C'est vrai que les Marocains sont dans la salle d'attente, mais ils attendent que les partis sortent de la salle de réanimation… La réforme de la Constitution est un premier pas qui se révélera réellement avec la première mise en pratique et le peuple tout entier est dans la salle d'attente. J'espère que cette attente ne sera pas très longue car nous n'avons plus de temps à perdre ». C'est en ces termes que le doyen des Istiqlaliens, Abdelkarim Ghellab, résume la situation actuelle que vit le Maroc dans un entretien accordé à notre confrère arabophone Al Ittihad Al Ichtiraki. L'entretien passe en revue les remous que connaissent certaines sociétés arabes et analyse le cas marocain à travers les actions réformatrices entreprises dans notre pays. L'usage de la fameuse expression de «la salle d'attente» est judicieux. C'est vrai que la société marocaine est dans la salle d'attente. Il s'agit d'un énoncé inventé par on ne sait plus qui – tellement il a été utilisé et réutilisé par tout le monde – mais qui ressemble à une réalité qui cache une autre plus significative. En fait, il est peut-être vrai que les Marocains sont toujours dans une salle d'attente, mais ils sont dans la salle d'attente d'un hôpital où ils attendent que les partis politiques nationaux sortent enfin de la salle de réanimation. Une réanimation que l'on attend depuis plusieurs décennies. Le peuple marocain veut entrer dans la modernité démocratique, mais il a mal à ses partis. Durant plusieurs décennies, nous avons eu trois catégories de formations politiques. La première a toujours dit «Non» à tout et n'a jamais présenté un véritable et sérieux projet alternatif. La deuxième dit «Oui» a tout et n'apporte aucune valeur ajoutée. La troisième a des projets de société et des valeurs qu'elle défend mais elle n'a jamais su s'ériger en pépinière d'élite et d'idées. Les partis qui la composent n'ont fait que ruminer les mêmes idées et les mêmes réflexes et recycler les mêmes personnes et les mêmes visages pendant plusieurs décennies au point que leurs idées et leurs élites ont tellement vieilli qu'à la première crise, ils en ont subi les conséquences et se sont retrouvées dans la salle de réanimation à vouloir se refaire une bonne santé dans l'urgence. C'est cette situation qui fait que les Marocains se sont retrouvés encore une fois dans la salle d'attente. L'idéal serait que ces partis libèrent enfin les jeunes énergies dont ils regorgent et laissent le Maroc entrer, enfin, dans la modernité partisane. C'est cela le vrai chantier qu'il faut aborder. Mais c'est aux partis eux-mêmes de le faire.