Le timing de cette visite, intervenant au lendemain d'élections provinciales qui ont vu le leadership du Premier ministre Nouri El Maliki confirmé, possède un message politique limpide. Alors qu'il se dirigeait tranquillement vers une tournée express dans trois pays du Golfe (Oman, Bahreïn, Koweït) qui s'annonçait aussi ennuyante qu'une visite de courtoisie à des connaissances lointaines, Nicolas Sarkozy n'a pas résisté au plaisir de créer la surprise et de capter les grandes lignes de l'actualité internationale en effectuant une visite surprise à Bagdad. Et pourtant, il était manifestement difficile de faire plus fort un jour où les Israéliens votaient pour se choisir un exécutif très attendu par les capitales de la région. Nicolas Sarkozy a fait fort en étant le premier président français à visiter l'Irak. Le timing de cette visite, intervenant au lendemain d'élections provinciales qui ont vu le leadership du Premier ministre Nouri El Maliki confirmé, possède un message politique limpide. D'ailleurs, dès son arrivée à Bagdad, Nicolas Sarkozy, après avoir rencontré le président Jalal Talabani et le Premier ministre Nouri el Maliki, a déclaré que le France se tenait aux côtés de l'Irak et saluait ses efforts de démocratisation, tout en insistant que cette visite soutenait «son ancrage démocratique, la réappropriation progressive de sa souveraineté, sa réconciliation nationale et sa reconstruction». Même s'il s'agit d'une visite historique, ce n'est pas la première fois que la France avait manifesté son souhait de participer à la reconstruction. Deux visites de Bernard Kouchner, l'une en août 2007 et l'autre en avril 2008 avaient tenté de reprendre le fil de la communication avec les nouvelles autorités irakiennes. Sans grand succès sauf une grande polémique déclenchée par les propos de Bernard Kouchner à la presse américaine considérant que Nouri el Maliki devait partir. Devant le tollé irakien, Bernard Kouchner dut avaler son chapeau et présenter de plates excuses. Avec la visite de Nicolas Sarkozy, la France tente de reprendre pied dans un pays où sa non participation à la guerre contre l'Irak, décidée par Jacques Chirac et Dominique de Villepin l'a éloigné des juteux contrats de la reconstruction qui était monopolisée de facto par les Américains et les Britanniques. Il s'agit de rattraper un grand retard sur la concurrence. D'où les phrases grandiloquentes sur la disponibilité illimitée de la France à ouvrir une nouvelle page économique. Les autorités irakiennes semblent avoir accueilli la démarche de Nicolas Sarkozy avec beaucoup d'enthousiasme. Comme si la visite du président français était sans douté destinée à les sortir de leur tête-à-tête étouffant avec la Maison-Blanche. Sinon, comment comprendre la déclaration inhabituelle du Premier ministre Nouri el Maliki lorsqu'au plus fort de la visite de Nicolas Sarkozy, il sort une phrase aussi significative et aussi parlante que celle-ci : «Le temps des pressions américaines sur l'Irak est passé». Les Irakiens semblent déterminés, à défaut d'en être capable de diversifier leurs partenaires économiques et leurs interlocuteurs politiques. D'ailleurs en entamant cette tournée dans le Golfe qui le mène de Bagdad à Oman en passant par le Bahreïn et le Koweït, Nicolas Sarkozy ne cache pas son ambition de marcher sur des territoires traditionnellement sous influence anglo-américaine. Pénétrer ces marchés hermétiquement fermés, s'imposer comme un acteur diplomatique de la région, telle est la politique revendiquée par Nicolas Sarkozy. D'ailleurs sur le dossier iranien, Nicolas Sarkozy compte faire des étincelles. Profitant de la nouvelle conjoncture américaine qui envoie des signaux rassurants, Nicolas Sarkozy compte utiliser le canal omanais pour envoyer des messages à l'Iran. Oman est connu pour être un des rares pays du Golfe à entretenir des relations historiques et particulières avec l'Iran. De Mascate, Nicolas Sarkozy compte reformuler, à la lumière de la nouvelle donne américaine, sa proposition, qu'il a déjà eu l'occasion d'exprimer au nom de l'Europe, de tendre la main du dialogue et de la coopération à l'Iran en échange d'un signal clair sur sa décision de ne pas se doter du nucléaire à vocation militaire. •DNES à Mascate (Oman) Mustapha Tossa [email protected]