Au moins quatre personnes ont perdu la vie et plusieurs autres ont été grièvement blessées en Éthiopie lors de manifestations mardi, au lendemain du meurtre du célèbre chanteur Hachalu Hundessa, qui appartient à l'ethnie majoritaire Oromo. Au moins quatre personnes ont été tuées et plusieurs grièvement blessées en Éthiopie lors de manifestations, mardi 30 juin, au lendemain du meurtre d'un célèbre chanteur de l'ethnie majoritaire Oromo, une nouvelle illustration des tensions politiques et communautaires qui agitent le pays. Ces violences ont conduit le gouvernement à couper Internet dans la capitale Addis Abeba. Elles soulignent la fragilité de la transition démocratique mise en œuvre par le Premier ministre Abiy Ahmed, prix Nobel de la Paix 2019. Le chanteur Hachalu Hundessa a été tué par balles lundi soir à Addis Abeba, a rapporté la radio-télévision Fana, proche du pouvoir. Ses textes politiques en avaient fait une des voix fortes de l'ethnie Oromo, la plus importante du pays, pendant les années de manifestations antigouvernementales qui ont porté Abiy Ahmed au pouvoir en 2018. Mardi matin, des foules de manifestants ont convergé vers la capitale depuis la région Oromia voisine, bloquant la circulation. Des porte-parole de la police fédérale et de la police régionale de l'Oromia ont indiqué ne pas avoir d'informations sur le nombre de victimes. Amnesty International a fait état « d'informations sur la mort de plusieurs personnes lors des manifestations en cours », mais l'organisation se dit « incapable de confirmer leur nombre et les circonstances (de leur décès) en raison de la coupure d'Internet depuis ce (mardi) matin » en Éthiopie. Le mobile du meurtre d'Hachalu Hundessa n'est pas encore connu, mais le chef de la police d'Addis Abeba, Getu Argaw, a déclaré à Fana que « des suspects » avaient été arrêtés. Au plus fort des manifestations antigouvernementales, qui avaient commencé en 2015, le chanteur avait, lors d'un concert à Addis Abeba, exprimé dans ses textes les griefs des Oromos qui s'estimaient marginalisés économiquement et politiquement. Mardi après-midi, le media indépendant Oromo Media Network a fait état de l'arrestation d'une figure politique oromo d'opposition, Jawar Mohamed, critique de Abiy Ahmed. En octobre dernier, des rumeurs sur la prochaine arrestation de Jawar Mohamed avait été le déclencheur de manifestations anti-Abiy en Oromia, qui avaient dégénéré en émeutes alimentées par le ressentiment ethnique et religieux, faisant 78 morts. L'ambassade américaine en Éthiopie a évoqué mardi des « coups de feu à Addis Abeba ». « La situation est actuellement volatile. S'il vous plaît, restez chez vous jusqu'à nouvel ordre », a-t-elle mis en garde. Les rues du centre d'Addis Abeba restaient calmes et les commerces ouverts. Mais de larges groupes de manifestants se sont rassemblés en divers endroits en périphérie de la capitale. Un groupe a entonné des chants honorant la mémoire d'Hachalu, tout en brandissant des drapeaux de l'Oromia. « Un jour, nous serons libres. Hachalu, tu n'auras pas versé ton sang en vain », chantaient-ils. Abiy Ahmed a appelé au calme et exprimé sa « peine profonde » dans un communiqué publié sur Twitter, décrivant Hachalu comme un « jeune artiste rayonnant ». Même si Abiy Ahmed est le premier chef de gouvernement oromo de l'histoire moderne, de nombreux nationalistes de cette ethnie l'accusent de ne pas faire suffisamment pour défendre les intérêts de sa communauté. Depuis son accession au pouvoir, le Premier ministre s'est efforcé de promouvoir des réformes politiques et économiques. Mais cette ouverture a laissé le champ libre aux violences intercommunautaires qui mettent à l'épreuve le système éthiopien de fédéralisme ethnique.