ce pays a atteint près de 17 Mds de DH avec une progression de 53,11% sous le poids de la flambée des prix du pétrole, alors que les exportations sont restées limites à 185 MDH avec un recul de 21,99%. De ces importations, l'Arabie Saoudite détient la part du lion avec 85,7%. Au niveau des exportations, le Maroc ne parvient à échanger qu'une valeur de 1,747 Md de DH. Nos premiers clients sont les Emiratis avec une part de 72%. Ils sont suivis des Saoudiens avec 20,5%. Les pays du CCG représentent un marché très demandeur et de ce fait présentent des potentialités importantes pour les entreprises marocaines. Avec ses 36 millions d'habitants et un PIB global de 600 Mds de dollars, la région est considérée comme l'une des plus riches du monde où le climat des affaires est encourageant. Les investissements «khaligis» se distinguent nettement au Maroc. Mais chaque pays a sa propre stratégie. Les Koweitiens et les Saoudiens sont les plus anciens. Les premiers préfèrent les aides directes et les investissements privés comme le Groupe Corral qui détient la raffinerie Samir. Les seconds optent pour le financement des infrastructures à travers le Fonds koweitien d'investissement, notamment les autoroutes et les barrages. Les Emiratis n'ont débarqué au pays qu'à partir de 2005. Ils manifestent une prédilection pour le tourisme et l'immobilier. Cependant, les effets de la crise financière ont incité plusieurs promoteurs à plier bagage. La reprise actuelle annonce une certaine relance des fonds émiratis. La dernière visite du ministre du Tourisme au pays était destinée à alimenter le fonds dédié au secteur pour accompagner les investissements de la Vision 2020. Les Qataris pensent de plus en plus s'implanter au Maroc via des projets immobiliers ou touristiques. Le Groupe Diar a lancé le programme Houara il y a quelques années, un vaste projet de 2,7 Mds de DH sur une superficie de 230 ha. Les Bahrainis ont investi au Maroc depuis 2006. Avec un budget global de 1,4 milliard de dollars, Gulf Finance House de Bahreïn a créé le «Portail du Maroc». Il s'agit d'une cité équestre à Marrakech et d'un complexe touristique Cap Malabata à Tanger. Mais l'une des contraintes de taille pour l'intégration du Maroc au CCG est celle de l'éloignement géographique et aussi la différence des modèles économiques. Le Maroc reste intimement aligné sur les normes européennes alors que les pays du Golfe ont un penchant pour le style marocain. «Cette situation peut être un avantage pour le Royaume et servir de plate-forme d'échanges entre l'Europe et cette région. Un rôle qui a été essentiellement joué par l'Egypte», a expliqué Haddad. «Le Royaume peut également profiter de son ALE avec les USA pour doper ses échanges avec les pays du Golfe La région du CCG est connue mondialement comme zone d'immigration par excellence. Mais le nombre de nos MRE n'y dépasse pas 30.000. Ce sont les conditions de travail avec l'absence de législation dédiée, de couverture sociale ou sanitaire qui découragent les travailleurs marocains à s'y intéresser, préférant les pays européens. Pour les besoins de travaux de masse, les entreprises locales font appel à la main-d'œuvre asiatique considérée comme bon marché. Pour les postes intermédiaires, ils sont occupés par les Egyptiens, les Syriens ou les Palestiniens alors que pour les bons profils ce sont généralement des pays développés qui sont sollicités. Le Maroc peut, dans le cadre de conventions d'emploi pour des catégories professionnelles déterminées, décrocher des milliers de postes ou des contrats. Mais l'intégration du Maroc au CCG pose d'autres interrogations de taille. La question la plus significative est : qu'en est-il de l'Union du Maghreb Arabe (UMA) ? Le communiqué du ministère des Affaires étrangères a été clair à ce sujet : «L'adhésion du Maroc au CCG ne va pas compromettre son appartenance et son engagement en faveur de l'UMA». Mais plusieurs observateurs estiment que la situation qui reste tendue en Tunisie, la guerre en Libye, la fermeture des frontières avec l'Algérie compromettent toute construction du Maghreb, au moins dans le court et le moyen terme.