Le Bureau Central d'Investigations Judiciaires (BCIJ) a réussi, en 2017, à démanteler neuf structures terroristes, neutraliser 186 terroristes présumés et arrêter 20 « returnees », les personnes ayant regagné le Maroc après un passage dans un foyer de tension. Des statistiques qui apportent la preuve, si besoin est, de la centralité du BCIJ en matière de lutte anti-terroriste. Ces chiffres, confortés par l'absence totale de tentatives de ralliement des rangs de Daesh, portent ainsi le nombre de cellules démantelées par le Bureau central, depuis sa création en 2015, à 49 structures ayant projeté des actions dévastatrices dans le Royaume, réparties entre 21 cellules en 2015, 19 en 2016 et 9 en 2017. Les résultats de la lutte anti-terroriste au Maroc, notamment au titre de 2017, est une "succes story" marocaine, dont se félicite Abdelhak Khiame, directeur du BCIJ. "Il faut surtout situer le nombre de cellules démantelées en 2017 par rapport aux débuts du Bureau. (…) Ce rappel permet de constater qu'il y a une régression en matière de démantèlement de cellules terroristes", souligne Khiame, dans une interview exclusive accordée à la MAP. "S'agissant des personnes arrêtées dans le cadre de ces démantèlements, elles sont, depuis 2015, au nombre de 739 individus (275 en 2015, 276 en 2016 et 186 en 2017)", tient à préciser le directeur du BCIJ. Et de relever que sur ces 49 cellules démantelées, 5 sont liées au principe dit "Al Faye Wa Listihlal", alors que les 44 autres sont liées à l'organisation terroriste autoproclamée "Etat islamique". Le constat est sans appel. Moins de cellules terroristes démantelées n'a qu'une seule explication, selon Khiame qui explique cette baisse par le combat proactif mené par les éléments du BCIJ contre les projets dévastateurs, dans le cadre de l'approche multidimensionnelle du Royaume. Ce combat a asséné un coup quasiment fatal à la présence de Daesh et autres nébuleuses sur le territoire marocain et à leurs desseins haineux, a-t-il souligné. Le BCIJ demeure tout de même vigilant à l'égard des individus ayant regagné le Maroc en provenance des rangs des groupes terroristes. De 2015 à 2017, le BCIJ a procédé à l'arrestation de 92 « returnees ». Sur les 20 personnes arrêtées en 2017, 19 individus proviennent de la zone de conflit Syro-irakienne et un de la Libye. "Sur ce point, la démarche adoptée par le BCIJ s'inscrit dans le cadre de la politique générale du Royaume qui a déjà mis en place un texte de loi qui pénalise la tentative de rallier ou le ralliement effectif d'un foyer de tension", explique Khiame. En évoquant la tentative de ralliement, le responsable sécuritaire affirme qu'aucun cas similaire n'a été enregistré en 2017. Trois personnes ayant tenté de rejoindre les rangs de Daesh avaient, par ailleurs, été arrêtées entre 2015 et 2016. L'absence de coopération régionale, un danger réel Les personnes ayant déserté les foyers de tension pour trouver refuge dans d'autres pays de la région posent un sérieux problème. A cet égard, Khiame assure ne pas en détenir d'informations exactes, "faute de coopération régionale". "Il s'agit principalement de personnes qui fuient la zone syro-irakienne pour se déployer dans d'autres foyers de tension. Daesh a posé ses jalons dans un pays déstabilisé, à savoir la Libye, ou dans la région du Sahel dans sa globalité où s'activent déjà plusieurs organisations terroristes, notamment la prétendue Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI). Ainsi, pour avoir une idée sur toutes ces personnes, il faut bien qu'il y ait une coopération avec les pays de cette zone", confie le directeur du BCIJ, en parfaite connaissance de cause. Le voisin de l'est du Royaume, en l'occurrence l'Algérie, otage d'une vision obsolète d'hégémonie régionale, affirme Khiame, est la première concernée par ce refus catégorique de coopérer face un phénomène qui transcende les frontières. "Nous avons, malheureusement, un voisin qui s'entête à ne pas coopérer, malgré que la menace guette tous les pays maghrébins. On ne peut avoir d'informations précises sur les terroristes qui s'activent dans la région sans pour autant instaurer une coopération régionale solide", regrette Khiame qui saisit bien l'ampleur de l'absence d'une telle coopération et coordination régionale pour une région en proie à tous les risques. Le Maroc, sherpa mondial L'entêtement d'Alger est aussi dangereux qu'incompréhensible puisqu'aux antipodes d'un engouement international, de plus en plus grandissant, pour le modèle et l'expérience marocaine en la matière. "L'expérience marocaine est devenue un modèle pour les pays du monde. D'ailleurs, le Royaume s'est toujours dit prêt à coopérer avec les Etats qui le veulent bien. Il s'agit des pays de la région, notamment la Mauritanie, la Tunisie, la Libye, l'Egypte en plus des pays du Golfe et les pays occidentaux, dont les Etats-Unis", rappelle Khiame. Une coopération est vitale en ce sens qu'elle permet aussi bien au Maroc qu'à ces pays, selon le directeur du BCIJ, "d'actualiser les bases de données au sujet de toutes les personnes qui s'activent dans le domaine terroriste". Cet engouement international pour l'expérience marocaine s'explique, selon le directeur du BCIJ, par l'approche multidimensionnelle, unique en son genre, en matière de lutte anti-terroriste, adoptée par le Royaume. "Le Maroc a bien compris le phénomène et il tient continuellement à rectifier son approche en fonction des mutations. En plus, la stratégie marocaine (…) ne se base pas uniquement sur les outils sécuritaires. Le Royaume a adopté une approche qui englobe également et surtout le champ religieux avec la formation des imams, en plus du volet social et de l'action de la société civile telle l'Initiative Nationale pour le Développement Humain (INDH)", note Khiame. Le grand banditisme, l'autre facette de l'action du BCIJ La lutte contre le grand banditisme est l'autre facette, et non des moindres, de l'action du BCIJ. La Brigade de lutte contre le crime organisé a pu arrêter, lors de l'année qui s'achève, 43 personnes et saisir des quantités consistantes de drogues dures et de chira. Les exemples abondent en la matière: saisie de deux tonnes et 588 Kg de cocaïne et de 105 Kg de chira, neutralisation d'une bande spécialisée dans le kidnapping et demande de rançon, en plus de l'affaire solutionnée concernant le meurtre du député Abdellatif Merdas, pour ne citer que celles-là. "Depuis la création du BCIJ, la brigade anti-criminalité a démantelé plusieurs réseaux qui s'activent dans le domaine du trafic des stupéfiants, d'homicide, de kidnapping et autres crimes", indique Khiame. Concernant les arrestations, poursuit-il, les limiers de cette brigade ont neutralisé, 74 personnes en 2015 et 61 autres en 2016, en majorité impliquées dans les affaires de commercialisation internationale de stupéfiants, ce qui a conduit à la saisie de 41,5 tonnes de chira et d'une quantité de 35.777 comprimés psychotropes en 2015, ainsi que de 8,5 tonnes de chira et une tonne et 230 Kg de cocaïne en 2016. L'action de cette brigade a permis également de saisir quelque 34,7 millions de dirhams et plus de 858.000 euros issus de trafic des stupéfiants. Par ailleurs, conclut-il, la coopération du BCIJ avec l'Organisation internationale de police (Interpol), en 2016, a permis l'arrestation, sur la base d'un mandat d'arrêt international émis par les autorités italiennes, d'un ressortissant d'origine italienne qui dirigeait une bande criminelle spécialisée dans le trafic international de drogue dure.