Les professionnels du pôle machinisme estiment que le nouveau système a eu des effets pervers sur les ventes des engins agricoles et, en conséquence, sur la mécanisation du secteur. Le département de tutelle se défend, arguant que cette stratégie a permis d'introduire de nouveaux plafonds et normes d'investissement, ainsi que l'actualisation de la procédure pour l'octroi des aides. Les ventes de matériel agricole enregistrent une nette régression au terme de l'année 2010, et ce bien que la saison soit considérée comme humide et les récoltes bonnes avec près de 80 millions de quintaux prévus. La demande pour ces outils est censée évoluer. La plupart des professionnels opérant dans le machinisme agricole ont noté cette évolution à la baisse. Derrière cette tendance, c'est le nouveau système des subventions qui est pointé du doigt. Pourtant, le nouveau dispositif a pour objectif majeur de renforcer la mécanisation de l'agriculture si l'on prend en considération l'enveloppe budgétaire qui lui a été dédiée. En effet, l'Etat a prévu un montant accordé aux subventions à la mécanisation de 2,3 milliards DH pour l'année 2010, en hausse de 27% par rapport à 2009. L'investissement total qui devrait être généré est de 7 milliards de DH. Mais les ventes ont à peine dépassé les 3.000 machines contre plus de 4.500 une année auparavant, soit une baisse de plus de 30%. Selon le ministère de l'Agriculture «ce système a permis d'introduire de nouveaux plafonds et normes d'investissement et d'actualiser la procédure pour l'octroi des aides». Dans le cadre du Plan Maroc Vert, la refonte du système de subventions, opérée en avril 2010, émane d'une vision claire et d'un choix volontariste de l'Etat. Cette vision s'est fixé pour objectif d'instaurer un système d'aides ciblé et équilibré, couvrant l'ensemble des filières majeures, de l'amont à l'aval de la production. Le département de tutelle explique que «le nouveau système a mis un terme aux dérives du passé. Certains agriculteurs qui ont moins de 10 hectares pouvaient faire la demande de plusieurs tracteurs sans qu'il y ait un réel besoin. Donc, l'exploitant pour être éligible doit prouver la nature juridique de son exploitation et de ses activités. Dans ce contexte, c'est le tracteur agricole qui est le plus touché puisqu'il représente près de 85% du marché. Les ventes de ces dernières années étaient en moyenne de 3.500 engins. Alors que pour l'année 2010, leur nombre n'a pas dépassé les 2.500. Les professionnels incombent au nouveau système d'agrégation la responsabilité de cette dégringolade des ventes. Il s'agit aussi de la baisse du taux de la subvention qui est passé de 40% à 30% et du plafond d'aide qui a été ramené de 90.000 DH à 72.000 DH. Bien que les délais de déblocage des subventions aient été allégés, la procédure demeure complexe et n'est pas encore assimilée par les agriculteurs, notamment les petits exploitants. Cette phase d'approbation préalable par les services extérieurs du ministère de l'Agriculture est devenue un passage obligatoire pour les demandeurs. Le délai maximum de traitement des dossiers d'approbation préalable est de 12 jours. Selon le ministère de l'Agriculture, «cette procédure constitue un avantage certain pour l'ensemble des parties prenantes. En effet, elle permet à la fois à l'Administration de vérifier le respect des normes, à l'agriculteur de sécuriser son investissement et enfin, le cas échéant, au fournisseur délégataire de créance de s'assurer du recouvrement de la subvention». Le nouveau système est censé faire de l'ordre dans les ventes et c'est un outil incitatif pour l'agrégation, un pilier majeur du PMV pour encourager une meilleure organisation des acteurs agricoles. Il permet également d'élargir le spectre des opérations éligibles aux subventions, en incluant notamment les unités de valorisation, de nouveaux équipements et matériels agricoles ainsi que des mesures relatives à l'intensification de la production animale. Ainsi, et compte tenu de l'élargissement du champ des aides et des ressources financières disponibles, l'Etat vise l'allocation optimale des subventions afin de garantir la pérennité du système et lui permettre de jouer pleinement son rôle de levier pour l'investissement agricole privé. Les opérateurs du secteur redoutent une montée en puissance du matériel d'occasion qui, pour certains agriculteurs, est bon marché et défie toute concurrence. «Déjà, le parc existant connaît dans l'ensemble un sacré coup de vieux. Le niveau de mécanisation est encore faible. Une partie considérable du matériel importé est dans un état défaillant et ces engins ont été destinés essentiellement à la ferraille. Il faut des années pour moderniser les machines. Il est donc question de revoir ce système», assure un opérateur à Casablanca.