Un médecin généraliste a été arrêté, jeudi 15 janvier, par la police judiciaire de Mohammedia, pour avortement illégal. Il est actuellement placé en détention préventive suite à la décision de juge d'instruction près la Cour d'appel de Casablanca. Le docteur L. Mustapha a bafoué le serment d'Hippocrate et la loi. Sinon, pourquoi séjournerait-il, depuis jeudi 15 janvier, dans une cellule du pénitencier Oukacha à Casablanca ? Depuis qu'il a ouvert son cabinet, en 1985, au boulevard Abdellah Serghini, à Mohammedia, des jeunes filles et des femmes se déferlent chez lui. Sont-elles des patientes comme les autres ? Souffrent-elles de malaises ordinaires? Ceux qui connaissent la réalité de la ville de Mohammedia répondront par la négative. Ces femmes ne sont pas malades et ne souffrent pas de malaises. Elles portent seulement dans leurs ventres un fœtus, résultat d'une relation sexuelle extraconjugale. Que faisaient-elles donc chez un médecin qui n'est pas un gynécologue ? Les informations qui circulaient dans cette ville côtière, assez calme d'ailleurs, disent qu'elles lui rendaient visite pour se débarrasser de ce fœtus indésirable, issue d'une relation extraconjugale. S'agit-il d'une simple rumeur qui tente à porter atteinte à la réputation d'un médecin ? Certes, prouver cet acte illégal contre un médecin n'est pas simple, il faut des preuves tangibles, concrètes et indiscutables. Et par conséquent, une interrogation légitime se pose : Est-il vrai que durant dix-huit ans, aucune preuve n'a été identifiée pour mettre en cause ce médecin de « bonne réputation » chez les jeunes filles enceinte suite à une relation extraconjugale ? Peu importe. Il a fallu attendre durant cinq mois, que le commissaire divisionnaire Al Garnaoui soit nommé à la tête de la police judiciaire de Mohammedia pour que ce médecin soit mis hors d'état de nuire. Jeudi 15 janvier 2004. Une information, la police reçoit une information selon laquelle le médecin, L. Mustapha, pratiquait, à ce moment-même, un avortement. La loi est la loi et il ne faut pas rater l'occasion de réprimer les personnes qui la violent. Aussitôt, les limiers de la police n'ont pas perdu la moindre seconde. Il se sont dirigés vers le cabinet du docteur L. Mustapha. Arrivant sur le boulevard Abdellah Serghini, près du local ciblé, ils descendent en un clin d'œil de leurs véhicules, afin de surprendre le médecin en flagrant-délit. En effet, ils croisent une femme, épaulée par un homme, au seuil du cabinet. Après une ou deux questions, ils comprennent qu'elle vient de subir une opération d'avortement. Elle avait, trois jours plus tôt, rendu visite à ce médecin pour consultation. Il lui avait expliqué qu'elle était enceinte. Quand elle lui a appris qu'elle veut se débarrasser du fœtus, le médecin a répondu qu'il était prêt à procéder à l'avortement, en contrepartie de la somme de 1800 dirhams. Et un rendez-vous fut fixé. Qui est l'homme qui accompagne cette femme ? C'est son ex-mari. Bien qu'ils soient divorcés, ils sont restés en relation et se comportaient comme des maris au point qu'elle est tombée enceinte. Elle était dans sa huitième semaine de grossesse. L'homme nie en bloc les accusations de son ex-femme. Pourquoi donc l'a-t-il accompagné pour subir une opération d'avortement ? L'homme n'avait pas de réponse convaincante. Seulement cette histoire reste marginale pour les enquêteurs qui se préoccupaient beaucoup plus de l'affaire d'avortement. Les enquêteurs se sont présentés aussitôt devant le médecin, lui ont demandé s'il avait effectué une opération d'avortement à la femme. Il a catégoriquement nié avoir exercé, ne serait-ce qu'une seule fois, une opération de ce genre. Les limiers ont effectué une perquisition, ont saisi des matériaux et ont conduit le médecin, la femme et son ex-mari à destination de l'hôpital Moulay Abdellah, à Mohammedia. Ils ont porté avec eux les matériaux saisis. Après l'examen de la femme, le médecin responsable de l'hôpital en question a attesté qu'elle souffre encore d'une hémorragie car elle venait de subir une opération d'avortement. Aussi, il a expliqué aux enquêteurs que des matériaux médicaux nécessaires pour l'avortement font partie des objets saisis. Ce qui constitue l'une des présomptions pour le mettre en cause bien qu'il a continué à se disculper. Les enquêteurs ont feuilleté les registres et les documents saisis au sein du cabinet. L'identité de la femme qui vient d'être avortée n'y figurait pas. Pourquoi ? le médecin en cause n'avait pas de réponse. Pire encore, puisqu'il ne dispose pas de fichiers pour les patients qui viennent chez lui. Pourquoi ? Il n'a pas toujours de réponse convaincante. Mardi 20 janvier, le médecin L. Mustapha, 49 ans, père de trois enfants, a été traduit devant le parquet général près la Cour d'appel de Casablanca. Ce dernier a décidé de le poursuivre pour avortement illégal avant de le mettre entre la main de juge d'instruction qui l'a maintenu en détention préventive. Est-il le premier a être mouillé dans une affaire d'avortement illégale ? Non. La scandaleuse affaire de Tabet, en 1992, a révélé qu'il y a tant de médecins qui répondent positivement aux femmes qui veulent se débarrasser illégalement de leur fœtus. Contre la déontologie et le serment d'Hippocrate, ils n'hésitent pas à le pratiquer clandestinement. Car ce qui importe pour eux , ce sont les 1000 à 6000 mille dirhams !