Mustapha, âgé de vingt et un ans, célibataire et sans profession, se faisait passer pour un flic pour mettre les dealers dans ses filets. Il est arrivé à filouter plus de dix victimes avant d'être arrêté par la police. Habillé en blue-jean et d'espadrilles, Mustapha sillonnait la Zaouïa, un quartier populaire situé au sud de la ville de Safi. Il fixait les passants et les jeunes chômeurs qui se collaient aux murs du quartier comme s'il cherchait quelqu'un. De là, il empruntait le chemin vers le quartier Course pour faire un grand tour. Quelques jeunes qui s'y trouvaient ont pris la fuite. Ils ont disparu en un clin d'œil.Qui sont-ils ? Il s'agit de dealers, qui vendent de la drogue aux toxicomanes. Pourquoi ont-ils pris la fuite ? «C'est un policier... Il avait déjà arrêté Saïd, mais il l'a relâché après lui avoir glissé deux billets de deux cents dirhams», a confié l'un des dealers à son collègue quand ils s'apprêtaient à disparaître du quartier Zaouïa pour ne pas attirer l'attention de Mustapha. Le lendemain, Mustapha est retourné au même quartier. Il se déplaçait d'une ruelle à l'autre tout en tentant de ne pas se faire remarquer. Tout d'un coup, il s'est jeté sur un jeune qui s'apprêtait à vendre un morceau de haschich. Rapidement, il lui a mis les mains derrière son dos et l'a menotté avant de sortir de sa poche un talkie-walkie qu'il a approché de son oreille et a commencé à dire : «Oui chef... Je l'ai arrêté en flagrant délit... Le toxicomane a pris la fuite, je n'ai pas pu l'alpaguer... Oui, je vais le conduire au commissariat». Mustapha a giflé aussitôt le dealer tout en le conduisant loin des badauds qui s'attroupaient autour d'eux. Le dealer le suppliait de le relâcher tout en lui expliquant : « Ce sont mes conditions de vie qui m'ont obligé à m'adonner au trafic de drogue... Je vais arrêter de vendre de la drogue ...». Mustapha l'écoutait sans réagir. Il le conduisait tout en le giflant. Tout d'un coup, il s'est arrêté. Pourquoi ? «On va conclure un marché si tu veux... Je te propose de me verser la somme de cinq cents dirhams pour te relâcher. Deux cents cinquante dirhams pour moi et le reste pour mon chef...Qu'en dis-tu ?», a proposé Mustapha. Le dealer l'a fixé comme s'il cherchait à se rassurer que Mustapha parlait sérieusement. Mustapha lui a répété la proposition. L'offre a été admise. Mustapha lui a enlevé les menottes et l'a libéré. Le dealer a alors sorti de ses poches la somme de cinq cents dirhams et l'a remise à Mustapha. Celui-ci a empoché l'argent tout en lui suggérant de ne plus retourner au fief de la Zaouïa. «Sinon, je vais te mettre en taule», l'a-t-il menacé. Il s'absentait deux ou trois jours avant de retourner au fief de la Zaouïa ou de Course pour mettre un ou deux dealers dans ses filets. En fait, il n'a jamais conduit l'un d'eux au commissariat de police pour être ensuite traduit devant la justice. Il se contentait d'empocher l'argent pour réapparaître quelques jours plus tard. Dernièrement, Mustapha, âgé de vingt et un ans, célibataire, est arrivé à alpaguer un dealer au quartier Zaouïa. Aussitôt, deux jeunes hommes qui étaient sur les lieux se sont approchés d'eux pour savoir ce qui se passait. Et ils ont entendu les badauds qui parlaient d'un flic. Ils ont échangé les regards avant de leur dire qu'il n'était pas flic et qu'il n'est qu'un escroc. Les badauds ont arrêté Mustapha et ont alerté la police. Mustapha a été traduit devant la chambre correctionnelle près le tribunal de première instance de Safi pour escroquerie.