Les crédits Fogarim sont sur un trend haussier. Toutefois, le sentiment général est au «peut mieux faire». Difficulté de collecte d'informations, absence d'offre immobilière adéquate… Autant de facteurs de blocages que les ministres de l'Habitat et des Finances ont promis de résoudre. Ils l'ont tous reconnu. Banquiers, associations d'accompagnement des bénéficiaires et ministres de l'Habitat et des Finances ont été unanimes pour dire que le fonds dans son actuelle formule requiert quelques correctifs. Le bilan positif affiché à fin 2008 (voir encadré) ne les a pas empêchés d'émettre un même constat, allant dans le sens de la nécessité de lever les barrières : le Fogarim ne représente que 16% des crédits à l'habitat accordés en 2008. Des recommandations, dont certaines pourraient connaître un aboutissement dans le futur proche, alors que d'autres ne s'inscrivent pas dans la vision actuelle du secteur de l'immobilier. Prenons le cas par exemple de ce voeu formulé conjointement par deux banquiers représentants le Groupe Banques Populaires et BMCE, et qui consiste dans le lancement d'une offre de logements à 80.000 DH. « C'est ce qui permettra de dynamiser ce Fonds de garantie pour les revenus irréguliers et modestes, en attirant une clientèle jusque là exclue du crédit bancaire à cause de son très faible pouvoir d'achat », peut-on retenir comme message global de leur intervention. En 2008, un 2ème semestre en baisse Un projet très difficile à mettre sur les rails. L'expérience du logement des pauvres proposé à 140.000 DH en dit long sur la grande difficulté à faire adhérer des promoteurs immobiliers privés et ce, en dépit des péréquations introduites par l'Etat au niveau du volet foncier pour rendre le concept plus attrayant aux yeux des opérateurs privés. Aujourd'hui encore, les privés y vont à petits pas et c'est le public, à travers son bras armé Al Omrane, qui y est déjà bien engagé, après avoir lancé en 2008 quelque 25.000 chantiers, dont 20.000 seraient prêts à fin 2009, selon les dires de Hejira. Est-ce l'absence d'une offre à petit prix qui explique la baisse enregistrée dans l'octroi des crédits Fogarim au titre du deuxième semestre 2008, ou serait-ce le spectre de la crise mondiale qui a pesé de tout son poids sur les performances du fonds ? La réponse sort de la bouche des banquiers, mais aussi des promoteurs immobiliers. D'abord des chiffres. En 2008, le volume des crédits a encaissé une baisse de l'ordre de 3%. A priori, l'explication donnée par les observateurs et corroborée par Houcine Itaoui, directeur général de la Caisse Centrale de Garantie (CCG), puisait dans le phénomène d'expectative observée par les banques comme réaction spontanée à la crise mondiale. L'élan qu'a connu ce volume dès le début 2009 renforce cette thèse. Cependant, à y voir de plus près, les raisons sont ailleurs. «Si la désaffection des banques s'est dissipée dès ce début d'année, c'est en gros grâce à la commercialisation de grands projets de logements économiques», lance un banquier. C'est donc une question de disponibilité du produit éligible au Fogarim. Cela n'est pas pour déplaire à Taoufik Hejira, qui met les bouchées doubles pour que son idée de logement à 140.000 DH cartonne. Aux côtés d'Al Omrane, les promoteurs privés doivent contribuer à en réaliser 130.000 à terme. Cela lui permettra peut être de réaliser son objectif initial d'arriver à un volume moyen de 50.000 dossiers Fogarim traités annuellement. « Nous avons les moyens et les capacités de disposer de ces volumes. Il faudra juste revoir les mécanismes de ce fonds pour les réadapter aux contraintes du marché», réagit Salaheddine Mezouar, ministre des Finances. Sa présence dans la présentation du bilan du Fogarim n'est pas anodine. La contribution de son département est cruciale, puisqu'il décide de la mobilisation du nouveau foncier de l'Etat, ainsi que des avantages fiscaux à concéder lors des discussions des différentes lois de finances. Mais au-delà de l'aspect purement financier ou relatif au produit en lui-même, les banques ont d'autres soucis dans la gestion des dossiers de cette clientèle à revenus irréguliers ou modestes. Certes, le taux de sinistralité n'est que de 1%, soit un niveau de casse maîtrisable, mais pour aller de l'avant et prendre le risque d'étendre le crédit à de plus grandes couches sociales, les banques demandent l'aide de l'Etat et des associations régionales pour mieux cerner le profil des candidats aux crédits. «Le banquier doit connaître son client. Les cas Fogarim sont très particuliers, de par la nature de leurs revenus, même si nous disposons de la garantie de la CCG en cas de pépin», déclare Amine Hajji du CIH. Sur ce plan, BMCE semble avoir trouvé une solution. Elle a signé une convention de partenariat avec l'association de microcrédit Amana, afin qu'elle l'assiste dans le travail de collecte d'informations sur le terrain. Cette dernière étant, de par son métier, en contact direct et régulier avec les populations financièrement vulnérables et qui constituent une bonne partie de la clientèle Fogarim. En parallèle, la banque d'Othmane Benjelloun a ressuscité le métier de «qabbada», cet agent de recouvrement présent sur place et dont le rôle est de sensibiliser en amont sur la nécessité de rembourser les échéances dans les délais et d'en faire une habitude. «On a voulu opter pour des pratiques adaptées à la mentalité de cette clientèle», souligne Mohamed Bennani de la BMCE. Des procédés qui permettent à coup sûr d'éviter des recours hâtifs à la mise en jeu de la garantie de la Caisse centrale de garantie. En effet, depuis que le concept Fogarim est lancé, seulement 441 cas de mise en jeu de cette garantie ont été constatés sur un nombre total de dossiers de plus de 48.000. Un chiffre jugé d'ailleurs très acceptable par la direction générale de la CCG.