Le retour incontrôlé d'une partie de la fusée qui avait placé sur orbite le premier module de la station spatiale de la Chine, fin avril, s'est finalement achevé dans les eaux indiennes, dans la nuit de samedi à dimanche. Les spéculations allaient bon train, tout comme les inquiétudes : finalement, la fusée chinoise, qui devait faire ce week-end son retour incontrôlé dans l'atmosphère terrestre, s'est en partie désintégrée au-dessus de l'océan indien, rapporte l'agence spatiale chinoise. «Selon le suivi et l'analyse, à 10 h 24 (4 h 24 à Paris) le 9 mai 2021, le premier étage de la fusée porteuse Longue-Marche 5B est rentré dans l'atmosphère», a déclaré le Bureau chinois d'ingénierie spatiale habitée dans un communiqué, fournissant les coordonnées d'un point se situant dans l'océan Indien près des Maldives et ajoutant que la majorité de ce segment s'est désintégrée et a été détruit en rentrant dans l'atmosphère. Space-Track, qui a utilisé des données militaires américaines, a également confirmé l'entrée dans l'atmosphère. «Tous ceux qui suivent la rentrée de #LongMarch5B peuvent se détendre. La fusée est tombée», a-t-il tweeté. Le pays asiatique a placé le 29 avril sur orbite le premier module de sa station spatiale, grâce à une fusée porteuse Longue-Marche 5B – le plus puissant et imposant lanceur chinois. C'est le premier étage de cette fusée, actuellement en orbite, dont le retour sur Terre était scruté. Après un long silence gêné des autorités spatiales et diplomatiques chinoises, Pékin avait enfin réagi vendredi. «La majorité des composants [de la fusée] seront brûlés et détruits lors de la rentrée dans l'atmosphère», a assuré Wang Wenbin, un porte-parole du ministère des affaires étrangères chinois. «La probabilité de causer des dommages aux activités aériennes ou [aux personnes, constructions et activités] au sol est extrêmement faible», a-t-il ajouté lors d'une conférence de presse. Les médias chinois restent discrets Les médias chinois ont assuré samedi une couverture minimale de l'événement, se contentant de reprendre les propos du porte-parole de la diplomatie. Si des parties de la fusée restaient intactes après être rentrées dans l'atmosphère, il y avait de fortes chances qu'elles s'abîment en mer, car les océans occupent 70 % de la surface terrestre. Mais ils pouvaient aussi s'écraser sur une zone habitée ou sur un navire. « Nous espérons qu'ils atterriront dans un endroit où ils ne feront de mal à personne », avait déclaré vendredi Mike Howard, un porte-parole du ministère de la défense américain, rappelant que les Etats-Unis suivaient à la trace le trajet de la fusée. Le ministre américain de la défense, Lloyd Austin, avait assuré cette semaine que son pays n'avait aucune intention de détruire la fusée. Il a toutefois laissé entendre que son lancement n'avait pas été planifié avec suffisamment de soin par la Chine. Le risque que des débris du lanceur lourd touchent une zone habitée était faible, selon plusieurs experts interrogés par l'Agence France-Presse. «Vu la taille de l'objet, il y a forcément de gros morceaux qui resteront», anticipait Florent Delefie, astronome à l'Observatoire de Paris-PSL. Mais la probabilité d'un impact sur une zone habitée est «infime, de moins d'une sur un million, sans doute», rassurait Nicolas Bobrinsky, chef du département ingénierie et innovation de l'Agence spatiale européenne (ESA). «Ce n'est pas une bonne pratique» «Le fait qu'une tonne d'éclats métalliques s'abatte sur la Terre à des centaines de kilomètres/heure ne constitue pas une bonne pratique, et la Chine devrait revoir la conception des missions Longue-Marche 5B afin d'éviter cela», note Jonathan McDowell, astronome du Centre Harvard-Smithsonian pour l'astrophysique, aux Etats-Unis, et grand spécialiste des débris spatiaux. En 2020, des débris d'une autre fusée Longue-Marche 5B s'étaient écrasés sur des villages en Côte d'Ivoire, provoquant des dégâts, mais sans faire de blessés. En avril 2018, la station spatiale chinoise Tiangong-1 s'était désintégrée lors de son entrée dans l'atmosphère, deux ans après qu'elle eut cessé de fonctionner. La Chine investit depuis quelques décennies des milliards d'euros dans son programme spatial. Le pays asiatique avait envoyé son premier astronaute dans l'espace en 2003. Il a posé au début de 2019 un engin sur la face cachée de la Lune – une première mondiale. L'an passé, il avait rapporté des échantillons de Lune et finalisé Beidou, son système de navigation par satellite (concurrent du GPS américain). La Chine prévoit de faire atterrir un robot sur Mars dans les prochaines semaines. Elle a également annoncé vouloir construire une base lunaire avec la Russie.