L'ancien Premier ministre tunisien et haut dirigeant d'Ennahdha, Ali Larayedh, a été arrêté dans l'affaire de l'envoi de jihadistes tunisiens vers les zones de guerre en Syrie et Irak, a annoncé mardi le parti d'inspiration islamiste, appelant à sa libération immédiate. Ali Larayedh, ex-ministre de l'Intérieur puis chef du gouvernement, entre 2011 et début 2014, a été entendu pendant plusieurs heures au pôle judiciaire antiterroriste avant d'être écroué, selon un communiqué du parti. Après la révolution de 2011 qui a fait chuter le dictateur Ben Ali, la Tunisie a vu un grand nombre de jihadistes – entre 5 et 6.000 selon des organisations internationales – partir sur des terrains de conflit au Moyen-Orient et en Libye, pays voisin de la Tunisie. L'enquête sur les responsabilités d'anciens dirigeants tunisiens dans le transfert de ces jeunes jihadistes a été ouverte après le coup de force du président Kais Saied, qui s'est emparé le 25 juillet 2021 de tous les pouvoirs. En gelant le Parlement et limogeant son Premier ministre, le président avait dénoncé des blocages dans le système politique en place et fait d'Ennahdha sa bête noire. Des partis de gauche ont accusé Ennahdha et ses plus hauts dirigeants comme Ali Larayedh, vice-président du parti, d'avoir facilité le départ des jihadistes, ce que le mouvement, dont le chef Rached Ghannouchi fait aussi l'objet de poursuites, dément catégoriquement. Dans son communiqué, le parti a dénoncé «le ciblage systématique des dirigeants d'Ennahdha» et une «tentative désespérée de l'autorité putschiste et de son président Kais Saied de couvrir la farce des élections législatives boycottées par 90% des électeurs». Le premier tour de ce scrutin destiné à renouveler le Parlement (dissous depuis début 2022) a été marqué samedi par une participation historiquement faible de 11% des inscrits. Cette abstention record est considérée comme un camouflet pour le président Saied. Ce vote représente la dernière étape de l'édification par Kais Saied d'un système ultra-présidentialiste où le Parlement sera privé de réels pouvoirs, aux termes d'une nouvelle Constitution adoptée cet été. Appelé à démissionner par ses principaux opposants dont Ennahdha, Kais Saied a minimisé la faible participation, estimant que le véritable taux se mesure «sur les deux tours». Le deuxième tour est prévu début février avec un résultat définitif du scrutin le 3 mars.