Benazir Bhutto a comparé, samedi, le Pakistan à une «cocotte-minute» sur le point d'exploser alors que le gouvernement ordonnait l'expulsion de trois journalistes britanniques. «Le Pakistan sous dictature est une cocotte-minute», a déclaré le chef de l'opposition une semaine après l'imposition de la loi d'urgence par le général-président Pervez Musharraf. «Sans exutoire, la passion de notre peuple pour la liberté risque d'exploser», a déclaré l'ancien Premier ministre devant un auditoire de diplomates étrangers lors d'une réception organisée au Sénat par ses partisans. Samedi, trois journalistes du Daily et du Sunday Telegraph ont été expulsés pour avoir fait usage d'un vocabulaire «offensant et ordurier» à l'égard des dirigeants pakistanais dans un éditorial publié vendredi. A Londres, les deux journaux ont refusé de commenter ces accusations. Benazir Bhutto, empêchée, samedi, par la police de rencontrer l'ancien président de la Cour suprême Iftikhar Chaudhry, entend défier le président Pervez Musharraf la semaine prochaine en organisant une grande manifestation pour la démocratie. Mme Bhutto a tenté d'atteindre la demeure du magistrat, assigné à résidence à Islamabad, mais la police a disposé deux camions en travers de la rue pour bloquer le passage. Après avoir décrété l'état d'urgence et suspendu la Constitution il y a une semaine en invoquant l'hostilité du système judiciaire et la menace islamiste, M. Musharraf a limogé la plupart des membres de la Cour suprême pour les remplacer par des juges qui lui sont plus favorables. La plus haute juridiction doit se prononcer prochainement sur la validité de sa réélection à la présidentielle du 6 octobre, alors qu'il occupait toujours les fonctions de chef d'état-major des armées, les deux responsabilités étant incompatibles au regard de la loi fondamentale. «Il est le véritable président de la Cour suprême», a lancé Mme Bhutto à l'aide d'un mégaphone en réclamant la réintégration de Chaudhry et de ses collègues limogés. La manifestation prévue mardi doit prendre la forme d'un vaste défilé automobile entre Lahore et la capitale. Benazir Bhutto, qui devait rencontrer des diplomates étrangers dans la journée avant de gagner Lahore dimanche, a fait savoir que le défilé de mardi serait annulé si Musharraf se décidait d'ici là à rétablir la Constitution, à renoncer à l'uniforme et à convoquer des élections législatives le 15 janvier, la date retenue avant l'instauration de l'état d'urgence. • Simon Gardner et Kamran Haider (Reuters)