« Je ne veux pas que l'UpM ait le même profil que l'UMA ». Cette déclaration de Fathallah Sijilmassi à des responsables de presse marocains, en visite d'étude au Secrétariat de l'UpM à Barcelone, révèle un certain degré de lucidité et de pragmatisme vis-à-vis d'une construction euro-méditerranéenne souvent surplombée par des considérations nationales plutôt que régionales. La référence de Sijilmassi à une coquille vide comme l'union maghrébine n'est pas anodine. Elle renvoie à cette idée que si les intentions des membres de l'UpM sont louables, à savoir œuvrer pour la « paix, la stabilité et la prospérité », la mise en place de projets communs entre les membres de l'UpM nécessite une implication régulière et continue de tous ses membres. Ainsi, parmi les préoccupations actuelles de l'UpM, il y l'urgence d'insuffler une nouvelle dynamique à « l'Afrique du Nord (qui) a le taux d'intégration économique régionale le plus faible au monde ! ». Mais l'ancien directeur de l'Agence marocaine de développement des investissements (AMDI) ne démord pas pour autant de cette idée qu'il faut « accélérer les connexions entre des initiatives bien formulées et les divers organismes pour développer des projets ». Si effet, « ce n'est pas l'argent qui manque », c'est bien la cadence de mise en œuvre des projets communs qu'il faudra accélérer. Et pour cause, les défis identifiés par l'UpM sont de taille : montée des périls liés à l'immigration illégale, au terrorisme et aux différentes formes d'extrémisme, la faiblesse de l'intégration régionale, la crise économique qui sévit des deux côtés de la Méditerranée, les évolutions géopolitiques en cours dans la région, notamment au Sud de la Méditerranée depuis l'avènement du printemps arabe, pour ne citer que les plus urgents à relever. L'optimisme de Sijilmassi à l'épreuve des défis de l'UpM Consignés dans un agenda de l'Union à l'occasion du vingtième anniversaire de la déclaration de Barcelone, ces défis n'entachent pas l'optimisme de Sijilmassi. Et pour cause, le nombre de projet initiés par l'Union qu'il dirige est passé d'une dizaine en 2012 à 33 projets en 2015. Labellisés par l'ensemble des membres de l'UpM, ces projets touchent les différents domaines d'action : 6 projets dans le transport et le développement urbain, 6 autres dans le développement des entreprises et autant dans l'autonomisation des femmes et les affaires sociales, 7 dans l'eau et l'environnement, 7 autres projets dans l'enseignement supérieur et la recherche, et un projet dans les énergies renouvelables. Par région, c'est bien le Maghreb et le Machrek qui bénéficient du plus gros lot de projets labellisées, sachant que dans l'ensemble, 50 % de projets sont d'ores et déjà en cours de développement, dont la promotion revient essentiellement à la société civile (37% des projets) et aux administrations nationales (20%). Globalement, l'investissement engagé par ces projets labellisés est estimé autour de 5 milliards d'euros, une enveloppe qui couvre désormais 8% des besoins régionaux pour les 20 prochaines années. Et le Maroc ne sera pas en reste puisque le projet d'aménagement de la vallée du Bouregreg vient d'être intégré parmi ces projets labellisés. Cette distinction va lui permettre de bénéficier de l'assistance de l'UpM pour notamment le financement d'une étude de positionnement stratégique pour enrichir la programmation urbaine et comprendre les tendances du marché urbain au niveau de la région. Tourné vers l'avenir, Fathallah Sijilmassi est résolu à combattre toute forme d'« inertie », à travers l'ancrage d'une logique centrée sur « l'action et les résultats », conscient qu'il est que, malgré les écueils, «il n'y a pas d'alternative à la dimension régionale ». « Elle est certes compliquée, difficile et longue », poursuit-il, mais « il faut continuer à travailler ».