La saga de la résistance rifaine dans le nord du Maroc accumula les pages glorieuses, jusqu'à ce qu'elle fut stoppée net par l'usage d'armes de destruction massive par la coalition franco-espagnole. A l'issue de la première guerre mondiale, l'Espagne a dû revoir sa structure administrative et militaire au Maroc. Les Espagnols ont mis la pression parvenant à concrétiser de grandes victoires en 1920. Le général espagnol Sylvester a donc concentré ses efforts sur l'occupation de terres des tribus rifaines, parvenant en une année en 1920 à doubler la superficie de terrain sous occupation espagnole. Sur le front sud, il devait cependant s'opposer aux troupes de Mohammed Ben Abdelkrim Khattabi. Une attaque-surprise de ces dernières le 1er juillet 1921 avait lourdement affecté les forces espagnoles et mettait ainsi le feu aux poudres. Les Espagnols s'engouffrèrent alors en terre rifaine sans véritable stratégie tactique. Ils furent bientôt cueillis par les résistants conduits par Abdelkrim, qui glanèrent victoire sur victoire, récupérant les centres occupés par les espagnols jusqu'à l'ultime affrontement, celui de la bataille d'Anoual le 21 juillet 1921. Ce fût la débâcle pour les Espagnols. Certains auteurs parlent du suicide du général Sylvestre et avancent le nombre de 20.000 morts et 1500 prisonniers dans les rangs espagnols. Sans compter la récupération d'une centaine de centres, de 120 canons lourds et de plus de 20.000 fusils de guerre. Les choses auraient pu en rester là, si la France n'était intervenue. Selon les historiens, la France n'est intervenue directement dans la guerre du Rif qu'en avril 1925, soit quatre années après la déconvenue espagnole d'Anoual. Les intérêts contradictoires des Français et Espagnols dans la région, notamment autour de la zone de Tanger, avaient retardé cette « main forte » des Français. Cependant, Paris, une fois ses objectifs objectifs prioritaires au Maroc concrétisés, devaient faire volte-face tournant le dos à ces résistants qu'elle avait presque soutenus au profit des Espagnols partageant les mêmes intérêts coloniaux. Les stratèges français estimaient alors que la métropole devait s'opposer au mouvement de libération rifain et stopper la gangrène qui commençait à menacer les intérêts français au Maroc. La démarche française commença par l'occupation de points stratégiques sur les versants de l'oued Ouargha et se poursuivit par l'envahissement des terres de la tribu Beni zeroual, ce qui devait donner le signal de départ de la seconde phase de la guerre du Rif. L'entrée de la France dans le conflit devait changer le rapport de force. Certains auteurs parlent de 200.000 hommes et d'une quarantaine d'escadrons de l'aviation dépêchés en un temps record dans la région. Plus même. Les deux forces coloniales unifièrent leur commandement sous la direction du général Pétain et mobilisèrent pas moins d'un demi million de soldats contre 12.000 combattants marocains. Les Allemands aussi prêtèrent main forte, en mettant sur pied deux usines de gaz toxiques à Melillia et Madrid. C'est ainsi, avancent plusieurs auteurs, que les deux forces coloniales ont pu utiliser contre les résistants rifains des centaines de tonnes de gaz toxiques, notamment le gaz moutarde, particulièrement destructeur. Les appels à l'époque de Abdelkrim Khattabi à la croix rouge internationale sont restés sans écho et des centaines de combattants ont péri sous l'impact des produits chimiques. L'hypothèse de l'utilisation d'armes de destruction non conventionnelles, est étayée par le nombre énorme de victimes laissées par des attaques françaises. A titre d'exemple, le chercheur Mohamed Kharchiche évoque un écrit du général Armanco, commandant à l'époque de l'aviation française au Maroc, qui fait état de 800 morts en une seule attaque française à Béni Zeroual le 9 mai 1925. En à peine une minute. Le chercheur fait également état d'un ouvrage publié en allemand et traduit en arabe qui donne des informations importantes sur l'usage par la France et l'Espagne des armes prohibées dans le Rif. Des données que vient confirmer le taux anormalement élevé dans la région aujourd'hui, de cancers et autres maladies du genre. En tout cas, l'usage de ces armes destructrices fut le prélude à une attaque massive et disproportionnée contre les résistants, notamment après l'échec des négociations de paix en 1926. Ce qui se solda par la reddition d'Abdelkarim Khattabi en mai 1926 et sa déportation en août de la même année dans l'île de la réunion, mettant fin à la saga de résistance rifaine et laissant aujourd'hui encore des traces indélébiles de crimes contre l'humanité.