L'Arabie saoudite aurait considérablement développé son programme de missiles balistiques avec l'aide de la Chine, ont déclaré trois sources informées à CNN, hier, ce qui menacerait des décennies d'efforts américains pour limiter la prolifération des missiles dans le pays et au Moyen-Orient (vidéo). Selon les révélations en exclusivité des sources de CNN, l'administration Trump aurait délibérément dissimulé aux membres clés du Congrès ce développement du programme de missiles avec l'aide de la Chine par les renseignements américains. Les démocrates ont découvert l'information en dehors des canaux habituels à un moment où les tensions sont à leur comble entre le Congrès et la Maison-Blanche à propos de l'Arabie saoudite. Les renseignements classifiés et protégés indiquent que l'Arabie saoudite a étendu son infrastructure et sa technologie de missile grâce à des achats récents en Chine. Des images satellite diffusées par The Washington Post en janvier dernier, avaient déjà laissé penser que l'Arabie saoudite, qui ne possède pas d'armes nucléaires, aurait construit sa première usine de missiles balistiques, sur la base d'al-Watah, à 200 km au sud-ouest de Riyad. Les analystes ayant visionné les images à l'époque avaient déclaré qu'elles semblaient correspondre à la technologie produite par les Chinois. Une deuxième image de la même installation de missiles obtenue par CNN montre un niveau d'activité similaire sur le site le 14 mai 2019. Bien que l'objectif ultime des Saoudiens n'ait pas encore été évalué de manière concluante par les services de renseignement américains, l'avancée du programme de missiles ballistiques pourrait marquer une nouvelle étape dans les efforts potentiels de l'Arabie saoudite visant à se fournir un jour en ogive nucléaire. En vertu de la réglementation établie en 1987 par le Régime de contrôle des techniques de missile, un pacte informel multipartite visant à empêcher la vente de roquettes capables de transporter des missiles et armes de destruction massive, il est interdit à l'Arabie saoudite d'acheter des missiles balistiques aux Etats-Unis . Pourtant, les Saoudiens ont toujours adopté la position selon laquelle ils avaient besoin d'une capacité équivalente à celle des missiles iraniens et avaient parfois demandé l'aide d'autres pays, y compris la Chine, qui n'est pas signataire du pacte. Pendant des décennies, les Etats-Unis ont œuvré pour que l'Arabie saoudite obtienne la suprématie de l'air dans la région, en grande partie grâce à ses achats d'avions militaires américains, précisément pour éviter tout conflit aérien. « L'Arabie saoudite n'a pas à faire la course à l'Iran pour produire ou acheter des missiles balistiques. Elle dispose déjà d'un avantage militaire conventionnel important », a déclaré Behnam Taleblu de la Fondation nationale pour la démocratie, groupe de réflexion basée à Washington pour la défense des démocraties. Ces derniers mois, la question s'est posée si cette raison était toujours valable, en particulier depuis que l'administration Trump s'est retirée de l'accord nucléaire iranien et que le Royaume fait face à des menaces de missiles balistiques émanant de représentants iraniens au Yémen. « L'intérêt rapporté par l'Arabie saoudite pour la production de missiles balistiques dans le pays devrait à juste titre faire sourciller », a ajouté Taleblu. La CIA et le bureau du directeur des services de renseignement nationaux ainsi que le porte-parole de l'ambassade saoudienne aux Etats-Uni se sont refusés à tout commentaire. Par contre le ministère chinois des Affaires étrangères s'est pourfendu d'un communiqué où il déclare que la Chine et l'Arabie saoudite sont des « partenaires stratégiques globaux » et que les deux pays « maintiennent une coopération amicale dans tous les domaines, y compris dans le domaine de la vente d'armes. Cette coopération ne viole aucune loi internationale, il ne s'agit pas non plus de la prolifération d'armes de destruction massive « . Un responsable du département d'Etat a refusé de commenter des affaires de renseignement classifiées, mais a déclaré à CNN que l'Arabie saoudite était signataire du Traité de non-prolifération nucléaire et avait accepté l'obligation de ne jamais acquérir d'armes nucléaires. La découverte des efforts de l'Arabie saoudite a accru les inquiétudes des membres du Congrès sur une éventuelle course aux armements au Moyen-Orient et sur le fait qu'elle signale une approbation tacite de l'administration Trump dans le cadre de sa lutte contre l'Iran. Les services de renseignements américain soulèvent également des questions sur l'engagement de l'administration en matière de non-prolifération au Moyen-Orient et sur la mesure dans laquelle le Congrès est tenu au courant des développements de la politique étrangère dans une région instable.