L'introduction de l'éducation sexuelle dans le cursus scolaire fait débat.Comment aborder la question de la sexualité avec les enfants ? Quels sont les sujets qui doivent être enseignés ? Comment doit s'articuler le programme ? sont autant de questions que se posent les parents. Parler de sexualité dans nos écoles relève du tabou. Contrairement à la France où les élèves suivent chaque année trois séquences d'éducation sexuelle de l'école primaire jusqu'au lycée, au Maroc, l'éducation sexuelle n'est pas dispensée dans les écoles. Et pourtant, «l'introduction de l'éducation sexuelle dans le cursus scolaire est un devoir étatique. Il s'agit d'une obligation de la part des responsables», déclare Dr Hachem Tyal, psychiatre, psychothérapeute. Pour Dr Nadia Bezad, présidente de l'Organisation panafricaine de lutte contre le sida (OPALS), l'éducation sexuelle doit être placée au même titre que l'éducation à la santé ou à l'environnement. «Il faut bien comprendre que l'objectif n'est pas de promouvoir les rapports sexuels mais de faire en sorte que les adolescents développent une prise de conscience et acquièrent un esprit critique afin de leur permettre d'opérer des choix responsables», explique Dr Bezad. Du côté de l'éducation nationale, le sujet fait débat. «Il faut l'introduire dans le programme scolaire. Le Conseil supérieur de l'enseignement est en train d'étudier la question», affirme Mohamed Souli, chef de division des affaires pédagogiques à l'Académie régionale de l'éducation et de la formation du Grand Casablanca. Mais comment peut-on discuter de la sexualité avec les enfants ? «Inutile d'utiliser des mots compliqués, les enfants apprécient la simplicité. Il faut être soi-même, le plus décontracté possible. L'important c'est le message qui est transmis à l'enfant. Prenons l'exemple d'une petite fille qui rentre dans les toilettes alors que son papa fait pipi. Il peut soit la giflée soit la laissé regarder car pour lui c'est tout à fait normal, soit lui expliquer le plus simplement possible ce qu'elle a vu», souligne Dr Tyal. Il est évident que le sexe n'a pas la même dimension selon les âges. A l'âge de 4 -5 ans, l'enfant découvre son corps, il constate que les filles et les garçons sont différents. Plus tard, à l'âge de 8 ans et jusqu'à 11 ans, il cherche à comprendre comment le corps fonctionne. A 12 ans, apparaissent alors les inquiétudes liées à la puberté. Mais pour être en mesure de donner des cours d'éducation sexuelle, les enseignants doivent être bien formés. «Les professeurs sont tellement mal dans leurs peaux par rapport à leur sexualité que donner des cours d'éducation sexuelle n'est pas une chose facile. Il faut qu'ils soient suffisamment à l'aise pour être en mesure de le faire. C'est la raison pour laquelle ils doivent recevoir une bonne formation qui leur permettra de transmettre les bons messages et de répondre convenablement aux questions qui leur sont posées». Selon M. Souli, il faut d'abord préparer les familles en leur expliquant la nécessité d'assurer une éducation sexuelle aux enfants avant de former les enseignants. Quant aux questions qui doivent être abordées avec les jeunes dans les écoles, elles différent selon les âges. «Pour les petits, il s'agit de leur transmettre des messages sur les organes génitaux féminins et masculins, les règles d'hygiène. Chez les adolescents, il sera plutôt question des changements anatomiques propres à la puberté, le fonctionnement du système reproducteur, les maladies sexuellement transmissibles (MST), le planning familial, la grossesse, l'avortement, le Sida, le vaccin contre le cancer de l'utérus», précise Dr Bezad. Et d'ajouter : «Nous avons conçu des QCM en arabe et en français portant sur la sexualité et les infections sexuellement transmissibles (IST) dans plusieurs espaces pour les jeunes. Malheureusement, ils ne sont pas généralisés». L'éducation sexuelle a des conséquences positives pour les jeunes. «Plusieurs études ont montré que l'éducation sexuelle peut conduire les adolescents à retarder le moment de leur premier rapport sexuel et l'utilisation des moyens de contraception», précise la présidente de l'OPALS. «Grâce à cette éducation, de nombreux problèmes peuvent être évités tels que les avortements, les MST, le sida, la pédophilie. Si on ne parle pas de sexualité dans les écoles, les enfants risquent d'apprendre des choses erronées dans la rue où à travers l'Internet», poursuit-elle. L'éducation sexuelle dans les écoles françaises Depuis 2001 l'éducation à la sexualité est obligatoire dans les écoles en France. Trois séances obligatoires d'éducation à la sexualité sont planifiées en début d'année scolaire et prévues dans l'horaire global annuel des élèves. La loi n° 2001-588 du 4 juillet 2001, relative à l'interruption volontaire de grossesse et à la contraception, prévoit «qu' une information et une éducation à la sexualité sont dispensées dans les écoles, les collèges et les lycées, à raison de trois séances annuelles». La circulaire du 17 février 2003 relative à l'éducation à la sexualité dans les écoles, les collèges et les lycées indique que «l'école a une part de responsabilité à l'égard de la santé des élèves et de la préparation à leur future vie d'adulte … Cette démarche est d'autant plus importante qu'elle est à la fois constitutive d'une politique nationale de prévention et de réduction des risques -grossesses précoces non désirées, infections sexuellement transmissibles, VIH/ sida - et légitimée par la protection des jeunes vis-à-vis des violences ou de l'exploitation sexuelles, de la pornographie ou encore par la lutte contre les préjugés sexistes ou homophobes». Les cours d'éducation sexuelle à l'école se focalisent essentiellement sur la reproduction et la prévention des maladies sexuellement transmissibles. La prévention du sida impose de prendre des mesures pour informer les adolescents des risques qu'ils encourent et leur indiquer les moyens de se prémunir. Pour ce qui est de la contraception, le protocole national détermine les modalités d'administration de la contraception d'urgence non soumise à prescription obligatoire ni à autorisation parentale et précise les dispositions à respecter notamment le respect de la confidentialité, la conduite d'un entretien avec l'élève, l'accompagnement et le suivi de l'élève.