Au-delà de sa vocation de lutter contre la pauvreté et l'exclusion des populations vulnérables, l'économie sociale et solidaire (ESS) doit être pensée, aujourd'hui plus que jamais, comme un pilier de relance de l'économie nationale et une alternative garantissant une croissance durable et une résilience face aux crises. La crise sanitaire actuelle a engendré de fortes incertitudes tant au niveau de l'économie que de l'emploi. Au Maroc, 581 000 postes d'emploi ont été perdus entre le troisième trimestre 2019 et la même période en 2020/ L'ESS, un concept qui désigne les entreprises et les organisations (coopératives, GIE, associations, mutuelles ou fondations) qui produisent des biens, des services et des connaissances tout en poursuivant des objectifs à la fois économiques et sociaux et en favorisant la solidarité, devra donc jouer un rôle de premier plan dans la relance de l'économie nationale et dans la lutte contre les répercussions néfastes de la crise engendrée par le coronavirus (Covid-19). "Cette crise renforce l'idée qu'il est question d'inventer un nouveau modèle économique solidaire, une nouvelle série d'innovations de sorte qu'elles peuvent ainsi contribuer à des transformations sociales qui pourraient favoriser la transition vers un développement durable inclusif", a relevé Saloua Tajri, directrice de la Promotion de l'Économie Sociale au ministère du Tourisme, de l'Artisanat, du Transport aérien et de l'Économie sociale (MTATES). L'ESS présente des atouts incontournables en tant que mode d'entreprenariat inclusif des jeunes et des femmes surtout en milieu rural, vecteur des valeurs de solidarité et de cohésion sociale, levier de développement durable territorial et un vivier important d'innovations sociales et d'intelligence collective, notant que son développement permet de contribuer à organiser le secteur informel, à créer de nouveaux emplois et à lutter efficacement contre la pauvreté. En dépit de l'histoire longue de l'ESS au Maroc, cette économie demeure fragile devant les chocs, estime Abdellah Souhir, président du Réseau marocain de l'économie sociale et solidaire (REMESS). "Malheureusement, au moment où cette économie a commencé à prendre de l'élan grâce aux stratégies étatiques et à la dynamique des acteurs, la pandémie du Covid-19 a négativement impacté toutes les composantes de l'ESS, plus particulièrement les coopératives et les associations et un peu moins les mutuelles puisque la majorité sont publiques", a-t-il déploré. Dans la même veine, Mme Tajri a indiqué que la pandémie a provoqué un repli de l'offre et de la demande des biens et services dans des secteurs clés de l'économie, notamment le tourisme, l'artisanat et l'agriculture. En conséquence, les entités de l'ESS majoritairement opérant dans ces secteurs soit directement ou indirectement, se retrouvent affectées de plein fouet, avec un arrêt subit de leurs activités pendant la période de confinement, a-t-elle fait savoir. Face à cette situation, a précisé M. Souhir, les associations ont essayé tout de même de s'activer dans les efforts de lutte contre la pandémie, tandis que les coopératives se sont trouvées sclérosées économiquement ce qui a induit de fortes difficultés de continuité et par voie de conséquence une perte de pouvoir d'achat des coopérateurs et coopératrices engendrant une forte vulnérabilité pour subvenir à leurs besoins et ceux de leurs familles.